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Commerce : la France tente de résister à l'avancée du bulldozer chinois en Algérie

par Yazid Taleb

Les résultats du commerce extérieur du premier semestre avaient suscité quelques frayeurs chez les Français, mais selon les chiffres du mois d'août, la France conserverait en 2012 son statut de premier fournisseur de l'Algérie devant la Chine. Une affaire prise au sérieux par les autorités françaises. Le sujet pourrait être en bonne place du menu de la visite prévue en décembre du Président français.

Dans le domaine du commerce extérieur algérien, si la diversification des exportations n'est pas au rendez vous, celle des fournisseurs en revanche se précise. Au premier semestre 2012 l'année en cours la part des pays de l'Union européenne dans nos approvisionnements est passée pour la première fois sous la barre des 50%. Par rapport au 1er semestre 2011, les importations en provenance de l'Union Européenne (UE) ont enregistré une baisse de 10,5%, passant de 13 milliards de dollars à 11,7 milliards. L'ouverture du commerce extérieur algérien profite principalement à des partenaires commerciaux extra européens. Illustration de cette tendance de fond : la place de la Chine parmi nos fournisseurs qui talonne désormais la France, toujours classée au premier rang (3 milliards de dollars pour la France contre 2,8 pour la Chine) mais sans doute plus pour très longtemps. Les derniers chiffres publiés par les douanes algériennes pourraient cependant mettre du baume au cœur des autorités françaises. Au mois d'aout dernier, sur un marché algérien où les importations sont globalement en baisse de près de 12% en un an, les entreprises françaises résistent mieux que leurs principaux concurrents. Les importations en provenance de Chine ont baissé de plus de 22% alors que celles qui viennent de France n'ont reculé que de 12%. Cela permet à la France de maintenir sa place de premier fournisseur de l'Algérie avec 12,5% de part de marché contre 11,5% à la Chine.

DES PARTS DE MARCHE EN BAISSE

La menace représentée par la concurrence chinoise est prise très au sérieux par Mme Nicole Bricq, ministre française du commerce extérieur. Elle a néanmoins assuré, lors de son récent passage à Alger, que la France reste le premier partenaire de l'Algérie devant la Chine et qu'il faudra attendre la fin de 2012 pour savoir si la Chine lui a ravi cette position. Elle a estimé également, à propos de la concurrence avec le géant chinois, que les entreprises françaises doivent miser sur la qualité même si les coûts n'en seront que plus élevés. «Il faut qu'on soit les meilleurs», a-t-elle dit, avant de reconnaître que les entreprises de son pays ont perdu des parts de marché en Algérie, en citant notamment le secteur de l'agroalimentaire. La ministre française aurait pu également mentionner le secteur de l'automobile. Dans ce domaine, les services de l'ambassade de France en Algérie ont souligné dès 2011 que les constructeurs français ont vu leur part de marché s'effriter et ne profitent que faiblement du boom des importations algériennes de véhicules de tourisme. En 2011, sur un marché automobile algérien globalement en hausse de plus de 29%, les exportations françaises ont augmenté de moins de 5%. Une situation qui donne tout son sens aux dernières déclarations du PDG de Renault, M. Carlos Ghosn qui a assuré que son groupe ne pouvait ignorer le souhait du gouvernement de se doter d'usine pour le marché local et pour l'exportation hors d'Europe «On n'a pas le choix, on le fera. S'il y a une usine en Algérie, nous ferons tout pour qu'elle soit Renault».

DU COMMERCE A L'INVESTISSEMENT? ET A LA FORMATION

La transition d'un partenariat dominé par les relations commerciales à des liens fondés sur l'investissement est un classique des relations algéro-françaises. C'est pour maintenir une position que Nicole Bricq juge «fragile et soumise à une érosion régulière au fil des ans» que les autorités françaises affirment vouloir proposer à l'Algérie : «un partenariat plus dense, plus pérenne et plus équilibré qui passe aussi par l'investissement». La ministre française a rappelé que le stock d'investissements français en Algérie s'élève à près de 2 Mds d'euros et a souligné que «le rythme ne se dément pas». Elle a mis en valeur le fait que la présence française est particulièrement diversifiée et «couvre de nombreux secteurs, que ce soit dans l'agro-alimentaire, l'industrie ou les services. Mais nous pouvons faire plus et mieux. Les entreprises françaises participent pleinement à la production industrielle algérienne. Elles contribuent au développement économique du pays, avec 35 000 emplois directs, près de 100 000 indirects. Il est néanmoins vrai que nous devons faire en sorte que nos grandes filières de biens d'équipement soient plus présentes encore». Outre celui de Renault, elle a noté que «plusieurs grands projets d'investissement d'entreprises françaises sont en cours de discussion, je pense notamment à Lafarge et à Total. Au-delà de ces grands noms, il y a de nombreux projets d'investissement conduits par des entreprises de taille intermédiaire ou des PME». De façon plus nouvelle, Mme Bricq a également relayé un des thèmes favoris des entreprises françaises installées en Algérie : celui de la formation. Tout en relevant que les entreprise françaises installées en Algérie ont de plus en plus recours aux cadres et employés algériens, Mme Brick a préconisé une coopération renforce dans le domaine de la formation professionnelle qui «doit être une dimension importante du partenariat économique entre nos deux pays».