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Le secteur bancaire algérien, dernier partout !

par Yazid Taleb

La comparaison par l'expert Najy Benhassine des performances du secteur financier algérien avec ceux de pays comparables a jeté un froid dans la salle lors de la journée d'études organisée par le FCE sur la relation Banque-Entreprise. L'Algérie est dernière sur tous les indicateurs retenus. Première sur les indicateurs renversés, comme ceux de la concentration des actifs bancaires ou de la part des mauvaises créances. Choc.

Les participants à la journée d'études Banque Entreprise organisée par le Forum des chefs d'entreprise (FCE), la semaine dernière à l'hôtel Aurassi, savaient que le secteur bancaire et financier algérien ne brille pas par ses performances. Ils n'imaginaient peut être pas toujours que les retards accumulés étaient aussi importants et cela pendant que l'Algérie poursuit sa réforme financière à son tranquille rythme de «croisière». La méthode utilisée par Najy Benhassine, cadre algérien à la Banque Mondiale à Washington, consiste d'abord à retenir un panel d'une douzaine de pays. Notons qu'il ne s'agit pas forcement des économies les plus performantes de la planète. On y trouve plutôt des pays «voisins ou comparables» à l'Algérie comme la Tunisie, le Maroc, l'Egypte, la Turquie et des pays pétroliers tels que les pays du golfe ou le Mexique. L'Amérique du sud est également représentée par le Brésil et le Chili. L'Asie du sud ? est fourni un fort contingent avec la Chine bien sûr mais également la Malaisie, l'indonésie ou encore le Vietnam et la Thailande. La Roumanie, enfin est le seul pays européen figurant dans le panel.

L'ALGERIE, DERNIERE POUR L'ACCES AU CREDIT?

Au chapitre de l'accès au crédit, l'Algérie arrive bon dernier quelque soit l'indicateur retenu .Ce qui frappe, c'est surtout l'écart avec les autres pays ; une agence bancaire pour 25 000 habitants en Algérie quand la Tunisie en compte une pour 8 000 habitants et la Roumanie une pour 3000 habitants. Le crédit au particulier parent pauvre ? Dix emprunteurs aux banques commerciales pour mille habitants en Algérie. La Tunisie se classe avant dernière avec 120 emprunteurs et la Turquie est première avec 700 emprunteurs .C'est surtout la part du secteur privé dans le crédit bancaire qui a retenu l'attention à l'occasion de la Journée du FCE .Pas de surprise, l'Algérie est encore dernière de la classe. Là aussi l'écart est énorme avec les autres pays : 15% du PIB dans le cas de l'Algérie ,30% pour l'Indonésie, 70% pour le Maroc, 80% en Tunisie et?. 120% pour la Chine.

?ET CHAMPIONNE POUR LA PART DU SECTEUR PUBLIC

Ce n'est pas forcement une bonne nouvelle, le seul domaine dans lequel l'Algérie se classe première concerne la part de l'Etat dans le secteur financier. Le pays est champion pour la proportion des actifs bancaires détenus par l'Etat. Avec 90% des actifs, il devance de très loin le Brésil, deuxième avec 40%, La Turquie 30% et le Maroc 25%. Dans le sillage de cette «performance» l'Algérie est également, de façon logique, numéro un de la concentration des actifs bancaires grâce à ses six mastodontes publiques, numéro un également des crédits aux entreprises publiques et championne des crédits «en souffrances». 25% des crédits en Algérie contre 8% au Maroc et 5% en Turquie ou en Chine. Ajoutons que si les banques étrangères sont nombreuses en Algérie leur niveau d'activité reste faible. Elles détiennent moins de 10% des actifs, ce qui vaut, une nouvelle fois, la dernière place au sein du panel.

UN EMBRYON DE MARCHE FINANCIER

On s'en doutait un peu, le chapitre du marché financier est celui ou la comparaison se révèle la plus cruelle pour notre pays. Le bilan des activités de la Bourse d'Alger est squelettique : Trois sociétés cotées et l'équivalent de 180 millions de dollars de capitalisation pour un volume de transaction annuel de? 2 millions de dollars soit : «le chiffre d'affaire d'une agence immobilière qui aurait vendu 2 terrains bien situés» commentait la semaine dernière le PDG de Humilis M. Lyes Kerrar. La capitalisation boursière algérienne représente exactement 1/1000 du PIB. L'écart est considérable avec les autres pays : déjà 15% du PIB au Vietnam, 20% du PIB en Tunisie et en Egypte, et 60% du PIB au Maroc. A l'hotel Aurassi, lundi dernier, le coordinateur du projet de relance de la Bourse d'Alger annonçait un programme ambitieux. Il devrait selon ses initiateurs permettre dans un délai de 5 à 8 ans de faire passer le nombre de sociétés cotées de 3 à 38 et à la capitalisation boursière de grimper à 10 milliards de dollars, ce qui ne représentera encore que moins de 5 % du PIB.

On pourrait multiplier les indicateurs. Tous sont convergents. La conclusion de Najy Benhassine, qui est incidemment l'un des principaux animateurs de l'initiative NABNI, a l'avantage de la clarté : «Il faut faire ce qu'il ya à faire et que tous les autres pays ont fait avant nous». Suit une liste de chantiers connus, souvent entamés, quelquefois bloqués par «dogmatisme, Mais uniformément lent dans leur mise en œuvre.