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Des soldats en service commandé

par Al Moutawakil*

Le dernier trimestre de l'année 2010 a vu défiler un nombre impressionnant de personnalités françaises de tout bord. Des hommes politiques de droite comme de gauche, des journalistes ainsi que de « grands amis » de l'Algérie. Une cadence qui n'a été observée ni avant ni après.

Les objets avoués de ces visites consistaient en des rencontres avec les officiels algériens ainsi qu'avec les membres de la société civile, ponctuées de conférences dont les thèmes allaient du partage d'expérience de la gestion des villes à des pérégrinations dans l'histoire, la philosophie et la politique.

Le timing de ces déplacements, effectués juste avant le déclenchement de l'opération américaine « Printemps arabe » visant à reconfigurer l'ensemble du grand moyen-orient, ne laisse planer aucun doute sur la véritable nature de ces visites.

Il s'agissait de prendre le pouls d'une Algérie qu'on voulait faire basculer vers l'inconnu. Il s'agissait aussi d'identifier des membres d'un futur Conseil National de Transition et de tisser des contacts avec des personnes ou des structures pouvant être le relais de cette opération de grande envergure qui n'a pas épargné notre pays.

L'autre enseignement à tirer est que la fin du face à face avec la France n'est pas pour demain. En effet, celle-ci est partie prenante de l'opération «Printemps arabe» et fait preuve d'un excès de zèle et d'un opportunisme indécents au vu de sa responsabilité historique et inaliénable sur les crimes commis en Algérie pendant la colonisation.

En plus d'être dans les bonnes grâces de la seule puissance du moment, les actions coordonnées de la France officielle, lui permettent de régler des comptes avec une Algérie qui ne plie pas l'échine mais surtout qui gène dans la politique dominatrice francafrique qui est toujours d'actualité, certes avec une plus grande discrétion mais d'une redoutable efficacité.

Si la vision et l'analyse de l'ancienne puissance coloniale, concernant l'Algérie, n'étaient pas déformées par les rancœurs du passé, alors elle verrait qu'il est plus avantageux pour la France de bâtir une relation saine et durable avec l'équipe dirigeante actuelle de l'Algérie, issue de la guerre de libération nationale. Car, ce sont des hommes et des femmes qui peuvent dépasser les événements douloureux qu'ils ont vécu dans leurs chairs et regarder paisiblement vers l'avenir. Au contraire de ce qu'a exprimé, sans diplomatie aucune, un ancien chef de la diplomatie française, les rapports seront plus difficiles avec des dirigeants de la génération post-indépendance car ces derniers auront l'appréhension de transgresser les droits et la mémoire de leurs valeureux aïeux.

Il est grand temps de bâtir un partenariat d'exception, intelligent, juste et équitable assumant véritablement le passé, loin de toute tactique périmée ou ruse malveillante et reposant les atouts et les affinités qui nous sont communs.

Les personnalités françaises qui ont visité l'Algérie, ont agit en véritables soldats au service de leur nation. Quant aux «grands amis» de l'Algérie, bien qu'il n'y ait aucun doute sur les sentiments affectueux qu'ils portent à notre pays, les intérêts supérieurs de leur Etat passent avant toute autre considération. Les membres de la nouvelle classe politique algérienne qui émergera après les prochaines élections législatives devraient s'inspirer de cette situation et devenir de vaillants soldats au service de l'Algérie.

*Universitaire