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« Notre démarche consiste à continuer, sans relâche, à mettre à nu les
crimes, les tortures et les massacres, ainsi que toutes les atrocités commises
par le colonialisme français en Algérie, de 1830 à 1962. Tôt ou tard, viendra
forcément une génération française qui découvrira la triste et honteuse vérité
du passé colonialiste de la France, s'en indignera et demandera pardon aux
Algériens?La France reconnaîtra un jour ou l'autre ses crimes», a affirmé, hier
à Oran, le ministre des Moudjahidine. Invité du forum de la Radio algérienne
tenu en marge du colloque international mettant la lumière sur « les crimes,
pratiques de torture, usage d'armes de destruction massive par le colonialisme
français en Algérie », le ministre des Moudjahidine a fait cette déclaration en
réponse à une question d'un journaliste tournant autour du projet de loi -resté
à l'état du vœu pieux- criminalisant le colonialisme français et qui se
voulait, on s'en souvient, plutôt une riposte à la loi -controversée même dans
l'Hexagone- du 23 février 2005 glorifiant le colonialisme puisqu'elle lui
trouvait des aspects positifs. Cependant, la revendication de la criminalisation
du colonialisme n'est pas près d'être abandonnée par l'Algérie, à en juger par
la réponse du ministre des Moudjahidine, qui s'apprête d'ailleurs à organiser à
Alger une conférence internationale sur « la criminalisation du colonialisme et
les souffrances du peuple algérien subies lors de la période coloniale ».
Néanmoins, Tayeb Zitouni a préféré rester dans « le principe moral » de la
criminalisation du colonialisme, évitant d'aborder ce dossier sous un angle
législatif, étant donné que ce projet de loi élaboré, lors de la précédente
législature, par des députés de divers horizons politiques dont le FLN, avait
essuyé une fin de non-recevoir du gouvernement, au motif que cette question
touchant aux relations extérieures de l'Algérie relevait des seules compétences
du président de la République. Plutôt que d'essayer tant bien que mal de
légiférer une loi criminalisant le colonialisme français en Algérie -avec
toutes les lourdes conséquences que cela entrainerait sur les relations
politiques et économiques entre Alger et Paris- il est plus judicieux et plus
efficace de maintenir la pression sur la France par une campagne
médiatico-politique, continue dans le temps et étendue sur la scène
internationale, pour démasquer et dénoncer les barbaries perpétrées par le
régime colonial français durant 132 ans, avec l'intime conviction que le
résultat s'ensuivra à coup sûr. « Les preuves matérielles et immatérielles
existent. Elles sont criardes, irréfutables. Une bonne part des archives
authentiques de l'ère coloniale se trouve en Algérie et, par conséquent, la
France ne peut nier toutes les atrocités faites aux Algériens pendant la
période coloniale, tout comme elle ne peut nier la mort de 40 000 Algériens
suite aux 17 expériences nucléaires menées dans le Sahara et la destruction de
8 000 villages du fait des plans Challe et Morice », a-t-il enchaîné.
Considérant les archives détenues par la France, « dont une infirme partie
seulement a été restituée à l'Algérie », un « bien et un droit de l'Algérie »,
le ministre a mis en doute, en des termes à peine voilés, la volonté de la
France de remettre ces archives. Il a, d'autre part, fait savoir que douze pays
ont restitué dernièrement à l'Algérie un lot d'archives non négligeable sur son
histoire de l'époque coloniale française. Il a rappelé en outre, que l'écriture
de l'histoire relevait de « la mission des historiens et écrivains intègres »,
précisant que son département ministériel se limite à réunir et à mettre à
disposition la matière première et s'interdit toute ingérence et immixtion dans
l'acte scientifique et intellectuel d'écriture de l'Histoire, « exercice
exclusif des plumes intègres et sincères parmi les historiens et les chercheurs
», a-t-il souligné.
Invité à s'exprimer sur la « portée », selon lui, de la dernière visite à Sétif du secrétaire d'Etat français chargé des Anciens combattants, Jean-Marc Todeschini, à l'occasion du 70ème anniversaire des massacres du 8 mai 1945, le ministre des Moudjahidine a qualifié ce geste officiel de la France de « petit pas en avant » mais « qui reste insuffisant », tout en l'inscrivant dans le registre du (début) de reconnaissance de la France de ses crimes commis en Algérie, mais non sans relever les remous et les vagues d'hostilité que cette visite n'a de cesse de susciter de la part de l'extrême droite en France. Revenant sur le thème du colloque organisé au Centre de conférences d'Oran, du 4 au 5 mai, le ministre des Moudjahidine a relevé que « le débat sur les pratiques répressives et la torture ont pris plus d'ampleur après l'émergence d'études historiques portant sur le sujet, ainsi que les aveux et les témoignages d'officiers et de politiciens des deux rives qui ont révélé de nombreux secrets sur la torture durant la Révolution armée ». Pour le ministre, «les recherches actuelles ont une portée académique, car elles se réfèrent aux archives françaises et la question de la torture ne s'est plus cantonnée à la compétence des chercheurs et historiens, mais elle est devenue l'objet de plusieurs œuvres d'art dans le domaine du cinéma et de la télévision ». « A travers cette rencontre, l'histoire va juger, au nom de la science, les sacrifices des générations passées, notamment la génération de novembre 1954, et les crimes perpétrés par le colonisateur », a souligné Tayeb Zitouni, ajoutant que « les générations montantes ont le droit de tout savoir sur les pratiques coloniales ». Peu auparavant, dans la matinée de la même journée d'hier, le ministre avait donné le coup d'envoi d'un autre colloque international, tenu celui-ci au Sheraton d'Oran, dédié à la dimension spirituelle et intellectuelle du fondateur de l'Etat algérien moderne, l'Emir Abdelkader, en présence d'une centaine de chercheurs et personnalités culturelles de différents pays. |
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