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De Purdure University aux USA?à l'Université Scientifique Algérienne

par Ali Derbala

Dans l'introduction de son article, Ighemat (01) a écrit : «L'Université ? forme des gens qui sont essentiellement orientés vers l'extérieur et qui vont tout faire pour trouver un débouché à l'étranger,?».

Il faut inculquer à nos étudiants que tout peut se faire et doit se faire chez eux. Les étudiants de qualité trouvent des débouchés, pas forcément auprès de la Fonction publique mais auprès de beaucoup d'entreprises privées ou étrangères exerçant en Algérie. «Quitter sa maison spacieuse» et «Aller s'installer dans l'étroit» ou «squatter» ou «vivre» chez le voisin n'est ni une solution ni une résolution. Je ne peux pas encore m'étaler sur ce côté sociologique, que seuls les spécialistes peuvent canaliser et suggérer des propositions concrètes, mais je vais relater des résolutions pour l'administratif, le pédagogique et le scientifique.

 Au paragraphe: SITUATION ACTUELLE DE L'UNIVERSITE, il a aussi écrit : Deux raisons peuvent être avancées pour expliquer ces tendances ? l'ignorance par une grande majorité des responsables des Universités des méthodes et des techniques de management et de marketing modernes. La connaissance a pour résultat immédiat d'éclairer l'action et de faciliter l'effort vers le bien, tandis que l'ignorance paralyse cet effort ou le détourne de sa vraie fin. La science est science du connaissable en lui-même ou de l'objet, quel qu'il soit, qu'on doit lui assigner ; une science déterminée est science d'un objet de qualité déterminée. La science de gérer des Universités est appelée « Management d'un Rectorat ». Dans aucuns textes qui régissent les Universités et leurs personnels ou la fameuse Charte d'« Ethique et de Déontologie universitaires», on ne fait mention du «mandat» ou de la «durée» de nomination des doyens et recteurs. Ils sont des légats du MESRS, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.

Comment peut-on élire un Président de la République par mandat de cinq années et nommer un doyen ou un recteur pour l'éternité devant l'Eternel ? Il faut que les responsables de la tutelle comblent cette «grosse lacune». Un recteur d'une Université est présent à son poste en «discontinu» depuis 36 ans ! Vous convenez que cela relève du «Guinness».

«Nommer des responsables» sans qu'ils soient élus par leurs pairs, c'est s'emparer, assimiler, s'approprier d'eux, c'est un acte violent infligé par le centre de nomination à un être, à un ensemble d'êtres; nommer des responsables élus par leurs pairs, c'est créer, faire être, distinguer, voir, connaître d'une certaine façon de nouveaux individus. C'est un acte instaurateur.

L'homme n'est rien tant qu'il passe, qu'il meurt. Tout ce qui se mesure est destiné à périr. L'homme est grand par son génie inventif et par sa conscience du devoir. Le désir de savoir est une passion de l'esprit humain. Les idées sont pensées et ne sont pas vues.

 Cet auteur a aussi écrit : «A cela, il faut ajouter qu'aucun dialogue n'existe entre l'Université et les secteurs économiques?.». A mon humble avis et sans être animé d'une mauvaise volonté, il n'y a pas de secteur économique, hormis les hydrocarbures. En Algérie, l'image du processus de production que l'on a à l'esprit est le fait productif qui se limite à l'installation d'une usine donnée et à sa gestion ultérieure. On admet l'usine comme l'unique et la plus significative expression de la technique choisie et identifie l'usine à la combinaison capital et travail. On accuse la Fonction publique à tort et à travers. Si vous êtes un ingénieur, rien ne vous interdit de fermer un robinet d'eau qui coule !!!! Parfois, les fonctionnaires honnêtes sont empêchés de toute initiative salvatrice. Tellement ils sont démoralisés par leur vie sociale, ils ne sont animés d'aucune volonté de contribuer à l'amélioration de la vie des citoyens. A chaque fois, on les paralyse par des lois qui n'ont pas de circulaires d'applications. Des Décrets sont promulgués depuis des années, mais ne peuvent être appliqués faute de circulaires d'applications expliquant les petits détails. Certes, une institution publique, qui n'est pas un bien privé, doit rendre compte de sa gestion et de l'épuisement de son budget. Les obstacles à l'innovation sont comme les défenses immunitaires contre les greffes ou les invasions microbiennes. Le marasme et les situations de statu quo profitent beaucoup aux incompétents. Je ne vous apprends rien, le Maghreb n'est ni l'Occident ni l'Orient. Il est connu pour son despotisme, son népotisme, son régionalisme décrit par le célèbre sociologue Ibn Khaldoun dans sa «Moukadima».

