Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

De la réforme indispensable à l'Education nationale

par Ali Derbala*

« Les plus forts gagnent la bataille et les plus rapides gagnent la course ». Pearl Buck.

Dans une contribution très récente, Boudalia Bouchenak [1] a exhibé et a fourni des exemples de laxisme et du manque de professionnalisme dans la préparation de la langue fondamentale. On pense même à ce que la réforme pédagogique algérienne soit une oeuvre aléatoire ou empirique qui s'est construite au fur et à mesure, par voie d'improvisation et de retouches successives. Certes, l'élève doit être au centre du système et la pédagogie est la préoccupation première des enseignants. Une réforme est un travail longuement muri, et dont tous les détails d'application sont rigoureusement déduits de principes clairement posés et clairement pensés. Il ne s'agit pas d'accuser notre école de cruauté mentale envers nos enfants, mais depuis les deux ex- MEN (Ministres de l'Education nationale) et l'actuel MEN, passer vingt cinq ans ou un quart de siècle à ne procéder qu'à des réformes pédagogiques sans résultats probants, suscite un certain désarroi. Les matières indispensables sont les cours d'arabe, d'écriture, de composition, de dictée, du calcul ou des mathématiques, des langues étrangères, etc. Si on arrive à bien appliquer ce que les autres ont réalisé, l'Education nationale s'élèvera à un niveau appréciable. Les idées ci-dessous ne datent pas seulement des années quatre vingt-dix mais au siècle passé.

1. La langue arabe au service de l'éducation Du cours élémentaire de langue de Michel et Rapet, il est écrit : « il convient de faire servir l'enseignement de la langue à l'éducation de l'enfant, c'est-à-dire à son développement intellectuel et moral...A mesure que nous lui apprenons à distinguer, à séparer, à classer les mots, nous lui apprenons en même temps à démêler, à ordonner, à classer ses idées. A mesure que nous lui enseignons un nouveau signe, un nouveau tour pour rendre une idée nouvelle, un sentiment nouveau, nous faisons appel à sa raison et à sa conscience, pour apprécier la valeur morale de ce sentiment et de cette idée?Dans cette optique, la langue est la matière même de l'enseignement ; l'éducation en est le but, la grammaire n'en est que l'instrument. Et le cours de langue devient un véritable cours de logique pratique, de raisonnement, de bon sens » [2].

L'art d'écrire en arabe

Du dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire de Ferdinand Buisson en 1887, il est relaté que : « Il semble encore à la plupart des instituteurs que l'art d'écrire ne peut venir que lorsque l'élève connaît bien l'orthographe et l'analyse tant grammaire que logique. C'est une grave erreur. L'élève n'apprend bien sa langue qu'autant qu'il est exercé de bonne heure à l'employer pour rendre les idées qui lui viennent par les sens, par le jugement, par la conscience ; il s'y intéresse alors par le développement qu'y trouvent ses facultés créatrices, et les règles de la grammaire ne sont plus pour lui de sèches abstractions sur des mots isolés, mais bien les lois d'un organisme qui se développe avec la pensée, et qui ne sert pas seulement à l'exprimer, mais encore à la produire. » [2]

La composition en arabe

Du même dictionnaire de pédagogie de 1887, il est écrit encore une fois que : « Le point essentiel de la réforme est, selon nous, que l'élève ne se borne pas à recevoir des mots, à les plaquer dans sa mémoire, mais qu'il soit exercé à s'en servir, que la composition entre essentiellement et à tous les degrés dans l'étude de la langue. Ce ne sera d'abord que l'énoncé en deux ou trois mots des faits qui frappent l'élève ; le vent souffle, la poussière vole, l'oiseau chante, la fleur est flétrie ; puis chaque terme s'accroitra d'un qualificatif, d'un complément, et la phrase prendra de plus en plus d'extension ; le vent du nord souffle avec violence, une poussière épaisse vole sur le grand chemin, ce petit oiseau chante dès le matin sous mes fenêtres, la fleur de mon jardin est flétrie depuis hier. Ainsi vient à l'élève peu à peu l'idée du rôle des diverses espèces de mots, de la place que peuvent occuper les divers compléments.». Les dictées d'orthographe en arabe sont aussi indispensables [2].

Les calculs écrit et mental

Savoir compter permet de passer du qualificatif au quantitatif et à l'ordre de grandeur. Dénombrer, ordonner sont deux fonctions de base de l'utilisation des nombres. Une perception de l'ordre et de la quantité se fait tout le temps sentir. Additionner, soustraire, multiplier des jetons de couleurs doivent être perçues intuitivement avant de devenir des opérations élémentaires des mathématiques. Une fois la lecture acquise, c'est autant de temps à consacrer aux autres apprentissages. L'élève doit savoir compter, énumérer, apprendre par cœur la table de multiplication des nombres, calculer par les opérations élémentaires de l'addition, soustraction, multiplication et division, utiliser la fameuse « règle de trois » pour déterminer un pourcentage. Les formules élémentaires de longueurs, de surfaces et de volumes doivent être connues sur les bouts des doigts. Le prix de revient des achats, le profit des ventes, les couts et les pertes dans toute transaction commerciale sont à maitriser totalement et sans lacunes. Le calcul mental développe les capacités de réaction de l'élève aux situations urgentes.

