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Journaux et partis : la cacophonie ?!

par Slemnia Bendaoud

Deux vieux généraux dans leurs costumes de super-héros se querellent en de véritables rebelles, tel que cela est aujourd'hui courant dans nos venelles, comme deux « Zorro » ou bourreaux d'un peuple à qui ils tenaient hier encore court la bride !

Deux chefs de valetaille qui se chamaillent en rejetons issus d'une chiffonnière de marmaille, se mouvant vaille que vaille, dans un très large éventail de gesticulations et de musculations juste pour compter parmi les ouailles du Grand Seigneur et Maitre des céans ! Deux tendances politico-administratives maintenues en vie de façon artificielle, solennelle et très officielle grâce aux pulpeuses mamelles d'un Etat, autrefois très généreux, montent désormais au créneau pour qui mieux mieux faire offre de bons services de « videur de poubelles » afin de soulager de sa misère leur mentor et seul distributeur de primes et autres galons de mérite politique !

Deux sortes de presse, celle des obligés et des affidés contre celle émargeant à cet esprit enquiquinant, très fouinant, malveillant, rechignant et répugnant, qui discutent entre elles à couteaux tirés, l'esprit éveillé et le doigt souvent sur la gâchette près à péter le feu, se sentant l'une l'autre dans son bon droit de dicter au peuple sa seule voix et unique loi !

Deux types de télévisions ?les unes pour le statut quo d'un pouvoir en disgrâce et depuis longtemps en place et les autres pour le changement à immédiatement engager- se partagent peu équitablement d'ailleurs un espace d'audimat où le débat politique est pratiquement absent chez les premières et très foisonnant chez ces toutes dernières, au point où les potes de ceux qui prêtent allégeance au système sont envoyés chez l'adversaire ou le « média de service » participer à leur table ronde, puisque très diplomatiquement interdits d'antenne à la maison et dans son tout proche rayon et environnement ! Deux des tout grands obligés du système qui se sentent fermement engagés auprès de celui qui mène la barque en ce moment s'entredéchirent à s'entretuer dans un fou-rire et à coup férir comme du papier d'un vieux journal ballotté par le mouvement continu d'un vent désastreux qui le contraint à tournoyer dans le sens imprimé à une véritable tempête qui le réduit en de toutes petites miettes et minuscules morceaux !

Deux grands chefs d'orchestre, connaissant par cœur ou sur le bout des doigts le rythme à imprimer à leurs discours, son lancinant et très classique refrain, la variation instantanée de sa tonalité, l'écho de la percussion et du violon qui doit l'accompagner, le tube à tout le temps bien jouer et surtout à tous les coups réussir, font ?juste pour berner leur monde- désormais dans ce faux-semblant de grand différend entre eux-mêmes qui les pousse si étrangement à soutenir le même programme et les mêmes personnes.

Deux paires de couples d'hommes et de femmes, les premiers contre eux-mêmes et les secondes contre les premiers-cités, auront depuis le 1er Novembre 2015 tenu en haleine le monde de l'actualité pour avoir meublé les « Unes » des journaux et l'audience des télés privées. A l'origine de leur manifestation publique, il est question de cette demande d'audience adressée au président de la république mais restée depuis sans suite que le premier couple tentait par tous les moyens de la faire avorter ! Deux groupes de deux femmes intellectuelles, mais chacune dans sa propre logique et spécialité, un véritable quatuor de femmes savantes en quelque sorte, n'ont-elles pas elles aussi investi en force l'actualité et la « Une » -images à l'appui- du quotidien EL WATAN pour crier haut et fort leur ras-le-bol mais aussi leur nette démarcation au sujet d'une « Constitution butin de guerre » que le régime veut la faire passer pour une « Constitution trésor d'un Etat » !

Deux parmi les tout acharnés défenseurs du régime qui nous gouverne au prix du mensonge et de la roublardise se donnent en spectacle par presse et télés interposées si fréquemment dans ce jeu d'atermoiement et de plaisanterie afin de tenter d'amuser avec leurs quolibets et discours insensés une galerie qui a déjà depuis très longtemps fui leur spectacle désolant et insolent et divorcé à jamais avec la politique du pays !

Deux parmi ces très hauts et anciens responsables de l'Etat algérien, ceux appartenant au système du parti unique, aujourd'hui divergeant sur la primauté du choix de l'une ou l'autre des deux actions relatives à cet axiome de « sauver l'Algérie et leur vie avec via l'interruption du processus électoral ou encore de sauver tout juste la démocratie en allant au second tour de ces mêmes élections législatives de 1991 », trouvent ce malin plaisir et besoin pour le moins assez osé de vider les poubelles de l'histoire en public, sans pour autant avoir à se protéger le nez contre toutes ces odeurs pestilentielles et nauséabondes de leurs ordures non encore ramassées relevant d'un passé longtemps ressassé !

Deux des plus zélés ministres et pantins d'un régime qui fait dans la pure frime, en quête de quelques strapontins de fretin butin à lui soutirer à la tire ou par la ruse au prix de leur peu subtile et inutile pirouettes, calculée allégeance et contre-nature appartenance, occupent la scène partisane pour du bout des lèvres distiller en sourdine ces obscurs discours sans écho de grande envergure !

Deux influents membres d'une même gouvernance qui se regardent en chiens de faïence, tous deux forts de leurs confirmées alliances et autres supposées obligeances, versent si intempestivement et très maladroitement dans cette divergence de leur point de vue et autres réminiscences au sujet de leurs réticences à vouloir accepter sans rechigner la doléance de l'autre, celle du voisin, du correspondant ou du concurrent !

