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Ghaza : le dessous des cartes

par Belhaouari Benkhedda *

Des dizaines de morts, des enfants qui pleurent, des meubles sous les décombres et des émirs arabes qui dénoncent un monstre sanguinaire qu'ils ont nourri et choyé. C'est presque du déjà-vu, sauf que cette fois-ci monsieur Erdogan et cheikh Qaradawi se font tout petits.

Un grand plan sur le Moyen-Orient. L'heure a sonné, les Etats-Unis ont décidé d'achever leur projet. Le puzzle est plus clair maintenant. Le désordre est éloquent. Tout se joue au finish.  

LE BRAS DE FER

Tout d'abord, il faut admettre que les Etats-Unis n'ambitionnent pas d'édifier la Cité idéale. Leurs objectif est claire et net, soumettre toutes les nations à leur logique esclavagiste. Rien d'original par rapport à l'absolutisme de Pharaon. Ce dernier était hautain sur terre. Selon les textes sacrets, il répartissait en clans ses habitants afin d'abuser de la faiblesse de l'un d'eux. Il égorgeait leurs fils et laissait vivantes leurs femmes.

Mais aux Etats-Unis, la crise financière s'accentue, la dette publique n'est pas plafonnée, les Américains vivent à crédit et le dollar ne vaut même pas l'encre qui a servi pour écrire sa valeur nominale. Les pays des BRICS essayent de faire bloc pour contrer le FMI. Leur projet de banque de développement séduit plusieurs pays comme la Bolivie, le Venezuela, l'Egypte ou encore l'Algérie.

Si les Etats-Unis ont réussi à soumettre l'Europe à leur volonté, ils n'ont toujours pas les pleins pouvoirs sur l'Eurasie. Monsieur Poutine ne fléchit pas. Il sait très bien que s'il perd l'accès sur la mer Noire et la Méditerranée, ce sera fini pour lui, raison pour laquelle, il n'abandonnera jamais ni la Crimée ni la Syrie. Le bras de fer se durcit alors. L'oncle Sam mobilise tous ses suppléants à travers le monde, notamment en Asie pour enfin avoir le dernier mot. En réalité, ce que nous voyons ces jours-ci en Palestine n'est qu'un aspect de la tactique étasunienne au Moyen-Orient.

DU GAZ ET DU PETROLE

L'histoire du Moyen-Orient et du pétrole sont indissociables. D'ailleurs, souvent, lorsqu'on en parle dans les médias, on projette un film noir et blanc dans lequel des émirs saoudiens mâchent du chewing-gum offert par des Américains en contrepartie du pétrole.

Les émirs saoudiens ne démentiront pas l'existence d'un projet de gazoduc allant du Qatar vers l'Europe et traversant l'Arabie saoudite, la Jordanie, la Syrie et la Turquie. Un gazoduc qui a enflammé la région avant même de voir le jour. Il fallait à tout prix assurer aux Européens un approvisionnement continu en gaz tout en les rendant indépendants de la Russie. La réalisation de ce mégaprojet a exigé l'élimination du régime de Bachar Al-Assd. Les djihadistes ont répondu alors présent pour faire le sal boulot. Pour contrer les ambitions grandissantes des Américains dans la région, les Iraniens, les Russes, les Irakiens et les Syriens ont décidé de construire un gazoduc allant de l'Iran vers l'Europe et traversant l'Irak et la Syrie. Les djihadistes se sont manifesté encore une fois comme une bête enragée. Dans cette histoire, le grand perdant c'est le mouvement islamiste Hamas. Il a commis une erreur fatale, a préféré s'aligner au rang des adversaires du gouvernement syrien. Il a tourné le dos à la Syrie et l'Iran qui l'ont toujours soutenu. Le comble, monsieur Morsi, président de l'Egypte (30 juin 2012 - 03 juillet 2013) a incité les frères musulmans palestiniens à abandonner définitivement le camp de la Syrie et l'Iran. Il les a obligé à signer un accord de cessez-le-feu en faveur d'Israël.

En 2014, les choses ont changé, le président de l'Egypte est le général Al-Sissi. Apparemment, il ne marchera pas sur les traces de Mohamed Morsi. Il faut le dire, cette fois, les enjeux sont considérables, il ne s'agit pas uniquement de cessez-le-feu. L'Etat hébreu veut plus, il veut entamer un cycle de négociations qui aboutira à la signature d'un accord pour l'exploitation du gaz récemment découvert au large des côtes palestiniennes.

UN NOUVEL AXE DE LA RESISTANCE

N'oublions jamais que Ghaza ne représente qu'une petite partie la Palestine. N'oublions surtout pas que la mosquée Al-Aqsa est toujours sous domination coloniale. Soyons réalistes, les Gazaouis n'ont ni les moyens humains, ni les moyens matériels pour libérer la Palestine. Deux questions sont à poser.

 Que se passent-t-il si le général Al-Sissi refuse de répondre aux espérances d'Israël ? Et que se passe-t-il si les Irakiens et les Syriens aidés par les Iraniens et le Hizbollah réussissent à vaincre le groupe terroriste Daech ?

En ce moment-là, l'axe de la résistance représenté par l'Iran, l'Irak, la Syrie et le Hizbollah, gagnera un nouvel allié appelé l'Egypte. Ce sera la fin du rêve américain au Moyen-Orient. La mosquée Al-Aqsa sourira enfin à ceux qui se nourrissent de justice et de paix.

* Enseignant universitaire