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TLEMCEN: Plaidoyer pour une stratégie de développement urbain

par Allal Bekkaï

Une table ronde autour du devenir de la ville de Tlemcen a réuni jeudi dernier, au siège de l'ASPEWIT, des membres de la société civile à l'initiative de ladite association environnementale présidée par M. Morsli Bouayed. Dans son exposé présenté sur data show, M. Farouk Tebbal, ancien ministre de l'Habitat, présentera «Les stratégies de développement en Méditerranée et en Algérie». Fer de lance, les villes reflètent des contradictions, des fragilités sociales, environnementales, d'où des déséquilibres importants sur les plans social (emploi, habitat), environnemental et institutionnel, constate-t-il. Et de mettre l'accent sur l'impact de la (bonne) gouvernance dans la gestion de la ville comme centre de développement économique et social. «Nous avons le sentiment qu'il y a quelque chose qu'on doit dire sur la ville, qu'est-ce qu'on peut faire, et moi-même qui ai participé notamment à cette action qui est menée maintenant depuis une vingtaine d'années, à savoir revoir le développement de la ville autrement que par les sacrés instruments d'urbanisme, les PDAU, les POS, qui sont intéressants, mais qui doivent être inscrits dans un environnement plus large, à savoir la ville, comme levier de développement économique, la ville qui trouverait sa place pour toutes les populations, la ville inclusive, c'est-à-dire qui n'exclut pas ceux qui sont pauvres ou ceux qui sont plus jeunes?, une ville aussi qui est agréable à vivre, lorsqu'elle est dans un environnement qui n'est pas pollué, une ville qui est belle où les gens ont la décence quand ils ont une maison de la peindre, une ville qui est un facteur de progrès et non pas un facteur de décadence, de régression, une ville qui est amenée à exploser, et nous savons ce qui s'est passé récemment, y compris dans des pays qui ont des croissances très élevées comme le Brésil ou comme la Turquie; quand les gouvernants sont pris par l'ivresse du succès et qui n'écoutent pas leur peuple, leur population, et quand il s'agit de la ville, quand les citoyens ne sont pas écoutés, c'est là que nous allons avoir des problèmes. Mon credo, c'est que la ville appartient à ceux qui y vivent et qu'ils ont donné le mandat à ceux qu'ils ont élus mais qui doivent les écouter? La ville n'appartient pas à des décideurs qui sont loin de la réalité, dans le boulevard Didouche Mourad (siège du ministère de l'Habitat, ndlr)», nous dira M. Tebbal. Pour sa part, M. Abdelkader Benosman, architecte, urbaniste restaurateur, fera une approche de la ville comme phénomène spatial, social et culturel. «Sur un périmètre de 100 ha seulement, Tlemcen a pu créer son âme par ses monuments, son artisanat, sa production intellectuelle», fera-t-il remarquer. Alors que, selon lui, 15.000 ha représentant la superficie de Paris sont exploités en 30 ans. «Si on veut comprendre le processus de développement, on doit certainement commencer par l'histoire de l'occupation de l'urbanisme de Tlemcen, expliquer un petit peu ce processus de développement qui est en train de s'accélérer d'une manière absolument incroyable au point où ce qui se passe dans ce pays est tout à fait exceptionnel par l'ampleur des développements que l'on n'a jamais vus sur le plan historique, et beaucoup de villes algériennes sont dans ce cas?», nous expliquera M. Benosman. Dans son intervention, M. Ali Oussedik, directeur régional de l'ANAT, fera deux propositions techniques, à savoir un plan vert pour sauver le croissant fertile avec la création d'un parc urbain, et un plan lumière à travers la généralisation de l'éclairage (mise en relief du patrimoine monumental, animation nocturne de la ville). «Comme problèmes environnementaux, Il y a la gestion des déchets, des espaces verts qui sont squattés, une urbanisation qui n'est pas maîtrisée, qui n'est pas contrôlée, mais on a utilisé d'anciennes techniques, d'autres méthodes. Maintenant, il me semble que la méthode qui peut donner des résultats, c'est la concertation, une meilleure gouvernance et quand on parle en termes de concertation, je crois qu'il faut mettre les acteurs autour d'une table, tous les acteurs qui agissent sur un territoire, notamment les élus, les associations, les agents économiques qu'ils soient privés ou publics, et essayer de développer des projets de territoire qui ont fait l'objet d'une large concertation et une fois qu'ils sont acceptés, moi je crois qu'ils ont beaucoup plus de chance d'être mis en œuvre et d'être réalisés, c'est aussi une prise de conscience citoyenne très élevée de dire que les citoyens de Tlemcen s'inquiètent pour le devenir de leur ville, ils portent aussi un projet optimiste pour essayer de rééquilibrer, réorganiser, donner une véritable trajectoire de développement durable pour la ville de Tlemcen?», nous fera savoir M. Oussedik. Le débat, ouvert au reste de l'assistance, portera sur la gouvernance, l'absence de stratégie de développement, la pollution, les espaces verts, l'éducation esthétique à l'école, le jumelage, la jeunesse, la visite de Arnold Schwarzenegger? A la fin, et à l'instar de ce qui se fait à Sousse, Tanger, en Espagne, M. Tebbal proposera de former un groupe de travail qui aura à formuler des réflexions et soumettre des recommandations aux autorités locales compétentes.