Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

2050, le règne des E7

par Akram Belkaïd, Paris

La prospective est une discipline qui n’a rien d’une science exacte, surtout lorsqu’il s’agit d’économie. Néanmoins, les indications qu’elle peut donner et les tendances qu’elle peut discerner sont toujours utiles. Cela permet d’élaborer des politiques selon les scénarios jugés parmi les plus probables. Cela donne aussi à réfléchir à celles et ceux qui ignorent quelle place occupe leur pays dans le concert mondial et comment il se positionne par rapport à ses voisins.

Basculement de l’économie mondiale

Dans une étude récente, le cabinet PwC vient de dresser le possible panorama qui pourrait exister en 2050. Sans surprise, on y apprend que le recentrage du monde va se poursuivre avec un poids de plus en plus important des pays émergents. Ainsi, le groupe des E7 (Chine, Inde, Brésil, Indonésie, Mexique, Russie et Turquie) pèsera-t-il près de 50% du produit intérieur brut (PIB) mondial. Dans le même temps, le G7 qui regroupe aujourd’hui les plus grandes nations industrialisées (Etats-Unis d’Amérique, Canada, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Italie et Japon) ne représentera que 20% de ce PIB. Autrement dit, la croissance économique globale sera portée par ces pays en phase de transformation. PwC estime ainsi que cette croissance sera en moyenne le double de 3,5% chez les émergents contre 1,5% chez les pays développés.

L’étude permet aussi de prendre conscience de la possible émergence de pays qui ne sont pas toujours identifiés comme étant de futurs champions. Plus personne n’est étonné de la présence de la Chine dans ces classements d’excellence future mais celle de l’Indonésie ou même de la Turquie peuvent interpeller. Cela vaut aussi pour d’autres pays comme le Vietnam et le Bangladesh qui devraient, selon PwC, rejoindre l’Inde dans le club des pays à forte croissance (5% en moyenne de 2016 à 2050). Figurent aussi dans les prévisions du cabinet l’Egypte, le Nigeria ou les Philippines.

Dans tous les cas cités, on relève que la démographie est un facteur incontournable. Nombre de pays appelés à jouer un rôle économique important au cours des futures décennies s’approchent ou ont déjà dépassé la barre symbolique des 100 millions d’habitants. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que la Russie concentre actuellement ses efforts pour enrayer son déclin démographique afin de ne pas perdre son rang. On sait aussi quel intérêt les Etats-Unis accordent à cette question de l’augmentation continuelle de la population (et donc du marché intérieur) même si l’élection de Donald Trump exprimait un souhait, d’une partie de la population, de limiter l’immigration. Au Japon, pays emblématique des défis posés par le vieillissement de la population, la question démographique est à la convergence de plusieurs débats nationaux (emploi des femmes, politique migratoire).

Des handicaps non négligeables

Bien entendu, il faut se garder de penser que l’histoire est déjà écrite. Nombre des pays mentionnés ont des fragilités importantes. L’instabilité politique, la pauvreté de leurs infrastructures ou la mauvaise qualité de leurs systèmes éducatifs sont autant de handicaps sur la route du progrès. A cela, s’ajoute un autre risque que la prospective n’a que très peu pris en compte au cours des années passées. Il s’agit des dégâts écologiques provoqués par des croissances importantes, cela sans oublier les effets négatifs du réchauffement climatique et de l’absence de mesures pour s’y adapter. Il est impossible de considérer le Bangladesh comme une future puissance économique sans avoir cela à l’esprit.