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Pétrole : stratégie perdante de l’Arabie ?

par Akram Belkaïd

C’est donc le 17 avril prochain à Doha au Qatar que se jouera le prochain acte concernant l’évolution des marchés pétroliers. En effet, une quinzaine de producteurs d’or noir doivent s’y réunir afin de décider éventuellement d’une nouvelle stratégie pour mettre fin à la chute des cours du brut. Un repli qui s’est d’ailleurs ralenti puisque l’on assiste actuellement à un véritable phénomène de yoyo, le plancher des 25 dollars pour le Brent et des 30 dollars pour le WTI n’ayant finalement pas été enfoncé. Fin janvier, la qualité du gisement de Mer du Nord a atteint un plus bas depuis 13 ans de 27,88 dollars tandis que le West Texas Intermediate cotait à 30,76 dollars début février, là aussi, un plus bas sur la même durée. De façon générale, on note que les prix du baril ont même progressé de 50% depuis la mi-janvier.

Perte de parts de marchés

Pour nombre d’experts, il est donc évident qu’une annonce forte des membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), annonce à laquelle se joindraient d’autres producteurs majeurs (Russie, Mexique,…) aurait un effet immédiat sur le marché. Certes, les stocks restent partout élevés et l’économie mondiale ne tourne suffisamment pas fort pour relancer la demande. Mais on se doute bien que la perspective d’une fermeture du robinet va pousser les cours à la hausse.

Il reste néanmoins à se demander quelle va être la position de l’Arabie saoudite, principal responsable de l’évolution des prix aux cours de ces deux dernières années. On le sait, le royaume n’a pas voulu baisser sa production en considérant que le plus important pour lui était de maintenir ses parts de marché. Malgré la baisse de ses recettes et malgré le coût exorbitant de la guerre menée au Yémen, Riyad n’a rien voulu entendre estimant que sa priorité était de faire mordre la poussière à ses concurrents, qu’il s’agisse de producteurs classiques ou de nouveaux entrants spécialisés dans les hydrocarbures non-conventionnels (pétrole de schiste).

Or, le cabinet spécialisé FEG vient de sortir une étude qui démontre que la stratégie saoudienne de maintien de parts de marché a partiellement échoué. Si le royaume reste le principal fournisseur de pays comme le Brésil, l’Inde ou le Japon, il a perdu du terrain dans neuf des quinze grands marchés mondiaux. Ainsi, toujours selon FEG, entre 2013 et 2015, ses parts sont passées de 19% à 15% en Chine, de 53% à 22% en Afrique du Sud et de 17% à 14% aux Etats Unis. En Chine, c’est la Russie qui a taillé des croupières au pétrole saoudien. En Afrique du sud, ce sont le Nigeria et l’Angola tandis que le pétrole de schiste américain a joué un rôle déterminant dans la diminution de la dépendance pétrolière des Etats Unis à l’égard de l’or noir saoudien.

Vers un changement de position ?

Dans les semaines qui viennent, il faudra donc suivre de près les décisions prises par Riyad. Une acceptation d’une réduction de la production pourrait signifier que la stratégie saoudienne a effectivement échoué et qu’en sacrifiant les prix elle s’est avérée incapable de maintenir voire d’augmenter ses parts de marché. Un échec dont les conséquences risquent d’être importantes à l’heure où le royaume est confronté à nombre de défis, celui de la diversification de son économie n’étant pas le moindre.