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Ferial Bentchicou Furon au « Le Quotidien d'Oran » : «FARR est un rassemblement de la société civile»

par Akram Belkaïd

Le 6 février dernier, à Paris, a eu lieu au Pavillon Dauphine, à Paris, le lancement du mouvement Franco Algériens Républicains Rassemblés. Une démarche initiée par Ferial Bentchikou Furon, une Franco-Algérienne qui s'explique ici sur ses motivations et projets.

Le Quotidien d'Oran : Quel est l'objectif de votre mouvement ?

Ferial Bentchikou Furon : FARR (Franco-Algériens Républicains Rassemblés) est un rassemblement de citoyens qui ont en commun un lien affectif avec l'Algérie. Républicains et laïcs, notre objectif est de nous unir dans l'affirmation de notre citoyenneté française pleine et entière. Sans rien oublier, sans rien renier, nous avons vocation à rassembler tous ceux qui se vivent comme partie intégrante de la communauté nationale française et qui, à ce titre, revendiquent l'intégralité de leurs droits comme ils assument l'intégralité de leurs devoirs.

Q. O.: Pourquoi le lancer maintenant ?

F. B. F.: Regardons la simple évidence des faits, ouvrons nos téléviseurs, nos ordinateurs : face à la montée en puissance des populismes xénophobes en France et en Europe, ce rassemblement est devenu une urgence. Nous sommes la première communauté en France. Nous sommes près de 3,5 millions. Mais nous sommes toujours considérés par nos concitoyens comme un appendice de la société française que l'on méconnaît, qu'on caricature, voire dans certains cas extrêmes, dont on conteste l'appartenance à la communauté nationale. Ce n'est tout simplement pas acceptable. Il était temps de nous rassembler, de nous unir afin de prendre notre destin en main. Français, il est temps de prendre toute notre place dans la société française, par le dialogue, par la compréhension mutuelle et tout simplement par une meilleure connaissance de ce que nous sommes.

Q. O.: Votre mouvement est soutenu par Ghaleb Bencheikh ?

F. B. F.: J'ai ressenti le besoin de ce que je viens d'évoquer à Ghaleb Bencheikh, président de la conférence mondiale des religions pour la paix. J'ai une grande estime pour lui de par son histoire et l'ampleur de ses travaux sur la pensée islamique dans laquelle je me reconnais totalement, comme un grand nombre de musulmans en France qui partagent sa sagesse. Cette estime, cette affection, je la partage avec l'ensemble des membres fondateurs de FARR. Je lui ai fait part de ma volonté de fonder le mouvement FARR et lui ai demandé d'être à nos côtés en tant que président d'honneur. Il a accepté et nous en sommes ravis.

Q. O.: Avez-vous une dimension politique dans votre démarche ?

F. B. F.: FARR est un rassemblement de la société civile. C'est un mouvement citoyen résolument au-dessus du clivage gauche-droite. C'est aussi un mouvement générationnel. Nous sommes pour la plupart, nés après l'indépendance de l'Algérie. Nous sommes par conséquent les plus à même d'effacer les cicatrices de nos aïeux et de porter un projet qui incarne l'espoir d'un nouveau départ entre la France et l'Algérie pour les jeunes générations. Deux grand pays qui ont vocation à être partenaires et amis. Ce serait une faute que d'oublier le passé, ce serait une erreur de ne pas regarder vers l'avenir. Nous voulons apporter des solutions concrètes pour la cohésion nationale par un programme précis d'actions. Notre credo est d'éclairer les esprits pour favoriser le dialogue. Nous voulons être à l'écoute de tous, nous voulons dialoguer avec tout le monde, nous voulons connaître et nous faire connaître. Nous ne rejetons personne hormis les extrêmes car nous sommes convaincus que mieux nous faire connaître permettra l'ouverture et la compréhension mutuelle.

