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«La crise du parti FLN brouille les juridictions de l'Etat»

par Dr Boudjemâa Haichour (*)

La requête formulée par les quinze frères membres du CC auprès du Conseil d'Etat a fait l'objet ce jeudi d'un refus. Si pour le moment aucun commentaire ou du moins aucune réaction ne s'est faîte, le temps nous donnera le pourquoi. En fait, la session du Comité central du Parti FLN s'est tenue le 16 novembre 2013 à l'Hôtel Aurassi.

Le SG intronisé le 29 Août de la même année, en cherchant de gagner le temps pour asseoir son autorité, a finalement trouvé la voie d'accommodements pour proposer sa liste des membres de son Bureau Politique selon l'article 10 du règlement intérieur du CC qui lui donne toutes les prérogatives, puisque le BP n'est pas soumis à l'élection mais simplement à l'assentiment des membres du CC

Mais assister à une session statutaire du Comité Central à laquelle j'ai toujours revendiquée, ne veut en aucun cas dire cautionner une démarche ou même des décisions. Le Parti n'est pas une propriété privée pour que l'on se l'approprie. Ceux qui l'ont intronisé le 29 Août 2014 savent que les précédents SG ont suivi la même démarche.

Je dirais tout simplement que les décisions du Conseil d'Etat et ses tribunaux administratifs relèveraient de l'autorité régalienne politiquement admise. Il faut savoir que dans la Constitution amendée de 2008, le Président de la République est Président du Conseil supérieur de la Magistrature.

Dans un contexte marqué par une controverse liée à l'élection présidentielle d'Avril 2014, tout se résume à l'art du possible. Est-il parvenu à dégager une direction visionnaire d'un Parti continuateur des objectifs inachevés du message du 1er Novembre 54?

Le Parti FLN est-il sorti renforcer pour entamer sa cohésion dans la perspective de se préparer à gouverner par lui-même sans être l'habit de légitimation d'un Exécutif qui gouverne en son nom ? Depuis l'arrivée au sommet de l'Etat du Président Bouteflika, le Parti FLN a bénéficié de son soutien et tous ceux qui ont géré son appareil, l'ont été que par la bénédiction et la confiance de ce dernier en tant qu'officier de l'ALN/FLN et Président du Parti. Selon l'article 34 des statuts du Parti.

Après cinquante d'indépendance la génération de Novembre doit-elle remettre le flambeau en ce 59ème anniversaire de la Révolution armée ? Le futur proche se projette dans ces conditions pour permettre d'engager la continuité de l'œuvre entamée par les aînés dans le concert des Nations. Le Parti FLN doit affiner son programme pour séduire les larges couches de la population dans toutes les batailles électorales et asseoir son audience. Il ne peut le faire qu'à la condition d'avoir entamé sa mue c'est-à-dire comprendre les mutations systémiques de ce siècle.

Les étapes menant au changement systémique devant mettre Le Parti FLN dans la perspective du renouveau démocratique. Il est une preuve de confiance en soi. L'esprit finit toujours par vaincre la médiocrité sans quoi l'histoire des hommes aura perdu tout son sens.

Nous vivons un siècle où les utopies se détruisent d'elles mêmes. La Révolution est dans le changement du système sans nihilisme et sans changement brusque. Le GMO et sa continuité dans ce que nous vivons du « Printemps arabe » doit nous mettre en veille permanente. Loin de tout désespoir et de résignation, l'intelligence nationale doit triompher des anachronismes politiques qui poussent à la dérision.

Tout ce qui fait la dignité de l'homme repose sur la détermination d'opérer une rupture systémique. Nous sommes au voisinage du droit dans ce sentiment d'accepter le fait accompli. Mais « Cette même idée du droit au-delà d'une frontière à partir de laquelle un autre droit lui fait face et le limite. Jusque-là celui qui se révolte se tait au moins, abandonné à ce désespoir où une condition même si on la juge injuste, est acceptée ». Telle a été la démarche des deux réunions du CC du Parti FLN des 29 Août et 16 Novembre 2013.

En fait nous reproduisons les mêmes méthodes d'irruption qui datent depuis bien longtemps. Mon ami Ahmed Cheniki le dit clairement « Le mal est antérieur à 1962, dans un pays où les coups d'Etat se succèdent depuis le putsch contre le GPRA, en passant par l'arrêt de la Constituante, Juin 1965 jusqu'à ce jour ». Qui des différents responsables qui ont dirigé l'appareil du Parti n'ont pas été intronisés ? Chérif Belkacem, Kaid Ahmed, Med Chérif Messadia, Yahiaoui Med Salah, Med Chérif Messadia, Abdelhamid Mehri, Boualam Benhamouda, Ali Benflis, Abdellaziz Belkhadem, Ammar Saadani.

Si Med Khider et puis Ahmed Benbella ont géré le FLN en tant que Parti, le 19 Juin 1965 a remis au goût la dénomination d'appareil du FLN, laissant le Conseil de la Révolution détenteur de tous les pouvoirs, donnant procuration à un responsable de l'appareil de gérer les rouages et les structures du Parti.

Depuis cette période, malgré la tenue de son 4ème Congrès le Parti FLN a continué d'être le cadre de légitimation du pouvoir en place. Seule fois où le FLN à la faveur des événements d'Octobre 1988 lorsque feu Si Abdelhamid Mehri devenant SG, a émis le vœu de ne plus légitimer en termes politiques les régimes en place et ne plus être comptable de la gestion dont il n'est pas décideur. Mais cette position lui a valu un coup d'Etat scientifique dont les sous traitant sont restés en place à ce jour.

En fait, la notion de redressement ou de sursaut, a commencé au moment où le Président Boumediene n'admettait pas au nom du Conseil de la Révolution qu'on parle de coup d'Etat. Tous les pouvoirs qui ont succédé après le 4ème Congrès du Parti FLN, s'exerçaient dans les sérails ou plus précisément dans la proximité immédiate du Président.

Ceux-là détiennent les véritables leviers de commande, assez souvent dans l'opacité d'un cabinet investi de larges prérogatives parfois sans se référer au Président constitutionnellement élu. D'où la dérive institutionnelle d'une mal gouvernance s'ouvrant à toutes les déviances.

Tous les SG du Parti FLN ne sont en fait que les sous-traitant d'une décision prise au sommet du pouvoir caractérisée à chaque étape par un compromis des forces politiques en présence. Vouloir les attenter c'est faire preuve d'analphabétisme politique car ce sont les maillons les plus faibles. Il y a lieu de se rappeler l'histoire des institutions de la République pour en prendre acte.

(*) Membre du Comité Central du Parti FLN