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Sidi Bel-Abbès: Mort du lieutenant «Si Abdelkrim»: commémoration ou devoir de vérité ?

par M. D.

En cette matinée du mercredi 26 avril, les autorités civiles et militaires de la wilaya de Sidi Bel-Abbès ont assisté à la commémoration officielle de la mort du chahid, le lieutenant « Si Abdelkrim », un valeureux martyr dont le nom résonne pour les péripéties qui ont entouré la disparition de ce grand responsable de la révolution algérienne dans la zone V. De son vrai nom Bentaib Mohamed, « Si Abdelkrim » est né en 1925 au Douar Belkherraj dans la commune de Moulay Slissen. Un véritable mystère à commencer par une disparition un certain 26 avril 1962 alors que le cessez-le-feu a bel et bien été proclamé le 19 mars. Si réellement « Si Abdelkrim » est tombé au champ d'honneur au « Douar El Hnaicha » dans la commune de Amarnas suite à un accrochage comme l'atteste une stèle érigée à son effigie, quelles sont les motivations de ses assassins qu'ils soient des forces de l'armée française, de la soldatesque de l'OAS. Personne n'est en mesure de répondre avec des arguments valables à cette question qui reste pour longtemps un secret de polichinelle.

Un moudjahid qui a reçu la visite du wali chez lui lors de la cérémonie, nous répondra qu'il n'a pas assisté à la scène de «l'accrochage » car à cette époque il était encore en détention à la prison d'El Harrach. Nous avons compris que ce moudjahid voulait éviter d'aborder le sujet. A une certaine époque, nous dit-on, le nom de Si Abdelkrim était banni des lèvres des moudjahiddine qui évitaient d'aborder ce sujet pour des raisons qui demeurent et qui risquent de demeurer encore longtemps inconnues. Pour la première fois cette année, curieusement on programme une commémoration officielle. L'incident dont la fille de Si Abdelkrim était à l'origine ne semble pas fortuit et son hystérie est porteuse de messages lorsqu'elle crie en sanglots devant le wali des paroles qui font endosser la responsabilité de la mort de Si Abdelkrim à ceux qui « ont assisté ce jour du 26 avril ».

Qui sont ces gens auxquels la fille de « Si Abdelkrim » a fait allusion ? Les connaît-elle ? Selon une source proche de la direction des moudjahiddine qui reconnaît la disparition mystérieuse de ce valeureux chahid qui n'a finalement laissé que son turban sur le lieu présumé de sa mort, personne ne connaît le lieu de l'enterrement de Si Abdelkrim et quatre de ses compagnons qui ont connu le même sort. C'est tout un pan de l'histoire d'une région qui est occulté voire déformé et la passivité à ce sujet des historiens et chercheurs est criarde, pourtant le département de l'histoire de l'université de Sidi Bel-Abbès est bien fourni en cadres et docteurs chercheurs qui ne sont jamais intéressés à cette époque sombre de l'année de la proclamation de l'indépendance de l'Algérie, ne serait-ce que pour un brin de vérité.

Le plus grand nombre de témoins ne sont plus de ce monde, il en reste encore très probablement quelques-uns et la balle est dans le camp des spécialistes des faits historiques pour un devoir de vérité réclamé par une génération qui exige l'ouverture des archives de la révolution. Il y a maintenant 55 ans que le lieutenant Si Abdelkrim est tombé au champ d'honneur les armes à la main et on continue de dire que seul son turban a été retrouvé. Où est passé le cadavre ? Pourquoi n'est-il pas enterré au cimetière des martyrs ?