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La fièvre de la Coupe du monde

par Boutaraa Farid

Si le monde entier craint la grippe porcine, chez nous en Algérie c'est la fièvre de la Coupe du monde qui ne cesse de contaminer chaque jour des milliers de cas.

En effet, la fièvre de la Coupe du monde s'est emparée de presque toute la population et on la décèle même chez les nourrissons. Les Algériens avaient vite oublié la misère et toutes les discussions ne sont qu'autour du ballon rond.

 C'est toute la jeunesse algérienne qui ne rêve plus maintenant d'une simple participation à cette coupe du monde du football, mais ils comptent l'emporter. Pourquoi ne pas prouver à tout ce beau monde que nous avons une équipe de haut niveau et que les guerriers du désert sont de retour avec force et détermination et qu'ils n'ont qu'un seul vœu celui d'offrir ce trophée à cette nation, que les grands de ce monde ne la respecte que pour son pétrole. Pourquoi ne pas arracher victoire sur victoire en conjurant le sort et en retenant cette dame qui nous rend visite pour la première fois au continent africain.

 Pourquoi ne pas terminer en apothéose notre si rude parcourt par l'obtention de cette coupe du monde qu'aucun pays arabe, ni Africain n'avait un jour rêvé de l'avoir et de prouver à tous que nous comptons faire de notre pays une rose rose.  

Pourquoi nous nous contentons toujours des miettes et pourquoi ne pas défendre nos chances avec galanterie devant cette hôte, tant convoitée et qui ne sourit qu'a celui qui se prépare mieux et qui ne compte pas beaucoup sur la chance. La coupe du monde sera en Afrique et c'est à nous d'exhiber la maturité de nos réflexions, la fraîcheur de nos muscles et surtout la supériorité de notre jeu, qui étonne petit et grand. Il faut avouer aussi que notre équipe est tel un vin doux et fort, elle sème la crainte dans les têtes des joueurs adverses et l'ivresse chez toute la presse. C'est à nous de prouver en ce début de siècle que l'Algérie est la terre des miracles et si hier, nos parents ont pu vaincre la France, c'est à nos jeunes de refaire le même exploit. L'Algérie qui était la Mecque des révolutionnaires peut redevenir la capitale du foot et du bonheur. Elle peut aussi, relever la tête de tous les pays qui étaient colonisés et les invitera si Dieu le veut à la fête des verts qui dépassera en beauté cette des bleus français aux Champs-Elysées. C'est à nous les guerriers du désert de croire vraiment au rêve et de pousser loin notre ambition et de fixer comme unique mission la quête de ce trophée tant convoité. C'est à nos jeunes combattants de répondre par courage, souplesse et technicité dans les stades de cette antique cité. C'est à nos courageux joueurs d'évoluer sans crainte, ni peur en allant démontrer au monde entier que nous sommes les meilleurs et par l'occasion nous répondons à tous nos détracteurs, qui malheureusement restent aveugle et jaloux et qui ne perçoivent nos jeunes que comme de pauvres arrivistes qui n'ont ni passé ni avenir et qui avaient gâché le bonheur d'une grande nation de fève, «foul» et non pas de foot. Cette nation qui ne veut pas accepter sa défaite et qui pleurniche tel un enfant privé de jouet.

Cette nation qui prêche toujours un discours insensé à travers ses chaînes satellitaires et qui sème dans les esprits des Egyptiens et des voisins la haine des Algériens. Cette nation qui voulait utiliser le sport à des fins politiques et ses journalistes étaient payés afin de chauffer le public Egyptien en créant chez lui l'amour de la patrie mère l'Egypte qui se résume dans l'image de Djamel Moubarak et de montrer l'Algérien non pas comme un arabe et frère, mais comme un ennemi venu pour les priver de bonheur. L'Algérien était décrit comme un homme sans culture et sans origine et le message était ancré chez cette population qui voulait assurer la qualification de son équipe. Cette nation qui avait provoquée l'ire des Algériens et qui savait que le sang de nos joueurs était sacré et que nos supporters allaient venger leurs frères au Soudan.

Alors, nos politiques ont aussi joué le jeu et notre président Bouteflika avait facilité le transport de nos fans pour d'une part encourager les verts et d'une autre part donner une raclée à nos frères aînés qui avaient perdu la raison. Donc, loin de la patrie mère et en traversant un désert et non pas la mer, nos vaillants hommes sont allés défendre notre honneur et avec Dieu, ils ont pu laisser ces orgueilleux Egyptiens en pleurs. Jamais un match de football n'avait attiré l'attention de toute une nation et jamais l'Algérie n'avait connu une telle joie depuis son indépendance. En effet, cette qualification à la coupe du monde avait pris une tournure d'un feuilleton Egyptien et, où l'Algérien avait le rôle du méchant, quant au fils du Nil on lui avait laissé le rôle du héros. C'était le noble, le savant qui allait sauver la nation Arabe. Le scénario était préparé et beaucoup de pays arabes étaient derrière l'Egypte et ils baignaient tous, dans un climat tendu dans l'attente de la fin heureuse de l'intrigue.

