La
question identitaire semble être au cœur de la prochaine bataille électorale
française. Si le sujet est celui de prédilection des pamphlétistes
professionnels, à l'image d'un Zemmour plus virulent
que jamais, il devient une véritable arme de séduction des masses dans les
campagnes électorales des candidats à l'Elysée. L'extrême droite qui en a fait
son cheval de bataille est bousculée sur ce terrain par les Républicains et
leur tête d'affiche Sarkozy, offensif à satiété à l'approche de la
présidentielle, mais aussi par une gauche en déperdition qui ne veut pas céder
du terrain même sur celui, plus que contestable de l'identité. L'ancien
pensionnaire de l'Elysée a tiré une première salve en mettant les pieds dans le
plat, affirmant que les ancêtres des Français «étaient les Gaulois», mais aussi
«les tirailleurs musulmans» morts pour la France. Le candidat à la primaire de la droite, coutumier de la provocation, est
directement rentré sur le terrain de chasse du FN qui a fait d'une France
blanche et catholique «sa» France. Ce mardi, il avait tout simplement aboli
toutes les origines ne reconnaissant que celle des Gaulois, un précepte flou
même dans l'imaginaire français de souche. Sarkozy ne craignant pas le ridicule
ose tous les parallèles même les plus limites déclarant que «si l'on veut
devenir français, on parle français, on vit comme un Français (...) Dès que
vous devenez français, vos ancêtres sont gaulois». Suffisant pour soulever les
réactions les plus hostiles et les rejets des amalgames qui peuvent, davantage,
creuser le fossé entre Français de souche et ceux issus de l'émigration. De la
question identitaire à l'autre enjeu électoral, le lien est vite trouvé. Ainsi,
il rendra hommage aux Harkis, dont il avait rencontré des représentants le jour
même. Un dossier qui fait l'unanimité parmi les candidats à la présidence de la
France qui se sont, tous, affichés ce dimanche, lors
de la journée d'hommage aux Harkis, dans la cour de l'Hôtel national des
Invalides. Ainsi, Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen, présidente du FN, et
Jean-François Copé, un autre candidat à la primaire de
la droite, devaient assister à cet hommage. Hollande l'avait promis lors de sa
campagne post-élection mais avait attendu jusqu'au dernier semestre de son
quinquennat pour se rappeler des supplétifs de l'armée coloniale, conscient du
poids de la question dans ses relations avec Alger. A cette occasion, le
discours du chef de l'Etat français est celui d'une campagne électorale, avant
l'heure, s'adressant aux représentants d'un vivier électoral, certes réduit
dans le nombre mais important dans ses ramifications mémorielles, à travers les
trois millions de pieds-noirs présents en Hexagone.
En reconnaissant «les responsabilités des gouvernements français dans l'abandon
des harkis, les massacres de ceux restés en Algérie et les conditions d'accueil
inhumaines de ceux transférés en France», Hollande coupe l'herbe sous les pieds
de ses adversaires, plus particulièrement Sarkozy qui a failli à ses promesses.
En 2007, les Harkis s'étaient rangés derrière Nicolas Sarkozy.
Ce
dernier envisageait alors de reconnaître la responsabilité de l'Etat dans leur
abandon après les accords d'Evian. Hollande sait pertinemment que sa
déclaration va susciter un tollé en Algérie, mais le poids des Harkis et
surtout de cette chaîne des nostalgiques de l'ancienne colonie n'est pas
négligeable. Dans sa logique électorale, mieux les avoir avec lui que contre,
un intérêt qui se vérifie surtout dans sa présence à cet hommage, une première,
alors qu'au départ, il ne devait y avoir que le secrétaire d'Etat aux anciens
combattants, Jean-Marc Todeschini.