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Frontières algéro-tunisiennes : Les nouvelles menaces des djihadistes

par Moncef Wafi

La présence d'activistes islamistes tunisiens à la frontière algérienne inquiète toujours Tunis qui doit composer avec de nouvelles menaces de «ses» djihadistes installés dans la région du mont Chaâmbi, théâtre de plusieurs actions armées depuis un peu plus de deux ans. Hier vendredi, un soldat tunisien a été tué dans l'explosion d'une mine sur le mont Chaâmbi, selon le porte-parole du ministère de la Défense. «A 11h45 (10h45 GMT), une mine terrestre a explosé à l'intérieur de la zone militaire fermée» sur le mont Chaâmbi, a indiqué Taoufik Rahmouni. «Il en a résulté la mort du conducteur d'un véhicule militaire», a-t-il dit à l'AFP.

Ce mercredi, tout le mont Chaâmbi, en y incluant les massifs montagneux voisins de Sammama, Salloum et Mghilla, a été décrété par la présidence «zone d'opérations militaires fermée», décision justifiée par Taoufik Rahmouni, comme étant la résultante de «la multiplication des menaces de la part des organisations terroristes basées dans la région». Le mont Chaâmbi est devenu un bastion des groupes djihadistes, lié à Al-Qaïda, traqués par l'armée tunisienne qui cherche à les déloger. Rappelons que l'armée et la gendarmerie tunisiennes traquent depuis décembre 2012 un groupe armé au mont Chaâmbi considéré comme une antenne d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Ce groupe est lié à l'organisation tunisienne Ansar Al-Charia, classée comme organisation terroriste et accusée de planifier des assassinats pour déstabiliser le pays. Dirigés par Abou Ayad, recherché par la police depuis l'attaque de l'ambassade américaine à Tunis en septembre 2012, les groupes salafistes armés ont apparemment décidé de se «sédentariser» alors qu'ils avaient toujours affirmé que la Tunisie n'était pas une «terre de djihad». Ce regain d'activité terroriste a poussé la France à déconseiller ses ressortissants de se rendre dans la région est de l'Algérie frontalière avec la Tunisie, et plus particulièrement dans la circonférence géographique du mont Chaâmbi, en raison de «la poursuite d'actions conjointes entre les forces de sécurité des deux pays». M. Rahmouni a aussi rappelé la dangerosité de cette région essaimée de «faux» barrages et de mines. En février dernier, un groupe armé a bloqué la route près de Bulla Regia, une cité antique romaine et numide, dans la région de Jendouba, dans l'ouest de la Tunisie. Deux passagers d'une voiture interceptée par le groupe armé, un gardien de prison et un civil ont été tué. Informée du faux barrage, une patrouille de la Garde nationale s'était rendue sur place pour tomber dans un guet-apens tendu par quatre éléments du groupe terroriste tuant deux gendarmes et en blessant autant.

 Les éléments des groupes armés et dans une tentative de briser l'étau sécuritaire qui s'est mis en place autour de leur place forte, n'hésitent plus à se déplacer vers d'autres régions. «Certains éléments terroristes ne sont plus retranchés sur le mont Chaâmbi seulement mais bougent vers des monts avoisinants», précise la Défense tunisienne. Quant aux effectifs de ces groupes djihadistes, ils ne sont pas connus puisqu'«il y a des éléments qui entrent et sortent par les frontières», explique le porte-parole du ministère de la Défense, Taoufik Rahmouni, en faisant état d'une coordination avec l'armée algérienne à ce sujet. Rappelons que lors de la visite début février de Mehdi Jomaâ, le tout nouveau Premier ministre tunisien, à Alger, l'un des dossiers névralgiques discutés est celui du volet sécuritaire, de l'aveu même de l'homme fort du gouvernement tunisien qui a déclaré sentencieusement que «la sécurité de l'Algérie est celle de la Tunisie, et vice-versa». Le message a le mérite d'être clair et surtout d'actualité quand on connaît l'importance qu'accorde l'Algérie au danger terroriste venant de ses frontières est. Alger n'a d'ailleurs pas attendu l'élection d'un nouveau gouvernement tunisien pour sécuriser sa bande frontalière, en mobilisant d'importantes forces de sécurité et en offrant, au départ, sa coopération à Tunis. En septembre dernier, l'Algérie avait mis en grade et prévenu la Tunisie contre une importante opération de contrebande d'armes qui est en train de se préparer. Cette opération, qui a pour origine le territoire libyen, consistait à transporter des armes vers l'Algérie ou la Tunisie.