Le match avait commencé et à l'écran des montres c'était affiché l'éternité. Un peu plus tard les Algériens marquent le premier but et la panique s'installe chez les pharaons qui ne savent plus quoi faire. Le reste de la partie n'était qu'une séance d'entraînement pour les poulains du maestro Saâdane qui avait prévu ce score. Une fois la rencontre terminée, les journalistes Egyptiens redoublent de violence et au lieu de nous féliciter les voilà de nouveau à la recherche de faux prétextes. Le deuil se déclare au Caire et c'est la fête qui trouve le chemin de notre antique cité Alger. C'est la vraie joie tant attendue par cette jeunesse qui ne vivait que pour ce drapeau qui orne toutes les demeures. C'est les larmes de la victoire mélangées avec les youyous des femmes qui nous rappellent ceux de l'indépendance de l'Algérie.

Cette Algérie qui commence à goûter aux délices de la liesse et de la fête. Cette douce et belle Algérie qui enterre sa souffrance et ses peines et qui se prépare à la grande cérémonie où les anges de Dieu ont refoulé tous les maux et les actes de folie. Cette Algérie qui pleure de joie et qui salue la bravoure de son équipe et cet arsenal de supporters qui n'ont jamais hésité à aller porter une aide morale aux joueurs après l'arnaque et le traquenard de nos faux amis que Dieu nous les a dévoilé. Cette Algérie belle et rebelle et qui ne glorifiait que la sincérité et la vérité. Cette Algérie que beaucoup de nation jalouse et qui reste telle une reine sur une pelouse en mangeant des amandes et entourée de roses. Cette Algérie qui ne pardonne jamais à cette France qui avait divisée ses enfants entre moudjahidine et harki. Cette Algérie qui n'avait plus donnée signe de vie, car elle avait le feu au foyer et qui n'avait jamais compté sur l'aide d'aucun pays ami. Cette Algérie qui avait gérée toute seule sa crise et qui n'avait jamais abandonné ses enfants et Dieu merci la voilà maintenant qui respire un peu mieux et qui espère oublier vite son passé plein de cauchemars. Cette Algérie qui étonne par sa résistance à la misère et à la souffrance et qui allaite ses petits d'un breuvage magique. Cette Algérie qui avait versée tant de larmes pendant l'occupation Française et surtout après les actes d'injustice, de mépris et de «hogra» envers les algériens qui étaient considérés comme des biques et des sous êtres privés de tous les droits. Cette Algérie qui n'avait jamais cessée de croire en son étoile et qui telle une femme soumise n'avait jamais démissionné de ses tâches et qui avait élevé ses enfants dans la pauvreté la plus totale, malgré toutes les richesses de ses terres qui étaient entre les mains des colons qui essayaient de se faire passer pour des donneurs de cours de civilisation, alors qu'ils n'étaient en réalité que de vulgaires pilleurs. Cette Algérie qui n'avait connue la liesse qu'en 1962 et qui croyait avoir enterré à jamais les jours noirs et les nuits froides bourrées de terreur.

Après trente ans de vie paisible la revoilà de nouveau sans voile en train de rechercher sa voie entre des corps sans vie de ses propres enfants, qui n'avaient pas les mêmes visions et qui avaient juré de passer aux armes. La revoilà triste et un peu perdue dans un monde froid et sans clémence. La voilà déchirée entre les cris de révolte des uns et des soupirs des vieux et aussi les sourires des envieux.

 La voilà égarée comme un enfant qui avait perdu l'argent d'une commission et qui par peur de réprimande va errer tout seul dans la froideur des rues. La revoilà triste et seule ne sachant pas où donner de la tête, ni quoi faire pour étouffer le feu de la discorde. Mais, le temps apaise les colères et notre belle Nedjma ne pouvait rien contre la fatalité et la folie des hommes. Vingt ans après, le soleil éclaire ses beaux yeux noirs de nouveau et le malentendu était derrière elle. La peur faisait parti du vocable enfoui dans les granges telles ses poupées usées. Et pourtant, c'était presque vingt ans de feu, d'attentats, de terreur et de sang. Pauvre Algérie...

