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Nazim Boudeffa, neoFreelance, d'Hussein-Dey à Rennes : «Chercher le travail là où il est, même au bout du monde !»

par Abdelkader Zahar

En situation de crise économique, ou dans des conditions d'éloignement des centres urbains où existent plus d'opportunités d'emplois, Internet est une formidable opportunité pour trouver un travail à distance. Il suffit de proposer ses compétences via un marché du freelance sur le Net. Nazim Boudeffa, master en informatique obtenu en France après un bac algérien, nous parle de son expérience et de son projet de plateforme Web «neoFreelance».

Quel est le concept de neofreelance.com ?

Nazim Boudeffa : Au départ l'idée était de développer le concept de coworking dans la ville où je réside car moi même j'y suis demandeur d'emploi. Le concept de coworking est une solution sociale et solidaire qui réponds plus vite à la demande de travail en période de crise économique, d'où le lancement de ce projet, le concept de neofreelance.com est basé sur des sites déjà existants comme freelancer.com, codeur.com ou cyberworkers.com et bien d'autres mais payants et trop chers pour un petit budget ou un demandeur d'emploi sans ressources.

Qui peut lancer un projet sur neofreelance.com ?

Une entreprise ou un particulier a un besoin ponctuel, il publie son projet sur le site en le décrivant et en ajoutant les compétences qu'il recherche. Il publie donc un appel d'offres. Les prestataires (les télétravailleurs ou les freelance qui vont réaliser un travail pour des entreprises) inscrits sur le site répondent en faisant des offres. La meilleure offre sera choisie par le porteur de projet et ce sera à lui de la valider et de payer le prestataire. Il reste que ce choix se fait généralement surtout sur le coût. Mais nous travaillons à innover dans la manière dont les prestataires font leurs offres.

Pour le moment c'est gratuit. Mais quel est le modèle économique derrière tout cela pour que ça continue à fonctionner ?

La gratuité du site et l'ouverture du code est un choix de transparence de ma part vis à vis des utilisateurs du site. Je propose donc que chacun puisse contribuer à sa manière à la vie du site, un développeur pourrait apporter son avis et ses compétences pour améliorer le site, de plus nous réfléchissons à une manière de répondre au mieux aux attentes de chacun. Dans ce sens, il faut donc nous contacter et rejoindre le réseau social pour créer un groupe d'utilisateurs et avancer dans le développement du site. Le modèle économique se fera à travers ces contributions. Mais il est certain qu'il faut réussir à dégager un budget pour le développement du site et pour sa vie et son évolution par la suite.

Est-ce que neofreelance.com est un moyen d'encourager le télétravail ?

Vivant dans une région où il y a peu de travail dans mon domaine, il fallait trouver une solution pour avoir une activité économique, d'où l'idée de créer un site de télétravail. Ce sont les politiques de travail dans les zones isolées qui devraient encourager ce nouveau mode de travail. Neofreelance ne fait qu'encourager la sortie de l'isolement économique de certaines zones géographiques. Mais quel serait mon bonheur de voir un prestataire à Alger répondre à un appel d'offre en Amérique ! Ou qu'une petite entreprise Tunisienne finalise un projet en France.

Ce site est-il destiné aux Algériens ?

Le site est destiné aux francophones du monde entier dans le sens où il faut choisir une langue pour une meilleure communication. Comme en Algérie on parle couramment le français le choix s'est imposé tout seul.

Pourquoi pensez-vous que le télétravail est si peu développé en Algérie ?

Je pense surtout que les zones isolées ont leur potentiel de travail comme dans les grandes villes, mais on doit d'abord développer les TICs pour développer le télétravail. Mais pour que tout cela fonctionne, on doit pouvoir fournir les services de bases comme un bon système de santé et un bon service de sécurité dans ces zones isolés. On pourra donc garantir une qualité de vie pour travail de qualité et arriver donc à une égalité des chances dans le travail au niveau national et international. C'est assez agréable de vivre dans une zone non polluée proche de la nature et pouvoir travailler pour des entreprises dans des grandes villes. Je pense aussi qu'il n'y a pas d'offres en télétravail pour toutes les bourses et qu'il faut créer un service de mise en relation simple et intuitif pour réponde au mieux aux attentes de ses utilisateurs.

Quels sont les projets déjà lancés dans le cadre de neofreelance.com ?

