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LE CYCLE DE DOHA EN PANNE PROLONGEE

par Akram Belkaid, Paris

C’est cette semaine que les 153 pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) se réunissent à Genève pour la huitième réunion ministérielle de cette institution. De cette session, il n’y a pas grand-chose à attendre car il paraît impossible que le cycle de Doha, initié en 2001 dans la capitale qatarie, puisse sortir de son blocage. De fait, dans l’avant-projet de déclaration finale, les pays membres disent d’ores et déjà regretter « profondément que les négociations soient dans l’impasse » et reconnaissent « qu’il est peu probable que tous les éléments du cycle de Doha puissent être conclus simultanément dans un avenir proche ». En clair, la libéralisation totale des échanges n’est pas pour demain, c’est-à-dire 2012, date à laquelle devait être achevé le cycle de Doha.

LES GRIEFS RESTENT LES MEMES

On connaît les raisons d’un tel blocage. D’un côté, les pays industrialisés exigent que les pays émergents ainsi que ceux du Sud ouvrent plus leurs frontières à leurs produits industriels. Ils dénoncent ainsi un protectionnisme qui n’aurait plus lieu d’exister en raison de l’évolution de l’économie mondiale. L’un des cas emblématiques est par exemple l’industrie automobile occidentale qui aimerait avoir un accès plus facile, et moins coûteux, au marché brésilien. Or, on le sait, le Brésil tient tout de même à défendre son industrie automobile locale et encourage les fabricants occidentaux à venir s’installer chez lui plutôt que de le considérer comme un simple débouché commercial. Une problématique que connaissent bien les Algériens qui importent la presque totalité de leurs véhicules alors que la demande locale justifierait l’existence de sites de productions nationaux.
De l’autre côté, les pays émergents continuent d’exiger un meilleur accès de leurs produits agricoles ou agroalimentaires aux marchés des pays développés. Ils posent ainsi la question des subventions dont bénéficient les agriculteurs européens et étasuniens et qui, selon eux, faussent la concurrence. Les sujets de discorde sont connus. Céréales, coton, vin et même fruits et légumes font l’objet d’interminables disputes en raison des fonds alloués par les Etats européens ou les Etats-Unis à leurs producteurs. Pour rester avec le Brésil, il faut citer le cas de son carburant agricole (issu de la culture de la canne à sucre) qui fait l’objet de quotas restrictifs en Europe (laquelle veut défendre son éthanol produit à base de betteraves).
Il n’y aura donc pas de négociations durant cette réunion ministérielle, mais de nombreux observateurs espèrent tout de même une avancée majeure. Cette dernière concernerait un accord sur les contrats publics. Jusqu’à présent, ces contrats sont le plus souvent soumis à des législations protectionnistes et cela, qu’il s’agisse des pays industrialisés ou non. Cette ouverture est une vieille exigence des pays européens qui ont toujours critiqué le Japon et les Etats-Unis pour leur protectionnisme en la matière. Reste qu’une telle évolution serait lourde de conséquences dans des pays qui tentent de développer un secteur économique par le biais de marchés publics.

ADMISSION DE LA RUSSIE. A QUAND L’ALGERIE ?

Par ailleurs et malgré le blocage du cycle de Doha, l’OMC continue de s’élargir. Ainsi, la conférence ministérielle sera-t-elle marquée par un feu vert donné formellement aux adhésions de la Russie, du Samoa et du Monténégro. Avec celle du Vanuatu, cela portera à 157 les pays membres de l’Organisation en 2012. Longtemps épineux en raison de l’opposition de la Géorgie, le cas de la Russie a donc finalement été réglé. Pour Moscou, c’est une blessure narcissique qui va se refermer, le rival chinois ayant été admis depuis déjà dix ans. Reste à savoir si le gain économique sera à la hauteur de cette victoire politique et diplomatique. Une question qui reste aussi posée pour l’Algérie qui frappe toujours, avec plus ou moins de conviction, aux portes de l’OMC…