 Cet auteur (01) a aussi écrit dans le même paragraphe : «Par exemple, les responsables d'universités, de facultés et de départements ne sont pas requis de connaître les méthodes de management modernes?.». Rares sont parmi ces responsables ceux qui présentent des curriculum vitæ importants appelés CV, affichés sur les sites WEB de leur université ou leurs pages WEB personnelles. En général, ils ne sont nommés que par cooptation et non pas pour leurs contributions pédagogique, scientifique et administrative.

 Dans le second paragraphe intitulé LES SOLUTIONS POUR RENVERSER CES TENDANCES LOURDES, l'auteur suggère que l'Université doit orienter son action vers deux domaines stratégiques. Ce qui m'intéresse est le premier évoqué. La formation des étudiants à «l'entrepreneurship», des étudiants capables de créer leur propre entreprise, et la formation de ses propres cadres aux techniques modernes de management et de marketing, d'autre part. Vous rêvez ou quoi ? A l'Université scientifique, nous avons des étudiants qui ne savent ni lire, ni écrire, ni parler et ni ni. On est allé loin dans cette déchéance pédagogique et scientifique.

 On a été trop laxiste sur les choses. Il est temps de réveiller les consciences, au moins universitaires, quitte à choquer, pas jusqu'à provoquer un arrêt de cœur. Les gens ne lisent plus, ne peuvent plus tenir sur place jusqu'à la fin d'un film, ne peuvent plus s'installer une heure dans un café, etc. On est très stressé. La situation pédagogique d'où nous puisons notre mensualité me préoccupe beaucoup. Il faut qu'on fasse quelques choses. Les enseignants sont las et lâches (de la nonchalance). Un enseignant de grade Professeur s'est confessé à moi en me disant texto : « Ali, il m'arrive de parler tout seul au tableau et je ne pose aucune question à mes étudiants». Sans froisser cet auteur et c'est pour cela, il ne faut jamais écrire à grande distance, écrire du nouveau monde, les states !!! Il faut vivre dans le milieu sur lequel on veut écrire.

L'auteur Ighemat a écrit : L'Université attend que les secteurs économiques fassent le premier pas, les secteurs économiques attendent que ce soit l'Université qui vienne à eux. Il ne sied pas au médecin d'aller offrir ses remèdes au malade : c'est au malade de les lui demander (De Platon. La République. Traduction et Notes par R. Baccou. GARNIER-FLAMMARION, 1966, p.34).

