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De la moralisation de la vie publique

par Slemnia Bendaoud

Tout homme public est tenu d'observer de manière très stricte et vraiment irréprochable un comportement en harmonie avec la stature qu'il est censé incarner. Autant dans ses accoutrements quotidiens que dans son langage utilisé et son attitude affichée en public.

A plus forte raison lorsque celui-ci se doit de véhiculer les idées-phares d'un quelconque programme politique, il lui est fait donc obligation de donner de lui-même le meilleur exemple qui soit et la plus nette possible image qui le mettent en valeur de façon honnête, sincère, responsable et parfois même très remarquable.

A ce sujet, cet orateur en devenir, promu bien souvent à un bel avenir, fait ses toutes premières classes au plus bas de l'échelle, pour ensuite grimper une à une toutes les marches d'un long escalier qui mène au plus haut palier des responsabilités partisanes ou même syndicales embrassées. Dans le jargon cher à la profession, cela a un nom et une référence tout indiqués : itinéraire politique et fidélité aux principes de la cause longtemps défendue, souvent au péril de sa vie.

C'est de cette manière-là qu'est élevée et longtemps formée la future élite politique -encore frimousses pépites des pupitres- au sein des sociétés évoluées ; les jeunes côtoyant si fréquemment dès leur précoce puberté politique des icônes de renom ou de grands noms de fabuleux courants politiques et philosophiques ayant fait leur preuve de par le monde des idées et de la pensée.

Solidement accrochés à leurs basques et vraiment hypnotisés par leur génie ensorcelant au plan de la pensée, ces tout jeunes hommes apprennent, jour après jour, à vivre dans le giron du courant politique embrassé, découvrant au fil du temps les symboles de ses idéaux politiques ainsi que les grandes lignes des perspectives liées à sa propension et futur développement.

De cette «écurie politique» très bien entretenue sortiront donc de futurs étalons capables de se régénérer à travers le temps mais surtout de porter très haut son étendard bariolé des couleurs défendues par ses militants, afin de brillamment s'imposer lors des grandes manifestations politiques du pays et même lors de ceux relevant de la toute petite contrée où le parti est implanté.

Voici donc très brièvement brossé le tableau des valeurs politiques succinctement étudiées tant dans leur essence et fondement que dans leurs aspects liés aux facteurs déterminants sur le plan de leur pleine expansion et future promotion.

Tout ce travail de fond correctement fait à la base, longtemps mené avec minutie et une grande habileté, est nettement visible au travers de la prestation publique de l'homme appelé à débattre des idées de son parti politique, en croisant le fer avec les autres courants du même bord ou plus couramment contre ceux de l'aile opposée à la sienne.

Au fil du temps et de ses nombreuses audiences ou cycliques apparitions, l'homme politique considéré se forge indéniablement une certaine réputation et véhicule à jamais une toute indiquée image d'où découle d'ailleurs le portrait-type qui le caractérise et le catalogue parfois à vie.

De toutes ses prestations fournies, l'opinion publique ne retiendra en mémoire comme symbole de sa personnalité que son franc-parler, que son esprit de synthèse éveillé, son sens du jugement fondé, la pertinence de son analyse précise au sujet des questions développées, sa grande capacité à raisonner dans la durée, ses réactions instantanées, réflexes innés et autres répliques à l'endroit des problèmes posés avec acuité, en gros, sa ferme détermination à ne jamais se déjuger et de surtout convaincre son auditoire avec argumentaires à l'appui.

Autant d'atouts importants qui pèsent vraiment lourd dans l'approche à faire au sujet de la personnalité étudiée de l'homme en question, vue dans ses menus détails, de face, de profil, à l'endroit comme à l'envers.

Tout compte fait, l'homme politique reste un éveilleur des consciences, une lueur d'un espoir certain, un miroir-clef sur notre tout proche devenir, un architecte-né du futur communautaire de la cité, une véritable locomotive de l'avenir pour son peuple, un décodeur de choix du puzzle de la vie citoyenne?

Tout le temps mis à l'épreuve de l'histoire, il n'en constitue pas moins, grâce à ses grandes décisions -surtout au travers de celles considérées comme les plus courageuses de ses idées lumineuses-, un véritable segment du déclenchement de ses perpétuels mouvements et autres plus ou moins utiles transformations, un opérateur de choix dans sa fonction de régulateur du souffle permanent dont jouit la vie des nations.

Au plan de l'éthique politique, ce sont donc ces valeurs-clefs qui mettent en évidence l'aspect purement déontologique que véhicule à souhait l'homme politique dans son quotidien, dans le respect total des formes disciplinaires et protocolaires requises en la matière ou en de pareilles circonstances.

Théoriquement, les choses se passent ainsi. Avec, par moment, certains dépassements qui frisent le ridicule, écorchent la morale, froissent les sentiments de la nation, fâchent les populations, polluent la plus haute sphère de l'atmosphère, et irritent la classe politique.

Comme un seul homme, les acteurs politiques du pays se lèvent tous pour condamner unanimement et énergiquement ces actes et les récuser sans ménagement, tout en conjuguant leurs efforts de manière à y mettre un terme rapidement et pour de bon, assainissant de la sorte le climat politique de la nation.

