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Révolution verte aux Etats-Unis ?

par Akram Belkaïd, Paris

Barack Obama jouait sa crédibilité dans l’affaire et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est sorti victorieux, du moins provisoirement, de l’épreuve. Avec l’adoption par la Chambre des représentants (219 voix pour, 212 voix contre, dont 44 démocrates) d’une loi destinée à favoriser la réduction des gaz à effet de serre (GES), le président américain concrétise une promesse majeure de campagne et lance son pays à la poursuite de l’Europe, qui se targue avec justesse d’être à la pointe du combat planétaire contre le réchauffement climatique.

 

 La lutte contre le réchauffement climatique relancée

 

Qu’en est-il au juste de cette loi ? Son objectif est de faire diminuer les émissions de GES de 17% d’ici 2020 et de 83% d’ici 2050 par rapport à leur niveau de 2005 (à ce jour, un Américain émet 19 tonnes de CO2 par an, contre 4,3 tonnes pour un Chinois).

Le texte adopté prévoit la mise en place d’un système de marché d’émission - appelé le plus souvent marché carbone -, où les plus gros pollueurs auront la possibilité d’acheter des permis d’émission auprès d’acteurs économiques plus vertueux, ou en tous les cas moins pollueurs. Il s’agit d’un système incitatif qui existe déjà en Europe et qui est censé récompenser les industries qui mèneront des efforts de transformation pour moins émettre de CO2, tout en pénalisant financièrement les gros émetteurs.

Pour autant, la loi américaine n’est pas aussi ambitieuse qu’il y paraît, de nombreuses concessions ayant été faites pour les industries polluantes telles que les mines ou la production d’électricité à partir de charbon. Il n’empêche. En adoptant cette loi, qui devra tout de même être confirmée par le Sénat, les Etats-Unis confirment qu’ils ont dépassé le débat sur la réalité du réchauffement climatique longtemps nié par l’administration Bush. Cela place la prochaine Conférence de Copenhague de décembre prochain sous de bons auspices afin de dégager un consensus international pour trouver une suite au protocole de Kyoto.

Mais le plus important, c’est que l’administration américaine semble convaincue que la réduction des émissions de gaz à effet de serre n’est pas simplement porteuse de contraintes mais qu’elle offre de réelles opportunités. Réduire l’émission de CO2, c’est par exemple moderniser l’habitat qui est l’une des principales sources de rejet. Et cette modernisation signifie des chantiers et donc des emplois, dont le président Obama rappelle à juste titre qu’ils ne peuvent pas être délocalisés. De même, les transports seront aussi concernés, ce qui offre à l’industrie automobile, bien mal en point, de nouvelles pistes de conversion.

 

Des résistances demeurent

 

Il faut aussi ajouter à cela le fait que la réduction des GES dans l’industrie exige des technologies qui restent encore à être inventées, d’où une formidable aubaine pour la recherche et le développement. La mise en place de filière scientifique dédiée au développement durable dans les grands centres universitaires américains témoigne bien de cette tendance qui est en train de se mettre en place : «green is business».

Pour autant, la partie est loin d’être gagnée. Nombre d’élus, y compris des démocrates, estiment que toute contrainte sur les industries est une menace au mode de vie américain et à la compétitivité de l’économie. Alors que l’Europe a bien l’intention de bâtir sa croissance sur l’économie verte aussi vite que possible, l’Amérique risque encore de rater ce virage technologique et d’entériner le déclin que nombre d’observateurs lui prédisent.