 Dans la suite, l'auteur parle de la gestion des ressources humaines. Pour ne pas vous décevoir, dans la majorité des cas, le débat n'existe pas à l'Université entre les responsables, les enseignants et les étudiants. Savez-vous que la majorité de responsables des Universités ne rencontrent jamais ou ne croisent leurs collègues (ou subordonnés !!), même parmi les enseignants de rang magistral. Ce qui nous manque en Algérie est le «Respect et la reconnaissance = El K'-der». Me lire (02, 03). Tous les enseignants de rang magistral doivent diffuser leurs cours sur les sites WEB de leur Université respective. Les étudiants auront l'embarras du choix de puiser leur cours là où ils leur semblent clairs, adéquats, pédagogiques, etc. L'Université algérienne est malade de l'absence de participation de la majorité de ses enseignants à sa vie, de la pléthore de ses étudiants médiocres et de l'incompétence de certains de ses responsables. Le silence des universitaires n'est pas fortuit. Nous avons des enseignants qui, hebdomadairement, ne viennent à l'Université que pendant deux demi-journées (2 cours consécutifs de 3 heures, 2 fois par semaine), des universitaires épiciers, taxis clandestins, vendeurs de lait, vendeurs de poulets, de leben, commerçants ambulants, apiculteurs, etc., qu'on a acculés à la survie. Il y a aussi des «businessmen» importateurs, responsables d'entreprises, de laboratoires privés, d'officines privées, etc. Ils ne sont à l'Université que pour le prestige. Il est temps de les faire fuir ou de chasser ces «businessmen «en imposant un niveau de productions pédagogiques et de recherches élevé. Je n'hésite pas à citer les enseignants «gladiateurs» qui ne font que descendre dans les amphithéâtres pour donner des cours. Pour renflouer leurs poches, les pauvres ne font que des heures de vacation. Heureusement que la réglementation est là pour freiner à huit (08) heures par semaine le plus téméraire d'entre eux. Seuls, les vrais scientifiques qui enseignent, qui encadrent et qui publient ne tirent pas leurs épingles de ce Jeu algérien où «l'Etat fait semblant de payer les enseignants et les enseignants font semblant de travailler». Les pouvoirs publics ont fait des indemnités et des salaires des enseignants-chercheurs un sujet «tabou». Ils veulent placer la charrue avant les bœufs. Sachant que la vie en Algérie est plus chère qu'en Europe ou en Amérique, ils veulent qu'on soit compétitifs avec les Européens et les Américains à 600 euros !! Jusqu'à cette date, on n'a ni statut de chercheurs de laboratoire, ni indemnités et ni ni. On nous fait que des promesses, comme celle du «régime indemnitaire» qui date depuis 2008 !!! Le «régime indemnitaire», qui normalement sera constitué que de quelques calories, de quelques protéines, du calcium et du fer, est encore en négociation.

Conclusion

La gestion des ressources humaines à l'Université est confuse, même dans la tête des responsables de cette institution. Y a-t-il que des enseignants-chercheurs (qui enseignent et font impérativement de la recherche pour pouvoir encadrer les étudiants) ou y a-t-il des enseignants pédagogues et non chercheurs (qui ne sont pas tenus de faire de la recherche) ? Le statut des enseignants-chercheurs du supérieur est régi par le Décret exécutif n° 08-130 du 03 Mai 2008 où les droits et devoirs des enseignants, professeurs, maîtres de conférences et maîtres-assistants sont stipulés en plusieurs articles.

Dans ce texte, on évoque et on fait référence aux enseignants-chercheurs. Les enseignants-chercheurs possèdent naturellement l'amour de la science et le goût du travail. Au lieu de proposer des salaires conséquents à tous les membres de la communauté universitaire et oser remercier les enseignants-chercheurs sans production au bout de trois ou quatre années, les dernières mesures parues ce week-end dans la presse, des projets d'indemnités sont proposés aux seuls chercheurs (cela sous-entend qu'il existe des enseignants qui ne sont pas tenus de faire de la recherche). Des indemnités subordonnées à la confection de rapports très satisfaisants, sur papier et en ligne, dans le moyen terme, au bout de trois années. Naturellement, le chercheur ne passera son temps qu'à rédiger des rapports volumineux de peur de perdre son contrat de projet.

* Universitaire

Références

1. Arezki IGHEMAT. L'Université : former des «créateurs d'emplois» plutôt que des «chercheurs d'emplois». El Watan, Rubrique : Idées- Débats, 18 Septembre 2010, p.21.

2. Ali DERBALA. Sur les réalités de la formation doctorale dans un laboratoire de recherche algérien. Le Quotidien d'Oran, Lundi 18 Janvier 2010, Rubrique: Débats, p. 09.

3. Ali DERBALA. Halte à la bureaucratie dans la gestion des laboratoires de recherche en Algérie. El Watan, en deux parties. Rubrique: Idées-Débats, 01-02 Décembre 2009, p.22.

4. Ali DERBALA. Le «salut « de l'Université algérienne. El Watan, Mardi 11 septembre 2007, rubrique Idées-Débats, p.23.