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La réélection de Bouteflika dans la presse étrangère

par Moncef Wafi

La proclamation de la victoire sans surprise de Bouteflika pour un quatrième mandat a suscité des réactions mesurées de la presse internationale, plus particulièrement, les journaux français. En général, la presse s'est contentée de rendre compte de cette présidentielle donnant les résultats officiels et rappelant la position du candidat Ali Benflis par rapport à ces mêmes résultats. «Le Monde» analyse la réaction de Paris qualifiée d'«extrême prudence» rappelant le contenu «lénifiant» du communiqué, diffusé dans la soirée de ce vendredi, où l'Elysée, toujours selon le quotidien français, s'est contenté de «prendre acte» du résultat. «Le Monde», rapportant le commentaire d'un influent haut fonctionnaire, souligne que le texte se garde bien de féliciter le chef de l'Etat algérien qu'on gratifie d'un «score à la soviétique» et se contente de lui souhaiter «le plein succès dans l'accomplissement de sa haute mission». Ce communiqué tout en retenue s'explique, selon le journal, par une volonté de ne pas jeter de l'huile sur le feu d'une relation toujours empreinte d'émotion et de susceptibilité. «Quoi qu'on dise, on prend toujours des coups : ou bien on nous accuse d'ingérence, ou bien on fustige notre indifférence», rapporte encore «Le Monde» citant un diplomate. Le quotidien rappelle, comme pour illustrer l'attitude de l'Elysée, le dernier incident diplomatique entre les deux pays en raison d'une boutade maladroite du président français. François Hollande avait déclaré, le 16 décembre 2013, sur le ton de la plaisanterie que Manuel Valls, à l'époque ministre de l'Intérieur, était rentré d'Algérie «sain et sauf». Pour «Le Monde» la réélection de Bouteflika ne faisait aucun doute adoubée par la dernière visite de John Kerry, le secrétaire d'Etat américain, à Alger où il s'est entretenu avec le président candidat sans pour autant rencontrer le principal candidat de l'opposition, Ali Benflis. Le journal revient également sur la position de l'Union européenne empreinte d'un évident manque d'enthousiasme rappelant qu'elle avait refusé d'envoyer des observateurs en Algérie. «Le Monde» croit que l'attitude de Bruxelles est dictée par la nature des rapports avec le régime algérien qui sont surtout empreints de realpolitik puisque l'Algérie vend aux Européens un tiers du gaz qu'ils consomment. Sans oublier qu'Alger est une puissance régionale et qu'elle joue un rôle majeur dans la lutte antiterroriste dans le Sahel et contribue à contrôler les flux migratoires vers le sud de l'Union. Pour «L'Humanité», Bouteflika est le vainqueur d'une élection contestée alors que Ali Benflis dénonce de «graves irrégularités» et «une opération de fraude à grande échelle». Le journal proche des communistes estime que l'ancien chef de gouvernement a gagné un statut de premier opposant au pouvoir politique algérien sur la base des comptages officieux de ses partisans le donnant largement en tête dans la quasi-totalité des département (ndlr : wilayas) aux environs de 17 heures, obtenant autour de 60% des suffrages. «L'Humanité» rappelle la décision de l'opposition, avant cette élection présidentielle «pliée d'avance», de se projeter dans l'après-17 avril. Ainsi, la «Coordination du boycott», qui regroupe des partis démocrates et des formations islamistes, a annoncé la tenue prochaine d'une conférence nationale pour une transition démocratique à laquelle ont souscris de nombreuses personnalités politiques et, à laquelle, Ali Benflis pourrait certainement prendre part, lit-on encore. «Al Qods Al-Arabi», publié à Londres, n'a pas été tendre avec Bouteflika s'étalant sur «la fraude généralisée» de ces élections et évoquant «un coup d'Etat du président contre son propre peuple, lui qui avait parlé d'un départ dans l'honneur». Le quotidien arabe critique vertement l'entourage du président et s'interroge sur l'issue des promesses irréalisables qui ont été données par ses relais.