5. Philosophie éducative de Confucius Confucius (K'ong-fou-tseu, né en 552) enseignait une morale basée sur la réalité sensible des choses, et sur la nécessité de l'utiliser au mieux. Sa méthode était scientifique, son but était l'action, la réforme de la civilisation, la recherche du bonheur général du peuple. Il disait :

« Donnez plus de valeur à l'action qu'au résultat » et étudiez ensemble, enseignez ensemble, pratiquez ensemble. Ne gaspillez pas votre esprit et votre temps en oisiveté et en querelles. C'est difficile d'enseigner aux autres en tenant compte de leurs capacités. C'est difficile de trouver et d'apprendre une bonne méthode. Il faut étudier ce qui doit être étudié, supprimer ce qui doit être supprimé, développer ce qu'il doit être développé, obtenir la connaissance qui doit être obtenue. Il faut d'abord discerner ce qui est important, quels sont les problèmes qui doivent être résolus d'abord et quelles est la question la plus urgente [3].

Pédagogie active

Les pédagogies les plus adoptées et les plus adaptées dans les écoles de beaucoup de pays développés sont de type pédagogie active. Tout progrès en pédagogie exige que les enseignants s'interrogent eux-mêmes sur le malaise qui sévit dans les écoles, collèges, lycées et universités. Ils doivent confronter leurs expériences, leurs succès, leurs échecs, etc. La réforme à l'école doit être continue dans un esprit constructif. La pédagogie active éveille en l'esprit des élèves le plaisir, la passion de rechercher et d'apprendre. Dans la pédagogie active, la classe doit être une grande équipe, une communauté solidaire. Ses élèves ne sont pas rivaux. Ils doivent s'échanger les documents, les informations, les adresses pédagogiques et des renseignements utiles. Le principe de la pédagogie active est que le meilleur travail des élèves à l'école, au collège ou au lycée se fait et est fondée sur l'apprentissage par projets de recherche, par enquêtes et par équipes. L'élocution est encore plus importante que la rédaction. En effet, les élèves auront dans la vie plus à s'exprimer par la parole que par la plume. Il faut organiser des débats, des discussions où des élèves peuvent accuser, défendre et juger sur des thèmes. L'enseignant n'interviendrait que pour rectifier les vices de forme. La réflexion et l'action pédagogiques se référent à la primauté de l'action dans l'acquisition de toute connaissance. Une approche par compétence est associée à chaque spécialité. Il n'y a pas une unique approche par compétence [4]. Ces méthodes appellent pour chaque matière ou discipline, aux initiatives des élèves. Encore une fois, c'est une alternance entre un travail individuel et un travail par équipe.

Conclusion

L'Algérie doit être disponible pour notre avenir et pour des tâches prioritaires telles que l'éducation, la santé, le chômage, le logement, l'amélioration de la qualité de la vie, l'assurance du bien être aux citoyens, etc. L'éducation et la formation sont un investissement majeur pour la croissance d'un pays. Elles peuvent concourir à promouvoir un développement durable, de favoriser la cohésion sociale et réduire les facteurs de tension. L'Algérie est un pays concerné par les interventions de l'Agence Française de Développement (AFD). L'AFD apportera un appui aux pays qui doivent encore consolider leurs systèmes éducatifs et qui utilisent le français. Ces interventions prendront la forme de prêts souverains et permettront donc des contributions significatives aux programmes d'investissements. L'étude des sciences exactes telles que la mathématique, la physique, la chimie et l'informatique ne saurait se concevoir sans libertés d'expression et d'opinion. La science ne supporte pas la médiocrité, ni l'esprit de flatterie ou de complaisance, mais doit accepter la critique.

*Universitaire

Références

1. Malika Boudalia Bouchenak. La longue marche de la langue fondamentale. Le Soir d'Algérie. Contribution, jeudi 12 janvier 2017, pp.8-9.

2. Pierre Giolitto. Le bon français entre à l'école. Dossier Histoire de langue française. Historia, Juillet 2005, pp.66-69.

3. L'humanité à la recherche de Dieu. WatchTower Bible and Tract society of New York, Inc. International Bible students Association, Brooklyn, New York, USA, 1990.

4. Coudray Léandre. Lexique des sciences de l'éducation. Les Editions ESF. 1973.