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La « Symbol » et la Ferrari

par Bouchan Hadj-Chikh

Certes, le panier du brut a baissé de 5 dollars au cours de la semaine écoulée. Pour se fixer autour de moins 80 dollars. Ce qui aura pour conséquence, la révision des dépenses de l'état, en termes de gestions et d'investissements, au cours des prochains mois. C'est à ce niveau, et même plus bas, que se reconnaitront les gestionnaires et les politiques avec une vision. On ne produit rien, on pompe. Et la pompe s'essoufflera bientôt. Tristes perspectives.

Mais il n'y a pas que de mauvaises nouvelles à annoncer.

La bombe du jour, et je m'en réjouis pour avoir défendu cela, est la déclaration du Directeur Général des collectivités locales au Ministère de l'intérieur, M. Azzedine Belkacem Nacer, sur la Chaine III, annonçant la mise en place d'une commission interministérielle, depuis le 18 Novembre, chargée de la promotion de « la gestion participative citoyenne au niveau des localités ». Pourvu que cette commission ne sombre pas dans dédales des tenants du pouvoir qui trouveront ses résultats trop osés. Tant qu'ils sont de ce monde.

Après ?

La mise en place de ce mécanisme « ne vient pas en remplacement de la démocratie représentative », a précisé M. Azzedine Belkacem Nacer, indique el Houari Dilmi dans le Quotidien d'Oran. « L'objectif premier des pouvoirs publics est d'arriver à renforcer la relation de confiance citoyen/élu et impliquer réellement l'administré dans la gestion des affaires de sa cité, démarrant du principe que la finalité du développement c'est l'homme».

C'est proprement sidérant d'entendre cela.

Pourquoi aujourd'hui se rappelle-t-on que l'article 16 indique que «l'Assemblée élue constitue l'assise de la décentralisation et le lieu de la participation des citoyens à la gestion des affaires publiques» ? Que cet article est renforcé par l'article 31, qui demande «la suppression par les institutions de tous les obstacles qui entravent l'épanouissement de la personne humaine et empêchent la participation effective de tous à la vie politique, économique, sociale et culturelle» ? Pourquoi « les codes communal et de wilaya, rappelle, de son coté, Madjid Makedhi, dans El Watan » -qui « renforcent aussi le principe de la participation du citoyen à la gestion de la cité » par trois fois dans le code de wilaya et huit dans le code communal »détaillant« les modalités de la gestion participative des collectivités locales » - n'ont jamais été appliqués ? Et pourquoi croirait-on, aujourd'hui, que les textes officiels devraient laisser la place à un autre texte refondu qui, lui, sera mis en application ?

Il y a beaucoup de « pourquoi » qui résonnent dans l'espace sidéral et sidérant de l'administration. Ainsi, celui-ci : Pourquoi les Wali, qui ont en charge la bonne marche des institutions locales, ne se sont jamais prononcés sur ces questions sinon dans des cercles confidentiels, même lorsque des métropoles sont en panne de gestion ? Que les élus n'assistent plus aux réunions ?

Comment ne pas comprendre, dès lors, la méfiance des citoyens ?

Si cette déclaration s'inscrira dans le marbre, pour êtresuivie d'effets, ce ne serait pas faire de la surenchère que de s'interroger sur la capacité des élus locauxd'aujourd'hui à la mettre en application, à admettre, du jour au lendemain, qu'il leur faudra céder un peu de leur arrogance impunie. A moins d'une mise en place de structures de suivies, il s'en trouverait des administrateurs qui freineront cette ouverture des quatre fers.

Il ne suffira donc pas de refondre le Code Communal pour que les vieilles habitudes se dissolvent dans l'air souvent vicié de nos villes. Il est même à craindre que les nouveaux « concernés » se retrouvent dans la position du tenant du pouvoir qui en abuse. L'atavisme aidant. Pour conserver leurs privilèges (extra) ordinaires. Et s'allier aux détenteurs d'hier d'une autorité discutable aux réflexes de propriétaire de la chose publique.

Ces édiles n'avaient pas pour mission, encore moins pour intention, de consulter leurs administrés durant le cours de leurs mandats. Dans la plupart des cas, ils n'avaient pas même un programme. Ilss'appuyaientsur les alliances passées, actualisées, pour accéder à la première magistrature des villes et villages. Dans ces conditions - et je ne voudrais pas là faire preuve d'un pessimisme excessif - les règles de gestion de la participation pourraient bien être courbées, tordues, pliées et rendues caduques dans la pratique.

En clair, on ne pourra demander demain à des « élus » en poste, et potentats,parfois avérés, de se muer en démocrates en permanente quête d'un consensus sur les préoccupations citoyennes nouvelles sur lesquels, bien entendu, lors des campagnes électorales, ils ne pouvaient se prononcer. Ni de se souvenir soudain qu'il existe des organisations et des femmes et des hommes au fait des problèmes de l'écologie et de la santé, par exemple, pour produire des avis éclairés sur la propreté de la ville. Ou d'autres encore suggérant le redressement des cités HLM qui se multiplient en y « implantant » des services sociaux, des parcs de loisirs, des lieux de rencontres comme il ne s'en trouve nulle part. Ils n'ont pas été élu ou n'ont pas compris leur élection ainsi.

Les mauvais génies ne pourront devenir les saints de demain.

Tout le monde sait qu'une Renault?le « symbol » en perspective des plus étouffants encombrements dans nos villes qui n'en peuvent plus de respirer du Co2 - ne pourra jamais devenir une Ferrari GTI. Et ce n'est pas en lui injectant l'essence d'avion, le Jet A1, qu'elle se mettra à voler pour rattraper le bolide. Dans le meilleur des cas, on obtiendra un moteur qui rendra l'âme au bout de quelques hectomètres.

Pour faire l'économie de soubresauts inutiles, de déviance, tant qu'à faire donc,autant procéder, avec l'adoption du nouveau Code Communal, à des élections locales et régionales anticipées. Dans un format clair. Dès le départ. Où les règles du jeux seraient un peu plus saines et innovantes sur lesquelles les nouveaux élus seront jugés au quotidien.

Et dans ce cas, prévoir la possibilité de motion de défiance populaire.