Enfin deux groupes de personnalités historiques et politiques de poids considérable et dont l'écho de leur aura porte encore plus loin que nos frontières, crient en ce moment leur pénible douleur et celle encore plus pressante et très préoccupante de leur mère-patrie, le premier connu au travers de ce sigle du « 19 ? 04 » tandis que le second l'est au travers de cette formule du « 23 +n », partis tous deux à la recherche de cette Algérie de demain ou de l'indispensable changement institutionnel dont l'actuelle révision de la Constitution en fait l'impasse !

De toutes ces ambivalences plus haut citées, nuancées et classées, l'Algérie aurait pu en constituer de véritables paires, de vrais duos, de très solides équipes, de lointains échos, des couples naturels, de bons partenaires ; jamais de redoutables adversaires, des ennemis de toujours, des belligérants de différents fronts, des pans d'une même société impossibles à rassembler !

Dans la dualité de leur rivalité qui fait l'évènement quotidien et surtout l'actualité, dans cette adversité déclarée et très médiatisée, c'est plutôt à une Algérie déchirée et très éplorée que nous ouvrons droit bien malheureusement, celle qui pleure si souvent son sort déplorable mais aussi celui de ses propres fils qui se livrent à ce jeu si méchant et très dangereux dans une guerre larvée dont personne ne tirera le moindre avantage !

Dans ce cafouillis d'éboulis de valeurs plutôt sûres et ancestrales qui s'effritent au rythme des bruits de cacades qui accompagnent leur chute dangereuse vers les profondeurs abyssales de la vie en société du haut de leur autrefois respectée position et pourtant toute méritée réputation, c'est l'image de l'Algérie qui en est à vie ternie et plus que toute autre chose dépréciée et sérieusement ébranlée, altérée !

Au lieu de vraiment profiter de toutes ces innombrables opportunités, de nature à mieux consolider sa position dans le concert des grandes nations, en mettant à profit toutes ces expériences à capitaliser au travers de sa longue chevauchée et fructueuse Histoire, l'Algérie retombe à chaque fois dans les mêmes travers dès lors qu'elle semble donner cette impression de se relever de son grand calvaire.

Aussi, les médias, comme d'ailleurs les journaux et les partis politiques, tombent eux aussi, dans cette facilité ou fatalité du scoop et du show médiatique qui les éloigne davantage des analyses sobres et débats francs et fructueux, et sont donc souvent dressés les uns contre les autres, polluant au passage l'atmosphère, pour s'inscrire dans cette cacophonie qui fait l'affaire d'un pouvoir très rusé et machiavélique à souhait.

Les récalcitrants, peu convenants, non avenants ou encore indomptables parmi les organes de la presse seront interdits de publicité pour déposer juste après la clef sous le paillasson et disparaitre à jamais du paysage de l'information du pays, et seront ensuite poussés à s'expliquer devant des tribunaux aux ordres.

Les télés satellitaires, en dépit qu'elles soient toutes algériennes à 100%, émargent à cet étrange statut de sociétés étrangères activant en Algérie, et sont donc surveillées de très près comme de juvéniles délinquants, interdites de représentation locale sauf sous conditions et soumises à différentes autorisations pour l'accès à leur implantation et représentation locales afin de mourir à petit feu ou de s'éclipser définitivement, si ce n'est parfois leur interdiction administrative qui leur est notifiée bien avant même que cette procédure ne soit dictée par une quelconque instance judiciaire.

Aux partis politiques, se situant dans la même tendance, trajectoire et prolongement naturel ou encore refusant manifestement de s'inscrire dans l'agenda politique d'un pouvoir ayant autrefois ou hier encore décidé de leur création et but à leur assigner, sont, eux, frappés du sceau de l'arme redoutable du pouvoir propre à ce redressement, comme solution radicale et impériale, commandé d'en haut et à distance afin de diminuer, nettoyer, noyauter et ensuite anéantir leurs noyaux durs ou de faire éclater celui-ci en embryons de petits particules politiques à plus tard mettre en place (tout petits partis politiques) afin de diluer leur force, minimiser leur réel impact et de neutraliser leurs actions et projets communs.

Tout ce tapage médiatique et journalistique tonitruant qui se fait à coup de matraquage de grand aréopage d'hommes politiques du passé se faisant inviter sur des plateaux de télé ou même monopolisant de très larges colonnes des quotidiens indépendants les plus lus et considérés, se réalise finalement en arrière-plan d'une trituration à la sauvette d'une Constitution qui n'intéresse désormais plus grand monde à l'intérêt que l'on se doit de lui accorder parmi les toutes jeunes générations.

On est comme dans un moulin qui tourne malheureusement à vide, faute de grains à triturer ou à mettre sous la dent. Au bruit ronronnant et troublant de la machine se mêle celui humain très cacophonique qui nous fait perdre la raison et notre phonétique.

A l'heure où tout est perverti, notre culture s'en trouve plutôt bien absente, laissant le champ libre à ces « autres nouvelles valeurs sociétales » qui nous sont totalement étrangères, que notre dignité ne saurait cautionner !

Du fond de cet abime, renaitra sûrement une nouvelle génération ! L'esprit humain est ainsi fait : tout déclin sociétal est annonciateur d'un très proche renouveau des Grandes Nations.