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L’OMBRE DU KRACH, TOUJOURS ET ENCORE

par Akram Belkaid, Paris

Ce n’est pas une nouveauté : l’ombre d’un krach financier et boursier de grande intensité plane sur la planète. On peut se rassurer en se disant que ce n’est pas la première fois qu’une telle menace est évoquée. Depuis l’été 2007, date de la faillite de deux fonds subprimes de la BNP, l’économie mondiale est engagée dans une pente savonnée et personne ne sait comment stopper sa glissade. Et la comparaison avec ce qui s’est passé en septembre 2008, quand la faillite de Lehman Brothers a manqué de provoquer un chaos mondial, n’est même plus de mise.
Plus aucune ligne de défense
A l’époque, les Etats et les Banques centrales avaient joué le rôle de sauveurs providentiels. Avec de l’argent public, faut-il le rappeler, ces derniers ont réussi à atténuer les effets de plusieurs années de folle spéculation menées par les banques. Mais aujourd’hui, la situation a empiré. Les banques sont toujours «le» problème, même si leurs lobbyistes et autres propagandistes tentent de faire croire que les soucis sont ailleurs. De quoi s’agit-il ? Non seulement les banques, essentiellement européennes et étasuniennes, ont perdu beaucoup d’argent en spéculant sur les marchés dérivés, mais voilà que les experts feignent de réaliser qu’elles ont beaucoup prêté à des pays à la situation financière des plus fragiles.
Si la Grèce inquiète tant l’Union européenne (UE), la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI), c’est bien parce que sa faillite pourrait signifier la disparition de plusieurs banques européennes, notamment françaises et allemandes. Voilà pourquoi tout le monde se porte au chevet d’un pays qui a vécu au-dessus de ses moyens au cours des quinze dernières années, encouragé en cela par la générosité coupable de ses prêteurs. Et la réalité est sans appel. Aujourd’hui, en l’état actuel de leurs finances, les grandes banques seraient incapables de faire face à un défaut de la Grèce ou de tout autre pays ayant des difficultés budgétaires.
En théorie, cela signifie que les Etats qui n’ont cessé de mettre la main à la poche au cours de ces trois dernières années devront peut-être prendre en charge les conséquences de ces faillites bancaires plus ou moins annoncées. Or, ces mêmes Etats n’ont plus d’argent dans leurs caisses (à force de baisser les impôts des plus riches, on ne le répétera jamais assez) et on se demande donc comment ils feront pour pallier financièrement la disparition de telle ou telle banque. De plus, le ralentissement économique qui se fait sentir, malgré les politiques de relance pratiquées notamment aux Etats-Unis (où les destructions d’emplois commencent à s’aggraver), ne va pas arranger les choses puisque l’une de ses conséquences sera la baisse de revenus fiscaux déjà insuffisants.
Sauver les banques
Nombre de banques qui ont joué avec le feu ont une protection imparable qui explique pourquoi les Etats sont obligés de voler à leur secours. Ayant spéculé sur les marchés, elles ont aussi développé leur activité dite de détail, c’est-à-dire celle qui consiste à collecter les salaires et l’épargne des particuliers. Ce mélange des genres, interdit jusqu’au début des années 1990, aurait dû disparaître après la crise de 2008. Cela n’a pas été le cas. Aux Etats-Unis comme en Europe occidentale, les dirigeants politiques ont été lâches - le mot n’est pas trop fort - et n’ont guère cherché à remettre un peu d’ordre et de régulation dans un système financier devenu fou. C’est cela que le monde entier risque de payer un jour ou l’autre.