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Le 1er ministre aujourd'hui à Annaba et à Constantine

par Ghania Oukazi

Abdelmalek Sellal ne se réunira pas aujourd'hui avec les représentants de la société civile comme ce fut le cas à Ouargla et Saïda.

Le 1er ministre se rend aujourd'hui, jeudi, à Constantine et à Annaba, deux wilayas qu'il connaît bien particulièrement, Constantine pour y avoir passé la moitié de sa vie. Ce qui lui donne une longueur d'avance sur les autres responsables et lui permet de deviner, à défaut de constater l'ampleur des problèmes qui plombent le quotidien des citoyens. Le fait de ne pas se réunir avec les représentants de la société civile comme il l'avait fait dans ses précédentes visites à l'intérieur du pays, n'a rien à voir avec tout cela.

«C'est juste une question de temps, faire deux wilayas en même temps en une seule journée, ce n'est pas évident de tenir deux réunions qui prennent beaucoup de temps alors que le programme du 1er ministre est chargé», nous dit une source proche du 1er ministère. Sellal devra visiter «six points à Constantine et quatre autres à Annaba». Il inspectera les travaux de l'autoroute Est-Ouest, un viaduc, des constructions de logements, des hôtels (le Marriott à Constantine et le Sheraton à Annaba), la nouvelle ville de Constantine, et autres viaducs et transferts routiers et d'eau à contrôler.

Quand il s'agit d'un déplacement officiel, rien n'est cependant définitif dans les bribes d'informations que nous tentons d'arracher au niveau des institutions de l'Etat. Les réponses aux questions pourtant classiques sont très vagues, incomplètes ou parfois même impossibles à avoir. Le prétexte évoqué pour justifier cette fermeture et ce refus de communiquer des centres officiels est vite trouvé. «On ne peut rien dire, c'est pour des raisons de sécurité», répond-on sans complexe. Pourtant, à chaque fois qu'un officiel se déplace dans une région, c'est le branle-bas de combat au niveau des collectivités locales. Les réflexes absurdes ne changent pas. Les rues sont alors nettoyées, les murs repeints maladroitement, les plantes arrosées et les troupes folkloriques convoquées. Une télévision maghrébine a d'ailleurs bien «singé» un tel décor. Ses guignols avaient déclaré que si Sellal avait retardé sa visite à ces deux wilayas une première fois c'est parce qu'il est allergique à l'odeur de la peinture fraîche et les arbres fraîchement taillés. C'est ingénieux comme explication. Il y a aussi cette concentration des représentants locaux autour du «visiteur», et dont la présence ne sert pratiquement à rien. C'est dire que le pays n'a pas évolué d'un iota et le ridicule ne tue pas quand il s'agit de faire rencontrer les populations avec un de leurs «chefs». Populations dont les doléances restent en définitif sans suite, tant les responsables se tiennent loin de tout cela.

Pourtant, dès sa prise de fonction de 1er ministre, Abdelmalek Sellal a mis en avant la réhabilitation du service et de l'administration publics pour faciliter le quotidien des citoyens. Il a choisi, pour cela, de vérifier par lui-même la mise en œuvre de cette feuille de route. Au bout de deux wilayas, Ouargla et Saïda, rompu au travail de proximité qu'il est, il a dû constater que les résultats ne sont pas probants. Il est vrai que le cortège d'un 1er ministre ne passe pas par les routes et rues défoncées, les quartiers-poubelles tant les détritus jonchent les sols, encore moins qu'on le fasse manger dans les fast-foods pourris de saleté ou près des épiciers et marchands de légumes affichant des prix dépassant l'entendement. Tout ce manquement à l'engagement de l'Etat, Sellal ne le verra pas. D'ailleurs, les robinets qu'il a eu à gérer pendant longtemps restent dans de nombreuses régions à sec, ceci parce que comme nous le disent des citoyens «le planton qui surveillent les systèmes de distribution de l'eau potable a toute latitude de les fermer et des les ouvrir quand il veut».

«Quand un gouvernement ne demande pas de comptes à ses gestionnaires et n'applique pas un régime de sanctions approprié à toute faute commise, c'est que l'Etat n'est pas encore construit», nous explique un sociologue. «Le 1er ministre devra commencer par appliquer sa feuille de route à ses ministres et aux institutions qui sont à leur charge. Le respect du service public et sa performance doivent s'imposer en premier à ceux qui les gèrent», estime notre interlocuteur. Le reste, tout le reste, n'est que verbiage et populisme insolent.