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Tchad : L'armée lance une vaste opération contre Boko Haram

par Stéphane Yas Et Célia Lebur De L'afp

L'armée tchadienne a lancé une vaste opération sur des îles du lac Tchad contre les insurgés islamistes nigérians de Boko Haram, qui ont multiplié attaques sanglantes et attentats-suicides dans la région ces derniers jours. Malgré la mobilisation des armées de la région, les attaques ne cessent pas dans les pays concernés. Dans l'Extrême-Nord du Cameroun, sept personnes ont ainsi été tuées depuis dimanche, dont trois décapitées, lors d'attaques menées par Boko Haram. Le Tchad, en première ligne dans la coalition militaire mise sur pied début 2015 (qui comprend aussi le Nigeria, le Cameroun et le Niger), a décidé de riposter sur les îles du lac, où de nombreux insurgés, affaiblis dans leurs fiefs nigérians, s'étaient repliés ces derniers mois. «Nos forces (...) ont intercepté (lundi) dans la matinée des éléments de Boko Haram en fuite» à une vingtaine de km au sud-est de Baga Sola, l'une des principales villes tchadiennes du lac, a affirmé à l'AFP une source sécuritaire, précisant que de «violents combats» se poursuivaient en fin d'après-midi dans la zone.

D'après cette source, un premier accrochage avait eu lieu samedi à Midi Koutou, une île du lac, faisant six morts et 15 blessés parmi les éléments de Boko Haram. Un soldat tchadien a également été tué. Les combattants de Boko Haram ont «enlevé beaucoup de femmes et d'enfants» dans leur fuite samedi, a indiqué la même source, sans pouvoir préciser leur nombre. «Environ 1.000 hommes (des forces de sécurité et de défense tchadiennes) sont positionnés pour occuper toutes les îles et neutraliser Boko Haram», a-t-elle ajouté. Une source proche des autorités locales a confirmé «une grande opération de ratissage» en cours dans les îles tchadiennes du lac, où le gouvernement a ordonné l'évacuation des populations. «L'armée est entrée en force dans presque toutes les îles (tchadiennes), ce sont essentiellement des petit îlots et des villages où elle fait face à une présence dispersée des Boko Haram», a-t-elle précisé. Il y a environ deux semaines, «à la demande du gouvernement tchadien, les autorités ont lancé une opération pour évacuer la population des îles (...). Presque 90% des habitants ont déjà rejoint la terre ferme», a assuré cette source. Ce dédale de centaines d'îlots et de chenaux camouflés entre les hautes herbes sert aussi de repaire pour les combattants qui viennent s'y cacher et chercher de la nourriture, raflant sur leur passage du bétail et des récoltes.

Le Tchad, qui joue un rôle-clé dans la lutte contre Boko Haram, a été récemment touché au coeur: dans la capitale N'Djamena, un attentat-suicide avait fait au moins 15 morts le 11 juillet, le deuxième en moins d'un mois. Le président Idriss Déby a promis qu'il ne «reculerait jamais» devant le groupe armé. Si l'opération régionale lancée en début d'année a infligé de lourdes pertes aux islamistes, elle n'a pas permis de les neutraliser. Les attaques sont devenues quasi quotidiennes. Les violences ont déjà fait plus de 800 morts depuis l'investiture, fin mai, du nouveau président nigérian Muhammadu Buhari, qui a érigé en priorité la lutte contre Boko Haram, désormais affilié au groupe jihadiste Etat islamique (EI). Après s'être déjà rendu au Tchad et au Niger, M. Buhari effectuera mercredi une visite au Cameroun pour évoquer la lutte contre l'insurrection, selon un porte-parole de la présidence nigériane. Après cinq attentats-suicides sans précédent en deux semaines, l'Extrême-Nord du Cameroun n'en finit pas d'être meurtri. Des membres de Boko Haram y ont décapité dimanche trois personnes après avoir attaqué deux petits villages, à une dizaine de km de la frontière nigériane, a-t-on appris de sources sécuritaires camerounaises. Par ailleurs, quatre personnes ont été tuées lors d'une incursion islamiste dans la localité d'Afadé, également frontalière du Nigeria, où la brigade de gendarmerie et un poste de détachement militaire ont été incendiés, selon des sources concordantes.