Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Tamanrasset-In Salah: Sellal en enfant du terroir

par Ghania Oukazi

«Je suis votre fils, mon fils qui a aujourd'hui 35 ans est né dans l'hôpital de cette ville qui ressemblait à un bidonville, Tamanrasset s'est bien développée depuis (?)».

Abdelmalek Sellal n'est jamais aussi à l'aise dans ses visites à travers le territoire national que quand il va dans les régions du Sud et particulièrement à Tamanrasset, dans le Hoggar, In Salah et toutes ces contrées aux paysages lunaires, immenses et lointains. Il se retrouve parmi les siens. Il parle leur langue, sait comment leur répondre lorsqu'ils font part de leurs préoccupations qui sont tout autant grandes comme le sont leurs régions et leurs frontières avec les pays voisins, notamment la Libye, le Mali, le Niger et le Tchad. On lui rappelle d'emblée son passé dans la région. «Je suis arrivé à Tamanrasset (comme chef de daïra, ndlr), exactement le 10 juin 1978», confirme-t-il. C'est dire qu'il connaît bien l'évolution de ces populations qui, même si elles se sentent délaissées par le pouvoir central, rappellent avec fierté que «Abdelkader El Mali (Abdelaziz Bouteflika, ndlr) a été parmi eux pendant la guerre d'indépendance. «Je suis le fils d'un grand moudjahid de la région, nous avions des maisons à Kidal et à Gao (Mali, ndlr), la première maison dans laquelle est entré Bouteflika est la nôtre à Kidal», dit un intervenant.

«Saluez-la, c'est notre ministre de l'Education»

Tous les intervenants en ce jeudi où Tam recevait le 1er ministre ont rendu un vibrant hommage au président de la République. «Nous aimons tous Bouteflika, nous lui resterons toujours fidèles», lui disent-ils. «Nous aimons Bouteflika et vous en particulier, vous êtes l'un des nôtres, nous nous connaissons bien entre nous», dit un notable à Sellal. Les problèmes dans la région sont multiples et divers.

Les habitants d'In Salah remercient le président de la République d'avoir accordé le statut de wilaya déléguée à leur ville mais, soulignent-ils, «nous avons de gros problèmes». Un tronçon de 140 km reliant In Salah à Tam est totalement défoncé, selon eux. «Les ambulances qui doivent emprunter cette route se déglinguent très vite, il vaut mieux refaire la route au lieu de perdre de l'argent dans l'achat d'ambulances qui n'arrivent pas», dit une intervenante au 1er ministre. «L'argent manque», lui répond-il, mais «on va essayer d'en diminuer d'un projet pour le donner à celui de la réfection de la route», assure-t-il. «Nous vous demandons de lever le gel sur la réalisation d'un hôpital à In Guezzam, nous sommes obligés de nous déplacer vers l'hôpital de Tamanrasset, une distance de 400 km», lui demande un autre. «Le projet de l'hôpital est retenu, il va être lancé», assure Sellal. «On demande une pharmacie à In Salah pour pouvoir utiliser la carte Chifa parce qu'on ne peut le faire qu'à Tam», renchérit un autre. «Nous voulons l'ouverture d'autres écoles, la ministre de l'Education doit prendre en compte les spécificités des régions frontalières», réclame un notable. «La ministre de l'Education est juste et forte, elle va vous régler vos problèmes», lui répond Le 1er ministre. Nouria Benghebrit est très bien appréciée dans ces régions. «Saluez-là, c'est notre ministre de l'Education», dit un jeune père à ses trois enfants qui attendaient la ministre aux abords de la route où se trouvait le cortège officiel.

«Nous ne sommes pas des terroristes !»

Pour rappeler «les bienfaits de la réconciliation nationale décidée par le président», un intervenant racontera dans le détail ce qu'avait fait le Prophète Mohamed (QLSSSL) pour réconcilier entre deux personnes ennemies. «Tu as fait taire le ministre des Affaires religieuses», lui a lancé Sellal. Un jeune membre d'une association a, lui, préféré acculer les autorités locales. «On vous a arrangé la route par laquelle vous venez et repartez, sinon on n'a rien dans cette ville», s'est-il plaint. «On a un programme de 600 logements seulement alors que la demande est très importante, libérez le logement rural, les gens attendent d'être logés depuis les dernières inondations (?)», ajoute-il. Un représentant de la chambre régionale de commerce et d'industrie rappelle qu' «entre l'Algérie et le Niger, les frontières sont fermées officiellement depuis 7 ans mais les gens rentrent et sortent sans problème, il y a des échanges commerciaux qui se font, le troc marche mais nous avons beaucoup de problèmes, les prix des marchandises sont exorbitants parce que les quantités ne couvrent pas les besoins des citoyens, le kg de viande est à 1.200 DA, on n'est pas contre les mesures sécuritaires, nous demandons à ce que les commerçants soient sélectionnés et listés pour qu'ils puissent passer légalement et approvisionner les marchés». Il en vient à l'essentiel en soutenant : «On n'est pas des terroristes, on a certes une petite mafia qui circule librement, des voyous qui délestent les citoyens, hommes et femmes de leurs affaires mais personne n'a pu les arrêter», dénonce-t-il. «Vous nous connaissez bien, vous êtes un enfant de Tamanrasset, on doit s'asseoir avec vous autour d'un thé comme dans le passé et discuter en toute franchise de nos problèmes afin de leur trouver des solutions, on nous accuse pour rien, on n'est pas des terroristes !», dit-il encore. Un autre intervenant interroge «pourquoi on trouve la mangue du Niger à Casablanca alors que chez nous elle est interdite pour cause de frontières fermées ? On a des problèmes à Tintarabine, on a des serpents, des scorpions mais on a un seul infirmier qui sait à peine faire une injection».

«Il y a 40 nationalités  à Tamanrasset»

Un notable lui rappelle que « vous nous avez dit que la sécurité est une œuvre globale, elle ne doit donc pas dépendre seulement des services de sécurité mais doit entraîner la relance de l'économie, il faut ouvrir les frontières et créer un marché africain, on a 40 nationalités africaines à Tamanrasset, la sécurité ce n'est pas prendre une arme seulement mais consentir les efforts nécessaires au développement économique». Il est réclamé un poste de la Protection civile à Idless, une importante commune située à près de 200 km de Tam. «Nous voulons l'ouverture d'une université à In Salah, nous avons beaucoup de nos filles qui ont arrêté leurs études parce qu'elles ne peuvent pas se déplacer à Tamanrasset», avertit un notable. «Laissez-les poursuivre leurs études à Tam, comme ça, elles vont se marier», lui dit Sellal. «La ministre de l'Education est une femme que j'adore et je respecte (?)», commence par noter un intervenant qui semble connu comme un loup blanc. «Je veux m'en prendre au wali et à son secrétaire général en direct (aâla el moubachir)», continue-t-il. Wali qui, dit-il, «nous a fermé les portes, ne nous reçoit plus alors qu'on était considéré comme représentant de la société civile par tous les présidents jusqu'à Bouteflika». Il lance au 1er ministre : «Nous avons découvert un site archéologique historique du côté d'In Guezzam mais personne ne vous l'a dit (?). Il n'y a rien qui bouge ici, c'est nous qui aidons Bouteflika, vous m'avez compris?». La salle ponctuait ses propos par des acclamations et des youyous bien targuis. «Le wali et son SG doivent plier bagage», conclut l'intervenant.