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Elections législatives: Des imprévus ne sont pas à écarter

par Ghania Oukazi

  La nouvelle trame de la scène politique nationale tissée par ces dernières élections législatives maintient le FLN en position appréciable si on lui affilie tous les autres partis proches du pouvoir mais inquiète de par le nombre de sièges obtenus par le RND.

De prime abord, les observateurs relèvent «la poussée» du parti d'Ahmed Ouyahia qui des 70 sièges qu'il a obtenus à l'issue des élections législatives de 2012, gagne pour cette fois 27 autres en plus pour en atteindre 97. L'on constate en parallèle que le FLN a reculé depuis 2012 où il a été gratifié de 221 sièges pour en perdre aujourd'hui pratiquement la moitié et n'en avoir que 164. Le raccourci est simple et facile à prendre pour en faire les premières lectures. La nouvelle Constitution met en exergue de nouveaux indicateurs dont le poids sur la scène politique ne devra pas être sans conséquence sur la nouvelle assemblée en particulier et sur les grands équilibres politiques nationaux en général.

Le recul des partis de l'opposition est de fait. Confinée dans une expression parlementaire bien rétrécie, l'opposition qu'on veut bien identifier par le FFS et le PT s'est vu ainsi diminuer le nombre de ses sièges pour en bénéficier d'à peine 14 pour le premier au lieu des 26 qu'il avait obtenus en 2012 et de 11 pour le second qui en perd ainsi 13 si l'on se réfère aux 24 qu'il a engrangés en 2012. Le RCD qui en grand boycotteur en 2012 a réussi aujourd'hui à bénéficier de quelque 9 sièges. Les islamistes coalisés sous la houlette du MSP obtiennent pour cette fois 33 sièges et ceux au sein desquels active Abdellah Djaballah en ont décroché 15. Les voies de la politique peuvent amener à de nouvelles alliances si les bouleversements de la scène nationale l'exigent. L'alliance MSP dont le leader vise l'entrée au gouvernement pourrait regarder en direction des partis du pouvoir pour les adouber en cas de nécessité.

Des pronostics faussés par une consigne de vote ?

Premiers recoupements, l'évidence laisse ainsi voir que le FLN garde de prime abord sa position de leader à travers les 164 sièges qu'il a obtenus -certes c'est loin de la majorité-, mais qu'il peut se renforcer en ralliant à lui ceux gagnés par ses alliés en principe de «première heure» et de «toutes les circonstances» à l'exemple de TAJ qui remporte 19 sièges, le MPA 13, le FM 14, sans compter les autres petits partis proches du pouvoir qui ont obtenu 8, 4, 3, 2 et 1 siège. En cas de nécessité de quorum absolu au niveau de l'APN, cette large mouvance du pouvoir pourra, avec quelques concessions de forme, compter en plus sur l'appui des indépendants qui s'en sortent avec 28 sièges donc 10 en plus par rapport à leur gain en 2012. Le compte est en principe bon pour un FLN qui si on interroge ses grands commanditaires sur l'importance des autres partis proches du pouvoir, répondent sans hésiter «c'est le FLN qui leur a donné les premiers noyaux de militants pour se constituer en tant que tel». Il peut se passer alors du RND. Ce qui est acquis est que tous ces alliés affirment soutenir Bouteflika, ses engagements, son programme quinquennal et pourquoi pas un cinquième mandat présidentiel.

Mais ceci devient à partir de maintenant une histoire de lutte acharnée que devra mener le clan présidentiel contre ses opposants et au-delà, en convaincre les puissances étrangères notamment les Etats-Unis et la France qui une fois Emmanuel Macron officiellement à l'Elysée, afficheront certainement des attitudes plus pointues en faveur du changement?

Ouyahia soutenu par les corps constitués ?

Et pour cause. Les résultats annoncés hier laissent planer de grandes inquiétudes en haut lieu. Avec ses 97 sièges, le RND doit en principe s'estimer heureux pour avoir bénéficié des largeurs d'une politique de quotas dont les instructeurs refusent encore d'en changer la trame. Le parti d'Ahmed Ouyahia est certes loin d'égaler le FLN qui le devance de 67 sièges et bien davantage en calculant avec ses alliés. Mais ce qui inquiète, c'est que les pronostics faits en haut lieu (voir le Quotidien d'Oran du 2 mai 2017) ont été controversés par l'émergence inattendue d'un RND dont le chef commence à être craint. Bien qu'il s'est targué d'avance de décrocher plus de 200 sièges, l'on pense que les 97 qu'il a obtenus provisoirement le mettent en orbite pour une bonne projection sur 2019. Tout est lié à cette année qui fait durement travailler les cerveaux les plus avertis. Ce qui fait le plus peur c'est que l'on avance d'emblée que si le RND a réussi 97 sièges au lieu de pas plus de 60 prévus, c'est qu'il a bénéficié des voix des corps constitués qui, selon nos sources, « à la dernière minute », ont lâché le FLN. L'on avance que même l'administration n'a rien pu faire devant cette déferlante en tenue et en service. Ressentie comme une première secousse importante par les plus hauts responsables d'El Mouradia, par leurs alliés et soutiens, cette nouvelle percée du RND au sein de la nouvelle assemblée laisse entrevoir l'absence d'un consensus entre la présidence de la République et les hauts des Tagarins sur la suite à donner aux plus grands événements politiques à venir. Il est dit pour toute infime consolation que l'ex-parti unique restera -sauf imprévus- l'appui fort du président. « C'est de lui que partira le soutien au candidat du consensus.» D'ici là, pourtant, bien des ajustements, des changements et des permutations pourraient être apportés au sein des plus importantes institutions de l'Etat pour prévoir les surprises comme celle d'hier. Les imprévus de tout genre ne sont pas écartés.