Au vu de toutes ces règles drastiques de la moralité politique universelle où en sommes-nous ? De quelle classe politique dispose présentement l'Algérie ? Croit-elle vraiment en ces vertus cardinales ? A-t-elle vraiment un quelconque lien avec tout ce répertoire politique que nous venons de citer plus haut ? Ou encore fait-elle semblant de s'y accommoder sans tout naturellement jamais y croire un seul instant ?

Quelle crédibilité faut-il encore accorder à nos «hommes politiques du moment» ? Que représente la part de vérité dans le flux de mensonges orduriers qu'ils nous déballent sans même prendre le soin ou la peine de relire leur copie avant d'en faire tous ces piètres discours politiques destinés à la population ou à la nation ?

D'où sortent donc ces énergumènes de toutes sortes qui nous empoisonnent la vie avec ces discours ressassés à l'infini de leurs ridicules réflexions ? Ont-ils fait leurs classes au sein de la toute prestigieuse école dont nous évoquons plus haut le statut et la renommée qui nous laissent longtemps rêveurs de l'acte politique mûrement réfléchi ?

Autant de questions troublantes de l'esprit qui nous laissent perplexes devant l'équation politique d l'Algérie qui nous est ainsi posée ! Tout étalon s'identifie d'abord à son écurie, tout comme tout élu l'est davantage au regard du parti dont il épouse ou se revendique de ses idées et ligne politique défendue !

Seulement, à quelle grande école philosophique ou à tout le moins puissant parti politique appartiennent-ils ? De quelle culture générale et itinéraire politique se prévalent-ils ? De quel background scientifique ou littéraire se gargarisent-ils, eux qui n'ont jamais fréquenté les grandes universités ni même accordé le moindre intérêt à la culture de l'individu et à la lecture des ouvrages de l'histoire du pays ou ses grandes plumes ?

Que dire encore de ces «intrus de la politique» qui disent une chose et son contraire et qui ne parlent au peuple que parce qu'en haut lieu on leur a intimé l'ordre de le faire, sous la forme d'injonction, leur dictant même le contenu du texte qu'il faut lire à haute voix et sans la moindre faute d'orthographe ?

Que dire aussi de ces autres trop zélés ou fantaisistes hauts ou grands commis de l'Etat, très arrogants et bien méchants de leur état, envers le petit peuple et les jeunes gens, dans leurs relations conflictuelles de communication avec leurs administrés ou même lors de l'exécution des tâches anodines relevant de leurs fonctions et attributions ordinaires ?

Dire vrai, parler juste et plutôt utile: tels sont les deux garde-fous d'un discours politique honnête, modéré et bien mesuré. Et qu'en est-il dans la pratique de ces deux vertus cardinales chez nos politicards ou commis de l'Etat algérien ?

La réponse à leur sujet fuse comme un trait de lumière puissant qui triomphe du premier coup de l'obscurité qui tient la forme d'un apparat trompeur au profit du vrai mensonge et du baragouinage trop suspect des mots qui se prêtent à la supercherie de le maquiller pour mieux l'enjoliver !

Nul doute que nos politiciens reflètent au travers de leur anachronique comportement du moment tout l'état de marasme qui ronge profondément la société algérienne. Devant leur échec à répondre positivement aux sollicitations pertinentes et aux interrogations légitimes des populations, ils improvisent leurs argumentaires et conspuent violemment leurs contestataires, vilipendent les populations et ternissent, à cause de leur langage osé, rusé, mafieux et par trop inconséquent, l'image de la Nation.

En l'absence d'arguments tangibles et de réponses convaincantes ou très plausibles, ces derniers peinent vraiment à trouver leurs marques, abandonnant leurs masques, se réfugiant précipitamment dans un langage plutôt insensé et versant intempestivement dans une violence verbale d'une rare intensité et méchanceté, faite de menaces gratuites et inexpliquées.

A base de touches habiles et saccadées qui empruntent leur sens à la dérision, leur entreprise soigneusement enveloppée dans une ruse continue, tourne très souvent à la sordide comédie ! A l'imbécilité !

Ils sont le produit de cette moquerie de mauvais goût qui défie à sa manière les lois de la République. Ils se sentent couverts ou bénéficiant d'une certaine impunité comme des rois autoproclamés dans ces «petits royaumes républicains» de tous zélés coquins !

Ils sont presque tous cette erreur monumentale de la nature humaine qui craint que rebondisse au grand jour le péché de sa naissance ! Ils cherchent après cette salutaire adoption qui les fuit à jamais. Pour l'éternité !

En ce moment où nous manquons cruellement de sagesse et de réel discernement dans nos analyses et propos, l'heure est vraiment grave ! A hauteur de ces fautes monumentales commises gratuitement à l'endroit de ces toutes petites gens, démunies de tout, mais dont l'espoir de pouvoir remonter la pente demeure entier !

Revenir au plus vite aux bonnes mœurs de la communication exemplaire nous incite à revoir de fond en comble toute la «pyramide des valeurs» qui est à la base de l'émergence au sommet de l'Etat et de ses nombreux démembrements de toutes ces «médiocrités avérées» qui n'ont fait visiblement que ternir l'image de marque de l'Algérie à l'étranger. Le décryptage du puzzle est à ce prix-là !