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Migrants au Canada et discriminations salariales

par Akram Belkaid, Paris

C’est une étude dont les résultats risquent d’intéresser nombre d’Algériens... Selon les travaux de chercheurs de l’Université McMaster de Hamilton, en Ontario, la discrimination salariale à l’endroit des immigrants qui arrivent au Canada ne s’est pas améliorée depuis 30 ans. Bien au contraire, l’écart de rémunération a tendance à s’aggraver dans certains secteurs, notamment la médecine et les hautes technologies.

De même, le phénomène de déclassement symbolisé par ces migrants hautement qualifiés qui n’ont pas d’autre choix que de devenir chauffeurs de taxi reste persistant. Une tendance qui bat en brèche l’image positive du Canada en matière d’immigration.

L’impact de l’image dévalorisée du migrant

Plusieurs facteurs expliquent la persistance de cette discrimination qui ne dit pas son nom. Il y a d’abord le fait que les diplômes et les expériences acquis à l’étranger continuent de susciter la méfiance des employeurs canadiens. «Un immigrant qui, sur papier, semble posséder une formation et une expérience équivalentes à celle d’un Canadien, n’est pas reconnu à la même valeur», juge ainsi Mikal Skuterud, de l’Université de Waterloo. Certes, dans de nombreux cas, les nouveaux arrivants ont eu tendance à «gonfler» leur curriculum vitae, notamment pour décrocher leur visa d’immigration, mais, notent les chercheurs, cela n’explique pas tout.

Désireux d’attirer des migrants pour stabiliser sa population et faire en sorte que son économie ne manque pas de bras, le Canada n’a pas axé ses efforts sur la nécessité de convaincre les employeurs de jouer le jeu et de donner leur chance aux nouveaux venus. Cela explique pourquoi nombre d’entreprises cherchent d’abord à embaucher des Canadiens. Si le comportement de certains recruteurs est dicté par des considérations racistes qu’il ne faut pas éluder, il est fort probable que c’est l’image générale peu valorisée de l’immigration au Canada qui est en cause.

En un mot, le gouvernement fédéral d’Ottawa, mais aussi ceux des provinces, seraient bien inspirés de communiquer à destination du monde des affaires en assurant que les migrants accueillis au Canada ne sont pas que des réfugiés mais que nombre d’entre eux appartenaient à l’élite de leur pays d’origine.

Cela aurait le mérite de prouver que le Canada n’est pas uniquement intéressé par les enfants de migrants. Cette accusation est récurrente dès lors que l’on évoque le cas des nouveaux arrivants obligés d’accepter des emplois bien en-deçà de leurs capacités. Face à cette situation douloureuse, nombreux sont les chercheurs qui déplorent le cynisme des autorités pour lesquelles la première génération de migrants ne peut qu’être sacrifiée, en attendant que celle des enfants nés au Canada s’intègre pleinement et décroche des emplois correspondants à leurs qualifications.

La seconde génération touchée elle aussi

Mais le problème, c’est que les enfants de migrants semblent eux aussi éprouver de la peine sur le marché du travail puisqu’ils font face à des écarts salariaux plus ou moins importants par rapport à des Canadiens «d’origine». Cette situation n’est pas niée par les autorités qui reconnaissent que c’est la première fois qu’un tel problème apparaît, les générations précédentes de migrants européens n’ayant pas connu ces déconvenues.

Jour après jour, le Canada fait donc l’expérience de la difficulté d’intégrer les enfants de migrants venus d’Asie ou d’Afrique.