Le premier projet lancé sur neofreelance est de développer neofreelance (rires) et comme le site est en cours de développement nous attendons de voir des besoins plus spécifiques des internautes intéressés afin de répondre au mieux au marché actuel. Notre objectif est de faire un site au service de ses utilisateurs et non pas un nouveau site clé en main.

En attendant que les intéressés viennent vers le site. N'avez-vous pas tenté d'aller vers eux à travers les réseaux sociaux ? Des étudiants désirant tirer profit de leurs compétences peuvent-ils répondre à des appels d'offres ?

Il est vrai qu'il y a un travail en amont assez complexe qui est de pouvoir créer un réseau de prestataires, créer des groupes de travail et définir les besoins pour répondre au mieux aux attentes de chacun des utilisateurs du site. De plus, il faut trouver les porteurs de projets et assez de prestataires pour avoir un choix plus large de propositions. Pour cela, nous avons comme tout nouveau concept créé des pages sur les réseaux sociaux, afin de nous faire connaître. Une «community manager» s'occupe de promouvoir et de développer le réseau neoFreelance, mais ceci a un coût, tout comme le développement et la maintenance du site. Ce sont des questions que je ne me pose pas en ce moment. J'essaye surtout de finir ce projet. Je pense que tout viendra par la suite. Dès que les internautes seront convaincu qu'il y a un réel intérêt dans ce site, il trouvera sont modèle économique pour satisfaire tous ses utilisateurs. Ainsi, moi même, je me positionne comme tout débutant. J'invite les étudiants et jeunes entrepreneurs à rejoindre notre réseau de travailleurs et de définir leurs besoins. Concernant la prestation en elle même, ce qui ne tardera pas à venir sur le site neoFreelance, j'ai vu passer une discussion sur un site du même genre disant que certains prestataires n'hésitaient pas à casser les prix vue que le choix se fait surtout sur un critère budgétaire mais qu'au final la partie maitrise d'ouvrage n'était pas satisfaite du travail accompli. Un sacré dilemme. C'est à ce moment qu'il faut innover dans la manière dont se fait le choix des prestataires. Mais la question est la même que dans la recherche traditionnelle d'un emploi. Que valons-nous sur le marché du travail ? Ici le marché c'est neoFreelance, une place de marché pour les freelances.

Dans quelle mesure des entreprises algériennes peuvent-elles se lancer dans le télétravail ? Est-ce rentable et pratique ? Et pour quels métiers ?

Il faut aller chercher le travail là où il est, même au bout du monde. Une plateforme francophone gratuite qui permet de trouver des projets concrets en télétravail n'est pas un gros investissement pour quelqu'un qui se lance si ce n'est le tarif d'une connexion Internet. Pour une entreprise déjà présente sur le marché, ceci pourrait représenter un certain avantage d'être connu sur une place de marché différente. Et si le réseau se développe dans ce sens, on pourra procéder à la prospection collective et au coworking sur différents réseaux Internet. Ce sont là de réelles opportunités de développer une activité dans un contexte de crise économique. Les métiers du télétravail sont nombreux, pour ne citer que le développement de sites Web par des CMS, l'écriture d'articles et de blogs, la comptabilité et j'en passe. Pourvu que les moyens de communication adéquats existent et surtout un bon environnement de travail, là où tout les services de base et de proximités sont disponibles, et surtout là où l'on peut se concentrer sur ce que l'on fait et pas sur ce qui pourrait nous arriver.

Peut-on inclure la formation à distance dans les métiers du télétravail ?

Oui, ces modes de fonctionnement font partie intégrante de l'avenir. Les visioconférences, par exemple, permettent une réelle présence et un gain important de temps. Et comme pour neoFreelance, les concepts de services à distance se développent de plus en plus pour un prospect plus large et une plus grande ouverture sur le monde.

Qui est Nazim Boudeffa ?

Pour faire court, j'ai 37 ans, je suis un enfant de Hussein Dey (Alger). J'ai obtenu mon bac Sciences en 1993, au lycée Bouattoura. Après une année passée à l'Ecole nationale polytechnique (ENP), en tronc commun technologie, je suis parti rejoindre ma famille à Rennes où je m'étais inscrit à la Fac de Sciences. Après un master en informatique, système et réseaux, j'ai occupé plusieurs postes, y compris chez des fournisseurs d'accès Internet. Je viens de terminer un CDD. Je vis de mes économies et de petits boulots (notamment de dépannages informatiques). D'où l'idée m'est venue de lancer cette plateforme «neoFreelance» pour trouver du travail à distance et aider d'autres à se placer.