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Bulle sur les réseaux

par Akram Belkaïd, Paris

Jusqu’où ira la nouvelle bulle internet ? Ou, plus exactement, jusqu’où ira la bulle des réseaux sociaux ? C’est la question qui se pose après l’annonce, lundi dernier, de la volonté de Microsoft d’acquérir le réseau social professionnel LinkedIn pour un montant de 26 milliards de dollars. Le géant du logiciel a annoncé être engagé dans des négociations exclusives pour acquérir une entreprise qui ne gagne toujours pas d’argent ce qui n’est pas sans rappeler les opérations en cascade sur les fameuses « point.com » non rentables au début des années 2000. Lors de son dernier exercice, LinkedIn a vu en effet ses pertes être multipliées par dix pour atteindre 164 millions de dollars. Les optimistes pourront rétorquer que son chiffre d’affaires a progressé de 34,8% ce qui est un signe de développement en attendant les premiers gains.

Inflation des offres

Si l’on évoque l’existence d’une bulle, c’est que l’opération est plus que conséquente. Si l’on s’en tient à une approche boursière, Microsoft offre une prime de près de 50% sur le cours de l’action LinkedIn. Certes, cette dernière a perdu plus de 40% depuis le début de l’année, ce qui est une bonne opportunité pour la firme de Redmond en Californie mais le montant laisse tout de même songeur. Une infographie a fait le tour des réseaux sociaux pour montrer l’évolution récente de ces deals. En 2012, Facebook n’a déboursé qu’un milliard de dollars pour acquérir Instagram, le site de partage de photographies. Un an plus tard, c’était au tour de Yahoo d’en faire de même, pour un montant comparable (1,1 milliards de dollars), afin d’acheter Tumblr.

En 2014, Google créait la surprise en prenant le contrôle de Youtube pour 1,65 milliards de dollars. Mais la sensation est venue de Microsoft, déjà, qui, la même année, n’a pas hésité à débourser 8,65 milliards de dollars pour acquérir Skype, le système de communication sur internet. Et que dire des 19 milliards de dollars déboursés ensuite par Facebook pour acheter la messagerie instantanée WahatsApp ? Une application très populaire chez les jeunes et donc susceptible d’attirer de nouveaux abonnés pour « le » réseau.

On le voit, en quelques années, l’ordre de grandeur des opérations d’acquisition a été multiplié par 25. Et si l’on parle de bulle, c’est, d’une part, parce que ce genre d’opérations concerne le plus souvent des entreprises qui ne dégagent pas de bénéfices. Et, d’autre part, parce que cela influe sur le marché puisque la valorisation boursière de sociétés susceptibles d’être rachetées elles aussi augmente. Au passage, on rappellera que plusieurs experts avaient jugé que les patrons d’Instagram ont vendu leur entreprise trop tôt à Facebook. Idem pour ceux de Youtube. Quand on voit ce que Microsoft est prêt à mettre sur la table pour LinkedIn, on se dit qu’un peu de patience aurait été effectivement payant.

Elargissement de l’offre

Reste aussi à savoir pourquoi Microsoft veut racheter ce réseau social professionnel. L’idée de base est que le géant californien entend continuer à développer ses services dans l’immatériel et le « cloud computing », autrement dit l’informatique en nuage ou encore l’« infonuagique ». Fort de ses outils de bureautique, Microsoft va pouvoir élargir son offre en proposant des services en ligne, notamment de gestion de ressources humaines voire de recherche de profils. Dans cette optique, il n’est pas sûr que l’objectif premier de Microsoft soit de transformer LinkedIn en entreprise rentable mais plutôt de disposer de toute une gamme susceptible de conforter sa place de numéro un du logiciel.