Q. O.: Le paysage associatif franco-algérien est déjà conséquent, pourquoi une nouvelle organisation ?

F. B. F.: Permettez-moi de reformuler votre question : y a-t-il pléthore d'associations franco-algériennes ? Certes, il y a beaucoup d'associations franco-algériennes dans le domaine culturel, cultuel, économique et social. Toutes sont légitimes, toutes ont leur place. Nous n'excluons d'ailleurs pas d'avoir à travailler sur des chantiers communs avec telle ou telle dans l'avenir. Mais l'originalité de FARR est de s'adresser à l'ensemble de la classe politique française et de proposer des solutions aux problèmes que rencontre notre communauté en France. J'insiste sur le mot « ensemble » : FARR souhaite dialoguer aussi bien avec la gauche, qu'avec la droite. Nous ne pratiquons aucune sorte d'exclusive, extrémisme mis à part. Dans un esprit résolument pragmatique, nous avons décidé de mettre en place deux événements FARR, les assises des banlieues et le forum économique. Au travers de nos assises des banlieues, nous souhaitons réaliser un rapport avec des professionnels, à l'instar de l'institut Montaigne, pour un état des lieux des problématiques et pour proposer des solutions en nous appuyant sur l'expérience et le savoir-faire des acteurs locaux. Certaines propositions seront du ressort des politiques publiques, d'autres seront liées à des initiatives privées. Pour exemple, nous aurons à cœur de nous appuyer sur l'offre d'Orchestraaa, collectif de spécialistes de l'intelligence collective (*) afin d'aider les jeunes adultes à réaliser ce en quoi ils sont doués et peuvent apporter une contribution notable à notre pays. Notre forum économique aura pour objectif de favoriser l'esprit d'entreprise sur cette base de revitalisation de la fierté de qui nous sommes et d'aider les porteurs de projets à un accès à des financements par des business angels.

Q. O.: Vous êtes une élue de droite, comment assurer que le FARR ne sera pas un sous-marin de l'UMP ?

F. B. F.: Je ne suis pas à ce jour une élue de droite. J'ai en revanche un parcours politique personnel de sensibilité libérale. D'autres membres fondateurs de FARR sont par ailleurs engagés politiquement à l'UDI, au PS et à EELV. C'est précisément cette diversité, cette multiplicité d'engagements qui fait l'originalité de notre mouvement. C'est ce qui me permet d'affirmer que FARR est un mouvement citoyen résolument au-dessus du clivage gauche-droite. D'ailleurs à ce propos, je profite de l'occasion que vous m'offrez pour préciser que pour notre événement de lancement, nous avions pris grand soin d'équilibrer la représentativité politique de nos intervenants. Nous avons invités Jean-Pierre Chevènement, Anne Hidalgo, Nathalie Kosciusko Morizet et Valérie Pecresse. Seule Madame Nathalie Kosciusko Morizet nous a fait l'honneur de sa présence. Nous espérons qu'à notre gala de 2015, les représentants de la gauche répondront favorablement à notre invitation. Nous considérerons avoir atteint une partie de nos objectifs, le jour où nous rassemblerons autour des événements que nous organisons l'ensemble des sensibilités politiques françaises.

Q. O.: Est-ce que les autorités françaises ne vont pas s'inquiéter de ce genre de démarche ?

F. B. F.: Dans quelle mesure FARR qui veut œuvrer en faveur de la cohésion nationale inquiéterait-elle les autorités françaises ? Bien au contraire, nous voulons fédérer notre communauté autour des valeurs républicaines. De plus, nous souhaitons travailler avec les « autorités françaises », qui je le rappelle sont nos autorités, en tant que citoyens français.

Q. O.: Quel est le programme de travail pour les mois à venir ?

F. B. F.: Après notre lancement réussi qui a réuni 850 personnes au Pavillon Dauphine, nous nous devions d'agir à court terme. Ainsi, nous envisageons de réaliser deux actions avant l'été. D'abord, une demande de consultation officielle au gouvernement sur la question de l'intégration. Ensuite, un colloque au sénat sur l'image de l'islam en France au mois de juin sous le haut patronage de Ghaleb Bencheikh. J'espère que vous serez tous présents le 6 mars prochain pour que nous nous mettions au travail ensemble.

Les assises des banlieues nécessitent un travail de terrain de longue haleine et nous espérons réaliser un rapport avant la fin de l'année 2014. Nous prévoyons de réaliser notre forum économique en 2015. Et chaque année, nous aurons le plaisir de réunir nos membres et sympathisants au cours d'un gala en présence de la classe politique au cours duquel nous ferons un bilan de nos actions et nous récompenserons des parcours d'excellence en France et à l'étranger, une belle occasion de comparer les mentalités entre différents pays dans un monde globalisé.

Q. O.: Comment êtes vous organisés ?

F. B. F.: Nous sommes en quête d'efficacité. Pour cela nous nous appuyons sur une structure de compétences collectives où chacun apporte sa pierre à l'édifice en fonction de son appétence et de son expertise. Notre conseil d'administration est composé de conseillers qui constitueront des groupes de travail pour l'organisation de nos événements FARR ; de responsables nationaux qui seront à l'écoute des besoins et qui représenteront le mouvement FARR à l'échelle nationale et, enfin, de responsables internationaux qui accompagneront le rayonnement des valeurs de FARR dans le monde.

(*) : http://patriciasoumarmon.wordpress. com/about/orchestraaa/