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Constantine : 200 porteurs de projets poursuivis en justice

par Abdelkrim Zerzouri

On passe à la caisse ou c'est devant le tribunal qu'on doit s'expliquer. Plus de laisser-aller vis-à-vis des jeunes investisseurs bénéficiaires de financements par le biais de l'Agence de soutien à l'emploi de jeunes (ANSEJ) qui ne respectent pas leurs engagements. Dans cet esprit, l'antenne de l'ANSEJ de la wilaya de Constantine a engagé des poursuites judiciaires contre 200 investisseurs dont les projets présentés et pour lesquels ils ont obtenu le soutien financier étatique n'ont jamais vu le jour, nous a confié le directeur de cette structure, M. Tarek Belmili. Ce dernier indiquera que le lancement des opérations de suivi sur le terrain quant à la concrétisation des projets financés par l'ANSEJ a permis de lever le voile sur certaines pratiques malhonnêtes adoptées par ces investisseurs « indélicats ». Des pratiques qualifiées de détournements de deniers publics, et qui vont de la vente du matériel par le bénéficiaire du soutien financier de ANSEJ aux arrangements occultes pour encaisser en liquidités l'argent destiné à l'achat du matériel et à le dépenser dans d'autres initiatives mal appropriées, à l'enseigne de l'achat de véhicules, de logements ou pire encore le claquer dans des nuits chaudes. L'ANSEJ s'est retrouvée dans l'obligation d'engager des poursuites judiciaires contre ces 200 investisseurs après épuisements de toutes les voies de règlement à l'amiable, souligne notre interlocuteur non sans se montrer désolé d'en arriver à cette ultime mesure qui ne va pas sans tracasseries pour les proches des jeunes investisseurs défaillants. « Souvent, lorsque les dossiers sont transmis aux tribunaux, des parents viennent tardivement requérir de l'ANSEJ un abandon des poursuites judiciaires contre leurs enfants », relève M. Tarek Belmili. « Alors, dira-t-il, qu'on aurait souhaité que ces parents, mêmes si les enfants ont atteint un âge de majorité et engagent leur entière responsabilité, soient les premiers accompagnateurs des jeunes investisseurs, les premiers à les conseiller, les orienter et à dénoncer toute déviation de la vocation du financement obtenu par leurs progénitures dans le cas d'un constat flagrant de l'utilisation à mauvais escient du financement des projets afin d'éviter justement d'aller s'expliquer devant le juge. »

 Notre interlocuteur nous apprendra que de nombreux autres dossiers sont en phase « pré contentieux », qu'on ne devrait pas orienter systématiquement vers le tribunal. A l'enseigne, il citera les cas « des vols de matériels, en hausse inquiétante depuis quelque temps, et qui hypothèquent la concrétisation des projets des jeunes investisseurs », souligne M. Tarek Belmili. Enfin, il n'y a pas que ce côté sombre du dispositif, car d'autres investisseurs ont réussi dans leurs affaires, donnant entière satisfaction dans leurs efforts. M. Tarek Belmili précisera dans ce contexte que l'échec de ces 200 investisseurs ne représente qu'une faible proportion de 2 % relativement au chiffre global des projets financés par l'antenne ANSEJ de la wilaya de Constantine, évalué à 10.000 projets depuis le lancement de cette formule en 1998. « Nous avons participé avec 8 projets innovants lors du dernier salon de l'innovation organisé à Alger au mois de décembre dernier », relèvera-t-il avec fierté. Ajoutant dans ce sens que « d'autres investisseurs ont atteint une importante vitesse de croisière dans le développement de leurs entreprises, arrivant à recruter jusqu'à 250 travailleurs pour certains d'entre eux ». Un autre investisseur ayant bénéficié du soutien de l'ANSEJ de Constantine, versé dans les matériaux de construction, a obtenu récemment l'accord du Forum des chefs d'entreprises (FCE) pour fuguer parmi ses membres. Et, soutient notre interlocuteur, les exemples de réussite ne manquent pas, on peut le constater objectivement sur le terrain. Pour M. Tarek Belmili, le challenge aujourd'hui c'est de vulgariser cette culture d'entrepreneuriat dans les milieux estudiantins, « véritables leviers du développement de l'économie nationale », dira-t-il. Précisant à ce propos qu'une collaboration très dense est initiée dans ce cadre avec l'université pour inciter les jeunes diplômés universitaires à se prendre en charge en créant leur propre entreprise et de ne pas attendre qu'on vienne leur proposer un emploi.