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LES LEÇONS DE L’IFO ALLEMAND

par Akram Belkaid, Paris

L’examen de la conjoncture européenne passe souvent par une analyse de l’état de santé de l’économie allemande. Quoi de plus normal quand on sait que cette dernière contribue au quart de la création de richesses en Europe ? Dynamique des exportations, réduction des déficits, stabilité des grands équilibres macro-économiques, l’Allemagne ne cesse d’être citée en exemple par des thuriféraires de l’austérité qui, au passage, oublient trop souvent les difficultés sociales auxquelles sont exposés un grand nombre d’Allemands. Mais là n’est pas le propos.

 UN INDICATEUR INFLUENT

Pour suivre de manière régulière l’évolution de l’économie allemande, on peut se baser sur plusieurs statistiques (croissance du produit intérieur brut, inflation, solde commercial, taux de chômage) mais on peut aussi garder un œil sur d’autres indicateurs dont le célèbre indice composite Ifo. Cette donnée résulte d’une enquête mensuelle rendue publique le vendredi de la troisième semaine de chaque mois où l’on retrouve le sentiment de 700 chefs d’entreprises sur la situation du moment de l’économie allemande ainsi que leurs projections à six mois.
Publié par l’Institut fûr Wirtschaftforschung (IFO, Institut de recherche en économie), « l’Ifo » est toujours attendu par les marchés financiers européens. Ces derniers y trouvent à la fois des informations sur l’évolution des économies allemande et européennes mais aussi sur l’orientation probable de l’euro vis-à-vis des autres grandes devises dont le dollar, la livre sterling et le franc suisse. Bien entendu, d’autres facteurs ont aussi leur impact dans le fonctionnement des marchés boursiers et de change mais l’Ifo fait partie des indicateurs les plus influents.
Signe des temps, ce véritable indice de confiance des entrepreneurs allemands a enregistré une nouvelle baisse - la sixième consécutive - au mois d’octobre. Exprimé en points, il valait 100,0 points (101,4 points en septembre), soit un plus bas depuis deux ans et, surtout, le seuil minimum en dessous duquel on considère que sa valeur est négative. Inutile donc de dire que la publication de l’Ifo de novembre prochain est très attendue car une nouvelle baisse prouvera que les acteurs économiques allemands sont pessimistes et que, dans l’ensemble, c’est toute l’Europe qui s’enlise dans la morosité.
D’ailleurs, plusieurs experts s’attendent déjà à ce que l’économie allemande connaisse une importante contraction au cours du dernier trimestre de l’année 2012. Si cela se vérifie, il faut craindre une aggravation des difficultés financières de nombreux autres pays européens confrontés à la crise de l’endettement. On pense notamment à l’Espagne mais aussi à la France. En effet, cette dernière, dont l’économie est quasiment en panne, est très dépendante de l’évolution de l’économie allemande. Que cette dernière tangue et les marchés, persuadés que l’économie française va demeurer en récession, chercheront à tester la solidité financière de la France via notamment une augmentation des taux d’intérêt sur les emprunts. Rendez-vous est donc pris pour le vendredi 23 novembre.

DE L’INTERET D’UN INDICATEUR MAGHREBIN DE CONJONCTURE
 
Bien entendu, les indicateurs tels que l’Ifo ne sont pas infaillibles pas plus qu’ils ne se suffisent à eux-mêmes. Pour autant, leur existence permet de savoir si un environnement économique est moderne ou non. Dans le cas de l’Algérie, voire du Maghreb, il serait donc utile de disposer d’un tel outil renseignant sur le moral et les anticipations des chefs d’entreprises notamment privées. Cela pourrait même pousser les responsables politiques à prêter plus d’attention aux attentes des entrepreneurs. A condition que ces derniers jouent le jeu et acceptent de se plier aux exigences d’une enquête mensuelle de conjoncture.