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Un salaire de 180.000 dinars pour les députés ?

par Ghania Oukazi

La réflexion relative à la révision du régime indemnitaire des députés est très avancée. Elle repose sur une nette diminution de leurs avantages financiers et un nouveau système de pointage pour noter leur participation dans les différentes sessions parlementaires.

Lancée mardi par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, cette information n'est pas juste probable comme il l'avait souligné, mais très sûre. Des sources concordantes proches des partis du pouvoir et du Parlement notent qu'un grand nombre de propositions ont été déjà faites à ce sujet et doivent être creusées et finalisées pour être adoptées dans les plus brefs délais. Il est question de réviser fortement à la baisse les salaires des députés pour pouvoir «jouer» sur les indemnités notamment, comme l'a souligné Dahou Ould Kablia, sur celle relative à la présence effective des députés dans l'hémicycle. La proposition, qui semble avoir bénéficié d'un consensus au sein des parties qui planchent sur la question, est de fixer ce salaire à 180.000 dinars au lieu de 300.000 DA actuellement. A partir de ce seuil, il est présenté un nombre d'hypothèses qui permettent aux «décideurs» de jouer sur les indemnités. «Les députés qui sont présents tous les jours de la semaine à l'Assemblée et qui contribuent efficacement aux travaux parlementaires garderont leur salaire complet, c'est-à-dire 300.000 DA», nous dit un responsable au niveau du ministère de l'Intérieur. «Par contre, ceux qui s'absentent percevront les 180.000 DA, mais à chaque fois qu'ils sont présents, une indemnité leur sera octroyée», ajoute-t-il. Ce qui semble être un véritable casse-tête dans cette nouvelle approche est indéniablement la méthode et le moyen qui pourraient permettre aux responsables du Parlement de noter les députés en fonction de leur présence. Pour l'heure, les pupitres du Parlement ne sont équipés que d'un bouton mis sous la main des présidents des deux chambres pour couper le son au député qui aurait dépassé son temps d'intervention. «Pour savoir si les députés sont présents ou non, il faut qu'on trouve une technique de leur enregistrement sans qu'aucun d'eux ne puisse tricher», nous explique notre interlocuteur. C'est à ce niveau que la réflexion pose problème. Enfin, pour l'instant, puisque la «mécanique» de pointage au sein de l'hémicycle n'est pas encore trouvée. L'on pense à installer au niveau de chaque pupitre de député un compteur sur lequel ce dernier appuie à chaque fois qu'il est présent. «Mais il est très possible que même s'il n'est pas présent, il demandera à son collègue d'appuyer pour lui pour l'inscrire présent», affirme notre source qui nous confirme que «ceux qui réfléchissent à la technique idoine peinent à détourner les astuces dont seraient capables les députés pour enregistrer leur présence sans qu'ils soient présents et qu'ils pourront ainsi percevoir leurs indemnités sans trop d'efforts».

Il est clair que d'ici à ce que la nouvelle assemblée soit installée, la solution sera trouvée. Mais le gouvernement s'attend déjà à une diminution de l'empressement de beaucoup de personnes qui veulent absolument figurer sur des listes de candidatures pour la députation. «En principe, l'engouement de ceux qui veulent être candidats diminue une fois les privilèges revus à la baisse», estime le responsable du ministère de l'Intérieur.

A savoir si les candidats qui se disputent les listes apprécieront à leur juste mesure les propos du ministre de l'Intérieur. Pour l'instant, les états-majors des partis politiques bouillonnent pour confectionner des listes dont les noms doivent véritablement capter les électeurs pour des élections qui sont qualifiées de «cruciales» par le pouvoir en place.

 Bien que les jeux semblent être faits, le pouvoir craint sérieusement une forte abstention qui discréditerait le scrutin. Les Etats-Unis ont déjà pris option pour un changement en Algérie sur la base des résultats du vote du 10 mai prochain. Le président de la république a d'ailleurs attiré, à partir d'Arzew, l'attention des Algériens sur «le danger étranger» qui guette le pays au cas où les résultats des législatives ne seraient pas représentatifs de la nouvelle configuration du paysage politique et répondraient ainsi aux exigences de la société. Mais, en vérité, les commentaires, voire les avertissements des Américains ne semblent en aucun cas déranger ou inquiéter les décideurs. Bouteflika, s'il en a fait une option pour une consommation interne, il reste inébranlable à cet effet. C'est du moins ce qui nous a été dit du haut d'El Mouradia. Le chef de l'Etat aurait ainsi, selon des sources crédibles, pris ses devants en lançant à la secrétaire d'Etat américaine que «l'Algérie n'est ni la Tunisie ni le Maroc, elle est jalouse, comme le savez, de sa souveraineté nationale». Bouteflika aurait même été plus loin lorsqu'il avait reçu Hillary Clinton samedi dernier. «Les Etats-Unis n'ont aucun droit de nous donner des leçons ni de juger nos décisions ou nos élections. Nous devons de part et d'autre respecter nos relations bilatérales et faire en sorte de les renforcer d'un commun accord», lui aurait-il dit selon des échos de la présidence de la république.