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Solaire : l'enjeu du choix des technologies et la synergie des compétences

par Ali Bouazid

Le domaine des énergies renouvelables, dont celui de l'énergie solaire, est concrètement appelé à se développer. Le groupe Sonelgaz y est déjà engagé. La Sonatrach va suivre. Il y a des choix à faire, souvent stratégiques dans le domaine technologique notamment.

Les travaux de construction de l'usine de fabrication de modules photovoltaïques, c'est-à-dire des panneaux solaires, devraient être entamés avant la fin du premier trimestre 2011, annonce officiellement le groupe Sonelgaz. Cette usine prévue initialement pour une capacité de production de 50 mégawatts aura finalement une capacité de plus de 100 mw, ce qui nécessitera un investissement de 100 millions de dollars intégralement financé par Sonelgaz.

Récemment sur les ondes de la Chaîne 3 de la radio, Messaoud Boumaour, chercheur et directeur d'une unité de recherche spécialisée dans le solaire (UDTS), a indiqué que l'UDTS collabore à ce projet depuis environ une année, et, que cette usine «fera intervenir des consortiums bien établis au niveau mondial». Sur le transfert de technologie, sujet récurrent, l'expert s'est montré très pragmatique. Pour Messaoud Boumaour, «la technologie ne se donne pas». Il faut, a-t-il dit en substance, l'acquérir par son propre travail et prévoir dans les marchés conclus avec les partenaires des clauses de formation. Tout en soulignant que la technologie du solaire (des énergies renouvelables en général) évolue très vite, il a révélé que les chercheurs et experts algériens maîtrisent celle-ci. Sur les trois premiers segments : élaboration, fabrication des cellules solaires et encapsulation du module, la maîtrise est réalisée, a-t-il notamment dit. Pour le quatrième et dernier segment, celui des systèmes, M. Boumaour a indiqué qu'il est également maîtrisé. «Nous sommes dans une phase de prototypage», et nous faisons bénéficier Sonelgaz de cette maîtrise technologique, a-t-il précisé.

Créer des PME-PMI

Il reste que la technologie photovoltaïque au silicium retenue en Algérie nécessite de nombreux intrants. Il n'y a pas uniquement que les équipements et un «process» technologique a relevé M. Boumaour. Il précise qu'il y a également des consommables dont des gaz, de la maintenance ; les consommables, par exemple, représentent jusqu'à 60% du coût de l'investissement. Ils créent une dépendance des importations «pendant assez longtemps», au moins cinq ans. La solution évidente est de les fabriquer localement en mettant en place un tissu de PME-PMI. C'est l'opinion de M.Boumaour et de plusieurs acteurs locaux du secteur de l'Energie. Il y a aussi les batteries «maillon faible du solaire» dont la production devra solliciter l'apport des PME-PMI à créer localement, ce qui réduira à terme les coûts de production de cette énergie solaire, photovoltaïque ou thermique. La Sonatrach a un projet d'usine de silicium destiné à la fabrication de panneaux solaires à partir de 2013, avec un investissement de 200 à 250 millions d'euros. L'objectif annoncé est de «sécuriser les approvisionnements en matière première de la future industrie de silicium» en Algérie.

 Au plan technologique, des observateurs avertis notent que «la technologie du silicium cristallin ne pourra être compétitive qu'avec les films minces». On déplore que le secteur public puisse engager de gros investissements dans le solaire photovoltaïque en recourant à des technologies obsolètes. A demi-mots, Sonatrach est ciblé, voire Sonelgaz. Des experts soulignent que la technologie sans le système des films minces revient actuellement à plus d'un dollar le watt, tandis que la Chine qui travaille sur la technologie avec les films minces a réussi à obtenir un prix inférieur à un dollar par watt, au grand dam des Américains.

Décloisonner

M. Boumaour, qui s'exprimait sur cet aspect également sur les ondes de la radio, a clairement montré qu'il était au fait de ces évolutions. Reste à savoir si ces préoccupations relatives aux coûts et aux choix technologiques sont partagées par les «décideurs». Un autre aspect, non moins important, a été abordé avec une franchise remarquable par M. Boumaour : celui de la synergie des compétences. Il faudrait a-t-il dit «travailler en décloisonnement», c'est-à-dire que «les ministères de l'Energie, de l'Industrie, de l'Enseignement supérieur, les entités publiques et privées, la formation professionnelle? doivent travailler dans une coordination qui doit voir le jour». Notre problème en Algérie, a dit encore ce chercheur, c'est le problème du cloisonnement et de la coordination, parfois inexistante, «il faut faire de très gros efforts».