Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

2011, année de tous les dangers ?

par Akram Belkaid, Paris

Chaque fin d’année est l’occasion de dresser des bilans et de dessiner des perspectives. En matière d’économie, on s’accordera à dire que personne ne regrettera vraiment 2010. Les douze mois qui viennent de passer ont en effet amené leur lot de crises diverses et d’aggravation des déséquilibres mondiaux. Certes, les pays émergents ont encore une fois tiré leur épingle du jeu, profitant notamment d’une hausse de 12% des échanges commerciaux, mais le constat est loin d’inciter à l’optimisme. En effet, de nombreux nuages demeurent et ne vont certainement pas disparaître en 2011.

Europe, Etats-Unis : toujours les mêmes craintes

Il y a d’abord la situation très préoccupante de l’Union européenne (UE), premier partenaire économique des pays du Maghreb. Le risque de défaut de l’un de ses membres reste important, ce qui pourrait, cela a été écrit à plusieurs reprises, conduire à un éclatement de la zone euro. Grèce, Espagne, Irlande, Portugal mais aussi Italie et France - laquelle reste toutefois épargnée par les Agences de notation - sont autant de pays qu’une dégradation de leurs finances pourrait obliger à restructurer leur dette - terme que les médias occidentaux préfèrent à celui (plus infamant ?) de rééchelonnement (lequel semble donc être réservé aux pays du Sud…).

On l’a dit, cette hypothèse du défaut de remboursement n’est écartée par personne mais l’inquiétude réside aussi dans le fait que cette crise de l’endettement de l’Europe pourrait se propager aux Etats-Unis. Pour l’heure, la première économie du monde a plutôt bien résisté et tiré parti d’une stratégie volontariste de relance concoctée par l’administration Obama. Mais il y a des chiffres qui font peur. Pour financer son train de vie, l’Amérique devra emprunter 2.200 milliards de dollars en 2011, soit l’équivalent de 6 milliards de dollars par jour (la moyenne était de 2 milliards de dollars par jour au milieu des années 2000 !).

Les questions sont toujours les mêmes. Que se passera-t-il si les Agences de Notation se décident enfin à dégrader la note des Etats-Unis (ce qui augmentera les intérêts que Washington devra payer à ses prêteurs) ? Que se passera-t-il si la Chine décide de réduire ses achats de Bons de Trésor américains ? On sait que Pékin envisage sérieusement d’utiliser une partie de ses 2.600 milliards de dollars de réserves de change pour «aider» certains pays européens en difficulté. Malgré ses ressources financières faramineuses, la Chine ne pourra pas voler en même temps au secours de l’Europe et des Etats-Unis.

Une autre interrogation concerne l’évolution des monnaies. Là aussi, la situation est très préoccupante avec un dollar qui faiblit, un euro menacé, un yuan qui reste sous-évalué, un yen qui s’apprécie au grand dam des dirigeants japonais, lesquels s’inquiètent pour leurs exportations, et des pays émergents qui essaient d’empêcher que l’afflux de capitaux étrangers dans leurs pays ne provoque une hausse de l’inflation. Du coup, nombreux sont les économistes qui pensent qu’une grande conférence internationale sur les monnaies devrait être organisée en 2011 de façon à mettre en place un nouvel équilibre monétaire mondial. Problème : les pays émergents n’en veulent pas et la Chine soupçonne les Etats-Unis d’être derrière une initiative qui reviendrait à placer le yuan sur le banc des accusés.

Et si la Chine... ?

Reste enfin une autre menace, plutôt diffuse mais que l’on commence à évoquer dans les salles de marchés. Et si 2011 était l’année de la grande crise pour la Chine ? Quand on sait que la croissance de ce pays a encore frôlé les 10% en 2010, il y a de quoi s’étonner de ce genre d’interrogation. Il n’empêche. Hausse de l’inflation, bulle immobilière, mauvaise santé des banques locales, contraction de la demande mondiale en 2011, tensions sociales qui s’aggravent dans de nombreuses provinces, incertitudes quant à la mise en place de réformes politiques pour accompagner l’émergence d’une véritable classe moyenne (de 300 millions d’habitants !) : le cocktail est suffisamment détonnant pour placer potentiellement la Chine dans une situation de crise majeure dont les conséquences atteindraient alors la planète entière.