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Décès d'un Algérien en cours d'expulsion à Paris : Une enquête et des zones d'ombre

par Moncef Wafi

Abdelhak Goradia, 51 ans, est mort jeudi dans le fourgon cellulaire qui le transportait à l'aéroport parisien de Roissy en vue de son expulsion vers l'Algérie. Faisant l'objet d'un arrêté ministériel d'expulsion daté du 12 août, il était emmené peu avant 19h du centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes (Val-de-Marne), sous escorte policière. L'explication policière qui privilégie un malaise cardiaque est battue en brèche par les premiers éléments de réponse apportés par l'autopsie, révélés ce samedi, qui affirme que «la mort a été provoquée par une asphyxie due à une régurgitation gastrique». Suffisant pour inciter le parquet de Bobigny à ouvrir une information judiciaire pour «homicide involontaire», estimant qu'il s'agit d'un décès «a priori accidentel». Abdelhak Goradia était arrivé en France en 1996 avec un visa, mais a décidé de rester sur le territoire français malgré son expiration. En 2007, il avait été condamné pour escroquerie et vols, puis incarcéré. Multirécidiviste, condamné pour des faits de vols et escroqueries ainsi que des violences, il avait été immédiatement placé en rétention en vue de son expulsion immédiatement à sa sortie de prison cet été. Abdelhak fera appel de la décision de l'expulser en s'opposant à une première tentative d'expulsion, le 16 août, «parce qu'il a un fils de six ans né en France pendant sa détention», expliquera un de ses cousins. Son avocat, Me Sohil Boudjellal, revient sur le contexte «extrêmement tendu» de cette journée de jeudi. «Il ne voulait pas se faire expulser, car toutes les voies de recours n'avaient pas été épuisées», ajoutant qu'«il a été pris par la force. Il a probablement dû se débattre». Si le ministère français de l'Intérieur affirme sa «très ferme» volonté de faire toute la lumière «sur les circonstances de ce décès dramatique», il n'empêche que plusieurs zones d'ombre entourent la mort de l'Algérien. Deux de ses proches, qui ont pu voir sa dépouille, évoquent des sortes d'hématomes visibles sur son visage. «On a constaté comme des blessures au visage mais on ne pouvait pas voir le reste du corps qui était caché», a déclaré un de ses cousins à l'AFP. «Il avait comme un hématome sur le nez, sur le visage», a ajouté son neveu Hocine, sans pour autant indiquer leur origine. Sa famille, qui compte une vingtaine de personnes en France, devra théoriquement se porter partie civile pour connaître les circonstances exactes de sa mort, ont également précisé ses proches. Si pour le gouvernement français aucune thèse n'est privilégiée pour le moment, «c'est à la justice, et à elle seule, qu'il appartient de déterminer l'origine de ce décès», insiste le département de Cazeneuve qui rappellera que les enquêteurs de la «police des polices» s'étaient emparés du dossier. Alger a réagi officiellement à ce drame. Le chef de la diplomatie algérienne a ainsi saisi, ce samedi, son ambassade à Paris ainsi que les consulats de la région parisienne afin de recueillir les informations «officielles et précises» sur les circonstances de ce décès.