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Crise libyenne, terrorisme, Etat islamique, taxe tunisienne : Les réponses de Lamamra

par Ghania Oukazi

L'Algérie se dit prête à recevoir les parties libyennes en conflit pour leur permettre de dialoguer entre eux pour parvenir à la réconciliation nationale.

«Si elle doit abriter des rencontres pour l'amorce d'un dialogue entre les parties libyennes, elle est prête à le faire», a déclaré hier le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra lors d'une conférence de presse qu'il a animée conjointement avec son homologue portugais. Il a souligné que « l'Algérie ne refusera pas d'aider par n'importe quel moyen que les Libyens auront demandé pour dialoguer entre eux ; elle l'a déjà fait avec les Maliens, les Palestiniens. Son nom est associé au combat palestinien, à leur gouvernement après la création de l'Etat palestinien, à Alger et à la légitimité de la cause palestinienne». Si, précise-t-il encore, «pour les Libyens, l'Algérie doit servir de cadre pour la réconciliation nationale, qu'ils soient les bienvenus». Le ministre a tenu à rappeler encore une fois la position de l'Algérie au sujet de la crise libyenne pour noter que « c'est très clair, nous sommes pour le dialogue national, la réconciliation nationale, et pour donner la chance aux instances élues d'avoir plus de légitimité et pouvoir adopter des lois et règlements pour apaiser les esprits et encourager les Libyens au dialogue». L'Algérie appelle en même temps au respect des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU « notamment la dernière qui recommande l'arbitrage et de ne pas alimenter les parties en conflit en armes et en pièces de rechanges», fait savoir le MAE qui pense que cette résolution « est un pas important pour encourager le dialogue inter-libyen et la réconciliation nationale pour une Libye unifiée et pacifiée qui rejette le terrorisme ». Pour ceux qui veulent la pousser à intervenir militairement, l'Algérie a rappelé hier ses principes intangibles de non ingérence dans les affaires internes des Etats et la non intervention de son armée en dehors de ses frontières.

«Les pays voisins ne doivent pas jeter de l'huile sur le feu»

Elle l'a fait avec une grande clarté par la voix de son ministre des Affaires étrangères qui a précisé que «la crise libyenne est une crise complexe, c'est une affaire interne, l'Algérie a son principe de non ingérence dans les affaires internes des Etats, un principe immuable qui est vrai dans ce cas comme il est vrai dans d'autres». Il a mis en exergue « l'histoire dense entre les deux pays » pour souligner que « l'Algérie n'a pas cessé d'être à l'écoute des Libyens et de leur donner conseil en vue de réaliser leur unité et de saisir les opportunités d'un changement démocratique par le dialogue et la pacification de leur pays». Il estime que « les Libyens doivent s'accepter les uns les autres avec leurs positions respectives à condition qu'elles rejettent la violence et le terrorisme sous toutes ses formes». Alger demande en parallèle aux pays voisins « eux avant les autres », soulignera Lamamra, « d'œuvrer au règlement de cette crise, de s'interdire de s'ingérer dans les affaires internes des Libyens, de dire la vérité aux parties en conflit et de ne pas jeter de l'huile sur le feu». Interrogé par ailleurs sur le recours au principe de réciprocité en réponse aux autorités tunisiennes qui ont décidé d'imposer une taxe touristique aux Algériens, fin diplomate qu'il est, le MAE a expliqué en premier que « l'Algérie est connue pour être jalouse de la dignité de ses ressortissants à l'étranger et de sa souveraineté nationale, elle a toujours appliqué le principe de la réciprocité pour le prouver».

« Le cas ne doit pas être vu sous l'angle de la réciprocité »

Pour lui, « la relation entre l'Algérie et la Tunisie est excellente, à un point où elle pourrait être une relation-symbole, les Tunisiens disent de l'aide qu'ils reçoivent de l'Algérie dans cette phase difficile que c'est une aide qui pourrait être décisive du point de vue quantitatif et qualitatif». Lamamra plaidera davantage « la cause tunisienne » pour rappeler que «dans les pires années de terrorisme que l'Algérie a vécu, la Tunisie accueillait les Algériens sans visa, l'Algérie ne peut oublier cela ni ses citoyens qui se déplaçaient en Tunisie pour passer leurs vacances». Le ministre explique que « la taxe a été discutée avec le gouvernement tunisien le 8 septembre dernier lors du forum économique tenu en Tunisie. Nous avons reçu toutes les assurances que cette mesure allait être reportée et qu'elle ne sera pas appliquée aux Algériens». Il estime que « le cas ne doit pas être vu sous l'angle de la réciprocité ou par une étroitesse d'esprit». Il lâche enfin que «toutes les mesures décidées vont être appliquées à tout le monde» et précise que « ce n'est pas une décision répressive qui ne s'applique qu'aux Algériens uniquement». Lamamra terminera sa plaidoirie en faveur des Tunisiens en leur souhaitant «bon courage pour les élections législatives et communales qu'ils s'apprêtent à tenir». Pour ce qui est du rôle que doit tenir l'Algérie pour lutter contre « Daesh ou EI (Etat islamique en Irak et au Levant) », le MAE dira que « l'Algérie est un partenaire important dans la coopération mondiale pour la lutte contre le terrorisme ; tous lui reconnaissent sa grande expérience dans le domaine». Il affirme cependant que «l'Algérie évalue avec calme et sagesse les situations de conflit et plus les situations sont complexes, plus elles ont besoin de solutions diverses, la lutte contre le terrorisme s'inscrit dans le cadre réglementaire tracé par l'ONU qui impose le respect de la souveraineté nationale des Etats et la non ingérence dans leurs affaires internes». A propos de « l'EI », l'Algérie, dit-il, «est en discussion avec un nombre de pays arabes et autres ; elle condamne avant toute chose les actes terroristes de ce groupe qui s'est donné comme nom l'Islam alors que l'Islam renie la violence».

L'Algérie participera à la prochaine AG de l'ONU où, ajoute le ministre, «elle aura des discussions bilatérales, avec l'ONU, et le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, sur tous ses aspects de violence, d'extrémisme et de terrorisme ».