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30 % des importations surfacturées : Le scandale de la décennie

par Abdellatif Bousenane

C'est un véritable scandale, plus que celui de l'autoroute Est-Ouest, de Sonatrach et d'El Khalifa réunis. 30% de la globalité de la facture de nos importations sont des transferts illicites de devises via les surfacturations.

Le chiffre est lâché par le ministre du Commerce Bakhti Belaib, lors de son passage chez nos confrères de la chaîne III. Donc, c'est officiel, pour l'année 2014 l'Algérie a perdu plus de 18 milliards de dollars en transferts illicites à travers des surfacturations à l'importation. Si on fait le calcul sur les 15 dernières années, on se trouve devant une somme vertigineuse: plus de 150 milliards de dollars sur les 450 milliards d'importations. Quasiment les réserves de change actuelles du pays ! Le constat est affligeant, cette affaire va certainement faire des vagues, c'est ce que tout le monde espère en tout cas.

Mais la platitude et la froideur avec laquelle ce scandale a été diffusé par le premier responsable du secteur laisse entendre qu'on ne va pas faire grand-chose ! Puisqu'il ne cite aucun coupable, il ne nous informe pas sur les mécanismes et les procédures techniques et législatives que son administration a entamées pour dissuader ou sanctionner ces personnes morales ou physiques qui sont derrière cette affaire. Il n'explique pas, non plus, comment une telle somme peut échapper à l'Etat devant les yeux des services qui ont la responsabilité de surveiller les devises très chères à un pays très dépendant des hydrocarbures et donc très vulnérable en la matière ! Quelles sont les responsabilités des uns et des autres ? Pour réussir à «monter» de telles fuites de capitaux, il en faut beaucoup plus qu'une simple tricherie à la facturation, un véritable réseau de corruption de grande ampleur.

C'EST VERIFIABLE : LES IMPORTATIONS N'ONT PAS BAISSE !

On connaît le «phénomène», personne n'est dupe car les surfacturations et toutes les tricheries inimaginables existent bien dans ce secteur depuis longtemps. On parlait déjà de la mafia de l'import-import qui a des liens très forts avec des réseaux internationaux du grand capital mondialisé. Néanmoins, l'ampleur de ces chiffres et ses effets néfastes pour l'économie nationale nous renseigne sur les motivations sous-jacentes de cette «opération» qui représente une vraie déclaration de «guerre» contre l'Etat algérien !

Certains peuvent douter ou penser aux règlements de compte politiciens, or les faits sont vérifiables via les derniers résultats de notre commerce extérieur sur les 9 derniers mois. On peut observer, dès lors, que l'Algérie a importé pour environ 40 milliards de dollars alors que la valeur du dollar est nettement augmentée par rapport à l'euro. Sur les 9 derniers mois, 1 euro s'échangeait contre 1,10 dollar en moyenne. C'est-à-dire qu'on a importé pour près de 35 milliards d'euros. L'année dernière, 2014, avant les restrictions de tout genre et la politique de «rigueur», on a importé pour plus de 44 milliards de dollars, donc 34,5 milliards d'euros, sur la même période, puisque 1 euro valait 1,22 dollar en moyenne. Cela signifie que malgré la baisse sensible des importations en volume, elles restent aussi élevées en monnaie ! Un vrai mystère. Elles n'ont pas baissé en fait (35 milliards d'euros en 2014 contre 34,5 milliards d'euros en 2015, sur les 9 premiers mois). Il y a là une preuve irréfutable que le système de tricherie persiste encore ! Et que la protection du pays ne se limite pas au déploiement de milliers de soldats sur les frontières terrestres mais il nous faut aussi des «commandos» aguerris dans nos ports pour faire face à cette «guerre» de la surfacturation !