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Massacres d'octobre 61 : faut-il s'arrêter à leur seule reconnaissance ?

par Kharroubi Habib

Dans un communiqué rendu public par l'Élysée ce mercredi passé, jour anniversaire des massacres d'Algériens dans la capitale française le 17 octobre 1961, le Président François Hollande a reconnu les faits, au nom de la République française et rendu hommage à la mémoire des victimes. Ce geste du successeur de Nicolas Sarkozy a été accueilli avec joie et émotion par la foule d'Algériens et de Français rassemblée au même moment autour du maire de Paris et d'autres personnalités, en une cérémonie du souvenir et de commémoration du tragique évènement.

A Alger le premier ministre Abdelmalek Sellal a salué dans le geste du Président Hollande la manifestation « des bonnes intentions » de la France pour tourner la page des massacres d'octobre 1961. La reconnaissance officielle de la responsabilité de l'état français dans la sanglante répression de la manifestation pacifique des algériens en octobre 1961, n'étonne pas de la part d'Hollande, qui candidat du parti socialiste à l'élection présidentielle avait, l'année dernière, fait le geste d'aller jeter des roses dans la seine en guise d'hommage aux victimes de cette répression et a déclaré s'engager à reconnaître officiellement les massacres en cas de son accession à l'Elysée.

Il faut donc reconnaître à Hollande d'avoir tenu sa promesse. Mais pour ceux qui, en France et en Algérie, attendent plus de la France sur la question mémorielle, son geste en appelle d'autres, pour en finir avec les mensonges officiels qui légitiment au nom des « bienfaits » de la colonisation la défense de cette période, par les droites politiques et les nostalgiques de l'Algérie française.

La sincérité d'Hollande à promouvoir une réconciliation entre l'Algérie et la France sur les questions mémorielles n'est pas en doute et notre ambassadeur à Paris, Missoum Sbih, a eu raison de la souligner en faisant valoir que les signes de sa part en la matière depuis son élection « sont nombreux, ils sont multiples, ils sont très encourageants ». le communiqué de l'Elysée de mercredi a incontestablement réparé une injustice historique, mais son style, sa concision indiquent à l'évidence que Hollande a tenu à ménager la France de l'opinion publique Française opposée à toute forme de reconnaissance de crimes commis au nom de la République durant la colonisation, c'est pourquoi il est apparu insuffisant a beaucoup. Nous voulons croire que le Président Français a limité provisoirement la reconnaissance de la responsabilité de l'état français aux seuls massacres d'octobre 1961, dans l'attente que ce geste ait pour effet d'isoler dans cette opinion les tenants irréductibles de «l'innocence » de l'état français de tout crime colonial. Déterminé à « faire bouger les lignes » dans le débat mémorial qui empoisonne les relations algéro-française et empêche Alger et Paris d'établir des rapports « décomplexés », Hollande a, c'est, nous semble-t-il dans sa nature , opté pour une démarche mesurée, celle des « petits pas » qui ne soulèvent pas de tempête, mais se suivent et s'amalgament pour mener à l'objectif fixé. Aussi faut-il s'attendre que le « petit pas » qu'il fera après celui de mercredi dernier aura lieu lors de sa visite d'état en Algérie en décembre et qui élargira inéluctablement la reconnaissance par la France à l'ensemble des crimes commis en son nom durant la période coloniale.