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OBAMA ET L’EMPLOI

par Akram Belkaid, Paris

Keynes à la rescousse… Pour la deuxième fois en deux ans, Barack Obama en appelle donc à la dépense publique pour faire redémarrer l’économie. En 2009, en plein marasme provoqué par la crise des subprimes, il avait déjà fait adopter une enveloppe budgétaire de 787 milliards de dollars étalés sur deux ans. En fin de semaine dernière, c’est un autre plan, destiné à relancer la création d’emplois, que le président américain a présenté. D’un montant de 447 milliards de dollars, il consistera notamment en des réductions de prélèvements sur les salaires lesquelles favoriseraient les embauches mais aussi la hausse du pouvoir d’achat des salariés et donc une reprise de la consommation. Le plan prévoit aussi des travaux de modernisation des infrastructures, dont les écoles, ainsi que le prolongement de plusieurs dépenses sociales.

Les élections de 2012 en ligne de mire

Il n’y a rien d’étonnant à ce que le président américain lance cette initiative qui, en théorie, devrait créer entre 2 et 5 millions d’emplois d’ici la fin de l’été 2012. La situation économique des Etats-Unis n’est guère reluisante et une récession durable guette. Plus grave encore, le taux de chômage dépasse les 9% contre 3% au début des années 2000. Or, il est une règle établie que Barack Obama ne peut ignorer. Aucun président américain n’a été réélu depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale avec un taux de chômage de la population active supérieur à 7,2%. En l’état actuel des choses, le locataire de la Maison-Blanche ne pourrait donc obtenir un second mandat présidentiel. D’où ce plan ambitieux qui rappelle les tentatives répétées de l’administration Roosevelt pour faire sortir l’Amérique de la Grande Dépression.
Pour autant, rien ne permet de dire que ce plan va réussir ou, plus important encore, qu’il va voir le jour. En effet, il faut d’abord qu’Obama précise comment il va le financer sachant que les élus républicains du Congrès sont en embuscade. Ces derniers, qui contrôlent la Chambre des représentants et qui disposent d’une minorité de blocage au Sénat, ont déjà fait connaître leur position. Hors de question que ce plan soit financé par des hausses d’impôts ou qu’il se traduise par une augmentation des dépenses sociales. Une fermeté qui fait dire à nombre d’observateurs que le plan d’Obama est d’ores et déjà condamné et qu’il n’en subsistera que quelques mesures insuffisantes pour relancer l’économie.
De plus, on voit mal les élus républicains faire un quelconque cadeau à Obama à moins de quatre mois de l’ouverture de la campagne des primaires pour la présidentielle de novembre 2012. Si le chômage reste élevé, si la croissance n’a pas redémarré d’ici là, alors Obama ne pourra égaler l’exploit de Bill Clinton qui avait réussi à se faire réélire en novembre 1996 dans une conjoncture économique et politique difficile mais n’ayant certes rien à voir avec le bourbier actuel.

Une réélection qui reste possible

Mais Obama n’est pas encore battu. D’abord, son plan a été accueilli positivement par l’opinion publique. Du coup, les entraves des républicains pourraient se retourner contre eux et constituer un argument de campagne pour le président américain qui aura beau jeu de dénoncer l’esprit partisan de ses adversaires. Ensuite, la radicalisation du parti républicain, due notamment à la montée en puissance du mouvement réactionnaire du Tea Party, risque de lui faire perdre une bonne partie de l’électorat centriste. Or, c’est ce dernier qui, en tournant le dos à McCain, a permis l’élection d’Obama en 2008. Ainsi, les centristes pourraient de nouveau faire pencher la balance vers le camp démocrate en novembre 2012. A condition toutefois que la situation économique n’empire pas d’ici là.