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Pharmaciens d'officine : Un métier en quête d'un nouveau cadre législatif

par A. Mallem

Selon M. Kamel Baghloul, président du conseil de l'ordre des pharmaciens de la région de Constantine, l'activité des pharmacies d'officine évolue sans aucun contrôle depuis l'année 2008 pratiquement. Parallèlement à cela, la formation de préparateurs et d'aides préparateurs en pharmacie ne se fait plus au niveau des écoles paramédicales depuis belle lurette. «Au temps du monopole sur le médicament qui était détenu par l'Encopharm, nous a-t-il expliqué hier au cours d'un entretien, « Constantine comptait 9 pharmacies d'officine privées contrôlées par un pharmacien inspecteur en titre. Aujourd'hui, nous sommes à 349 pharmacies au niveau de la wilaya et il y a un seul inspecteur faisant fonction de pharmacien inspecteur attaché à la direction de la santé qui est affecté à l'inspection ! ». Notre interlocuteur poursuivra la description de cet état des lieux en signalant qu'en matière de contrôle, il y a eu en 2008, une campagne d'inspection qui a été initiée par le ministère de la Santé publique (MSP) et qui avait abouti à la sanction d'une dizaine de pharmaciens d'officine et que le conseil de l'ordre avait pu faire annuler après avoir démontré que les intéressés s'étaient absentés momentanément de leurs officines pour des obligations professionnelles. «Mais depuis lors, il n'y a rien alors que les textes disent bien qu'une pharmacie doit être inspectée au moins une fois par mois», indique-t-il. «Aujourd'hui, il n'y a plus d'inspection, donc pas de sanctions », a affirmé M. Beghloul qui pense qu'il faut remettre de l'ordre dans ce secteur en commençant par « remettre à jour la réglementation le concernant qui date de 1996 ».

La loi fait obligation au pharmacien d'être présent en permanence au niveau de son officine. C'est l'arrêté n°60 du 9 juillet 1996 du ministère de la Santé publique qui fixe les conditions d'exercice personnelle de la fonction de pharmacien d'officine et pose les conditions de son absence, même momentanées sur plusieurs durées : absence d'une semaine, de trois mois, supérieure à cette durée et même d'une année. Dans son article 4, cet arrêté stipule qu'une officine ne peut rester ouverte en l'absence du pharmacien titulaire. Et quand ce dernier s'absente, il sollicite l'autorisation à l'inspection de la santé. « Mais l'évolution de l'activité de l'officine, indique le président du conseil régional de l'ordre, surtout depuis l'introduction de l'usage de la Carte Chiffa, a fait que les dispositions de l'arrêté en question soient largement dépassées». «Aujourd'hui, l'environnement a changé et le pharmacien à affaire à plusieurs grossistes, à la Cnas, à la banque, etc., et l'officine est devenue une administration et oblige le pharmacien de sortir de son officine. D'où la nécessité de faire évoluer les textes pour les mettre en phase avec la conjoncture actuelle», a-t-il souligné dans ce sens.

A propos de certaines pratiques condamnables signalées dans des officines, comme la délivrance de médicaments périmés par un personnel non formé et en l'absence du pharmacien, de cette absence qui se généralise, etc., notre interlocuteur a déclaré qu'en tant que conseil de l'ordre, il ne peut que « dénoncer l'absence du pharmacien titulaire », plus particulièrement du territoire national, si la pharmacie est toujours là.

« Nous dénonçons également l'emploi dans la pharmacie d'un personnel sans aucune qualification, l'officine étant devenue une affaire commerciale et familiale. Mais il faut signaler que les pharmaciens ne trouvent plus de personnel qualifié sur le marché de l'emploi, parce qu'on n'en forme plus », dira-t-il. Et, selon lui, la solution transitoire qui doit être dégagée c'est essayer de prendre des gens d'un niveau acceptable et de les former. Mais à condition aussi que le pharmacien soit là pour le faire. « C'est pourquoi nous nous trouvons dans un cercle vicieux », estima M. Baghloul.

Ce dernier pense qu'il faut, par conséquent, reprendre la question de l'exercice de la pharmacie d'officine de fond en comble. En actualisant les textes, en instaurant au niveau du ministère de la Santé un contrôle permanent et rigoureux et « une inspection des pharmacies d'officines dignes de ce nom », a-t-il conclu.