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L'Algérie ne fera pas d'autres concessions

par Ghania Oukazi

Contrairement au souhait de la Commission européenne, l'Algérie refuse de faire une nouvelle offre tarifaire en matière de services en prévision de son adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

«On ne peut pas dire aujourd'hui que l'Union européenne est en train d'entraver le processus des négociations algériennes pour l'adhésion à l'OMC, mais si l'Algérie ne répond pas aux questions, on ne peut pas avancer !», relèvent les responsables européens. Ils vont d'ailleurs jusqu'à s'interroger sur les raisons qui laissent l'Algérie faire dans «ces pratiques dilatoires». Pour aller droit au but et affirmer «nous doutons de la volonté de l'Algérie à vouloir vraiment adhérer à l'OMC.» Dans ce cas, disent-ils, «ne rangez pas la balle dans notre camp, ce n'est pas nous qui bloquons vos négociations parce que quand un pays veut adhérer à l'OMC, il travaille beaucoup, ce qui n'est pas le cas de l'Algérie, elle ne répond même pas aux questions !».

On arrive à avouer, côté européen, que «c'est pour cela qu'on a laissé un peu de côté le dossier algérien ». Non sans répéter que «nous Européens, sommes prêts à lui faire des concessions sur les services». Une précision qui fait réagir les Algériens plus que toutes les autres. «On ne répond pas parce qu'on n'est pas pressé !».

Mais ce n'est pas tant que l'Algérie ne réponde pas aux questions, qui gêne l'Union européenne, c'est surtout le fait que la Commission européenne lui ait demandé de faire une nouvelle offre sur les services et qu'elle ait refusé. «Pour nous, c'est une énième offre qu'on nous demande de faire sur les services, mais nous ne sommes pas prêts à l'accepter ! Nous refusons de faire de nouvelles concessions sur les services. On en a suffisamment fait !», affirment-ils sans ambages. Non sans rappeler que «les Européens ont été tellement gourmands qu'ils n'ont rien fait pour nous aider dans les négociations alors qu'on pouvait les conclure il y a 4 ans !».

La CE estime que conformément à la clause de rendez-vous contenue dans l'accord d'association, il serait possible aux deux parties de revoir ce qui a été conclu en matière d'agriculture et de services.

«La liste des produits agricoles transformés et de la pêche pourrait être révisée et nous pourrions faire des concessions à l'Algérie en matière de services», promet-on, en signalant que «nous n'avons pas fait de telles concessions à aucun autre pays. Il ne faut pas donc insulter l'adversaire pour lui demander après des concessions. On verra ce que fera l'Algérie à ce rendez-vous». Prévu l'année prochaine, le rendez-vous en question n'a, selon nos sources algériennes, pas été abordé lors du Conseil d'association.

Le Memorandum Under Standing sur l'énergie, actuellement en discussions entre l'Algérie et l'UE, pose aussi problème. A la disponibilité des Européens à faire aux Algériens « des concessions en matière de services», l'Algérie insiste sur le fait que ses entreprises puissent accéder librement au marché européen.

En réalité, rectifient les responsables algériens, «les Européens ne nous ont jamais parlé de concessions. En plus, il n'y a pas de donnant-donnant de ce genre à propos de ce mémorandum. L'Algérie n'en veut pas tant qu'elle n'aura pas adhéré à l'OMC».A la CE, on rappelle qu'à la fin du Conseil d'association de juin dernier, l'Algérie a déclaré qu'elle abriterait un forum des investissements européens. Forum qui sera, nous dit-on, financé par un budget de l'UE. « Débloquer 100.000 euros, ça s'appelle budget ?», interrogent surpris les Algériens. Prévu pour la fin de l'année, ce forum peinera, selon nos sources algériennes, à drainer des investisseurs européens parce que, disent-ils, «avec 100.000 euros, ils auront des difficultés à mener un travail de marketing».

La CE a, selon nous sources, salué le fait que l'Algérie ait accepté de discuter sécurité : «Ça nous intéresse parce qu'elle a une expérience en matière de lutte antiterroriste». C'est en fait retenu, indiquent les Européens, après qu'elle eut fait une contre-proposition relative au sous-comité des droits de l'Homme, auquel elle a ajouté « sécurité». Les responsables algériens rectifient : «Il y a 4 ans, l'Algérie avait fait une contreproposition au sous-comité des droits de l'Homme en demandant à la CE de lui ajouter le dialogue politique et la sécurité conformément au titre I de l'accord d'association. Mais les Etats membres de l'UE nous l'ont refusé, estimant que nous devions nous aligner sur tout le monde».

Il est noté qu'au sous-comité sur les droits de l'Homme, tous les pays signataires de l'accord d'association avec l'UE y ont adhéré, à l'exception d'Israël « naturellement». D'ailleurs, aucun Etat membre n'a trouvé à y redire. L'Algérie a refusé de le faire parce que, nous dit-on, «nous refusons qu'il nous soit instauré une sorte de tribunal qui nous demande des explications à chaque fois que ça lui plaît». Le dossier a été rouvert lors du dernier Conseil d'association. «Ils sont revenus sur la question, on y est revenu avec la même contreproposition, c'est-à-dire avec des compétences élargies au sous-comité, avec en plus des droits de l'Homme, le dialogue politique et la sécurité. On attend la décision des Etats membres parce que ce n'est pas à la CE de dire oui ou non», affirment les Algériens.