Une fois relevée sur pied la belle et douce Algérie, telle une biche sauvage, douce, rebelle et riche déchire le voile du malheur et exhibe sa beauté, son cou, son visage et surtout son beau sourire et met le feu dans les coeurs de ses amants. La revoilà souriante et ivre de joie après la victoire de ses vaillants soldats qui étaient allé guerroyer aussi loin que les remparts de la cité. La revoilà joyeuse telle une adolescente qui vient de découvrir les feux de la passion et les délices de l'amour. La revoilà heureuse telle une femme mariée qui tombe enceinte. Troublée et un peu inquiète elle cherche dans la nuit son chemin et sans faire trop de bruit elle pleure en silence. Elle se vide et tend sa main à ce jeune Ziani qui un peu timide et subjugué par cette offre. Ce chef des verts qui allait danser avec cette femme que tout le monde aime. C'était la première danse et le premier cavalier devrait faire vite pour céder la place à un Chawchi qui n'avait jamais prévu qu'il allait être l'un des meilleurs guerriers et qui allait jouer un premier rôle dans cette bataille du Merikhe. Le troisième homme ne pouvait être que ce Antar Yahia qui avait mis fin au rêve des petits d'Egypte. La douce femme ne pouvait se contenter de ces trois cavaliers et avait promis de danser toute la nuit afin de régaler tous ces braves jeunes qui avaient juré d'aller la défendre et de lui ramener le billet de la qualification à cette coupe du monde.

 La douce Algérie avait besoin de cette victoire et les cris de ses enfants mélangés aux larmes de ses fans ne pouvaient que lui faire plaisir. Elle la femme qui n'avait jamais fuit ses responsabilités et qui avait besoin de festin. Elle, la patrie, la terre de nos ancêtres et le sol où nous avons attiré. Elle, la vierge, la madone. Elle, la fierté de tous les Algériens et le trésor que nous devrons protéger contre l'usure du temps et le changements des humeurs et des mentalités. Elle, la rebelle qui nous pousse à la guerre et qui exige l'obéissance envers la mère. Elle, qui veut jalouser ses voisines et qui ne veut aucun ornement sauf ce trophée que nous devons lui offrir. Elle, qui mérite mille poèmes et mille bouquets de fleurs. Elle, l'Algérie qui était revenue de loin tel un mourant alitait depuis vingt ans. Elle, qui mérite le sacrifice et qui nous demande de rester tous unis pour les feux d'artifices. Elle, l'Algérie qui ne peut vivre sans fête, ni festin et qui essaye chaque jour que Dieu fait de changer son destin. Elle, la belle et la douce brune qui crible les yeux de tous les hommes et qui laisse éveiller les cervelles de toutes les femmes. Elle, la miraculée, la femme qui dépasse en beauté les Houri. Elle, l'Algérie qui nous appelle et nous interpelle à faire d'elle notre unique fleur et de lui offrir nos âmes en secret. Elle, la douce princesse que nous devrons défendre contre nos ennemis et l'aimait, car c'est elle qui chassera tous nos ennuis. Elle, qui avait connue la misère, la sombre douleur et qui n'avait jamais renoncé à la culture des fleurs. Elle, que nous devons aimer et lui rester fidèles, car jamais nous ne trouverons cette tiédeur ailleurs et jamais une marâtre ne remplacera l'amour doux de notre unique et adorable mère. Douce Algérie...  

Pour finir, nous souhaitons que cet exploit en sport sera reconduit dans d'autres domaines de la vie courante et que nos responsables dans tous les secteurs se donnent à fond. Nous voulons aussi, que nos responsables suivent la réussite de Monsieur Raouraoua le diplomate et le maître, ainsi que notre « Cheikh » Saâdane qui savait choisir le moment de prendre la barre de notre bateau qui depuis vingt ans chavirait au large en attendant le touage.

 Nous voulons que l'Algérie saute et dépasse toutes les nations. Nous voulons effacer tous les cris de souffrance pour laisser place à des sourires d'enfance. Nous voulons l'équité qui va éclairer nos âmes en déposant un faisceau de lumières qui nous conduira au bonheur. Nous voulons l'union de tout ce peuple qui n'a qu'un souhait, celui de vivre dignement le slogan «du peuple et pour le peuple». En fin, la coupe du monde reste à la portée de toutes les équipes présentes en Afrique du sud et nous avons le droit de rêver avec cette équipe des guerriers du désert qui hissera haut l'unique étendard arabe et cela renforcera aussi notre place au sein de cette nation arabe malgré tous les propos outrageux dites sur nous au Caire.