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Blocage sur la définition de l'origine des produits à la Zale: Dialogue de sourds

par M. Saâdoune

A partir de quel niveau un bien peut-il être certifié produit algérien, tunisien ou saoudien ? Un taux de transformation locale de 40 %, disent les pays du Golfe, à 70 % estiment les Maghrébins, l'Egypte et le Soudan. Quatorze rounds de négociations dans le cadre de la Zone arabe de libre-échange (Zale) n'ont pas permis d'aplanir les divergences.

C'est quasiment un dialogue de sourds. Et cela évoque clairement les appréhensions des hommes d'affaires algériens, qui ne voient pas d'un bon oeil cette zone arabe de libre-échange et ont demandé, en vain, que l'adhésion de l'Algérie soit différée de deux ans. Depuis janvier 2009, l'Algérie, qui a ratifié l'accord en 2005, est officiellement membre de la Zale. Les raisons des réticences des hommes d'affaires algériens sont parfaitement connues.

La Zale peut-être destructrice du potentiel national, si elle permet à certains pays arabes de se transformer en cheval de Troie des biens manufacturés en dehors de la zone arabe et principalement en Asie. Les pays du Golfe sont une plateforme notoire pour les producteurs asiatiques.

Les inquiétudes du patronat sont confirmées par la nature du blocage actuel des négociations. Le problème se pose pour la définition des règles d'origine de 26 catégories de produits, selon le conseiller chargé de la coopération au ministère du Commerce, Redouane Laalili, cité par l'agence APS.

Les négociations achoppent sur des groupes de produits comme les textiles, les produits de la minoterie, les préparations de viandes, les combustibles minéraux, les produits pharmaceutiques, les huiles essentielles, les détergents et les matières plastiques.

Des secteurs que l'Algérie, les pays du Maghreb, l'Egypte et le Soudan, veulent protéger en exigeant qu'ils présentent un taux de transformation de 70 % dans les pays concernés. Les pays du Golfe, peu peuplés et à hauts revenus, veulent maintenir un taux de 40 %, prévu, de manière provisoire, par la convention de facilitation des échanges commerciaux.

L'Algérie, a expliqué le responsable du ministère du Commerce, défend ce taux de transformation de 70 % en arguant que des pays arabes ont déjà signé des accords d'association sur la base de ce critère. Il s'agit clairement d'éviter que des produits venant d'autres zones, d'Asie notamment, soient certifiés « arabes » pour inonder les marchés nationaux au détriment des productions locales.

 

Produits asiatiques, emballages arabes

 

Le seuil de 70 % de transformation locale est considéré comme une sauvegarde opérationnelle qui ne freine pas les échanges arabes, mais évite que la Zale soit détournée de sa vocation.

Le responsable algérien estime qu'il s'agit d'un critère rigoureux destiné à limiter au « maximum l'accès des produits non arabes à cette zone de libre-échange ». Selon des experts du commerce international, un taux inférieur à 50 % consiste à admettre une «arabisation» formelle d'une marchandise produite ailleurs. Sur une base de 40 %, pour rendre éligible nombre de produits élaboré ailleurs, il suffirait d'en assurer seulement l'emballage. Le responsable algérien a relevé que les pays du Golfe campent sur cette position et louvoient dans les négociations.

Apparemment, on s'est confortablement installé dans un double monologue puisque les deux groupes de travail ont tenu quatorze réunions sans parvenir à un compromis. « Les négociations sont très ardues entre les deux camps », a indiqué M. Laalili. Ces négociations doivent se poursuivre en mai au Caire et on s'attend à ce que le groupe du Golfe présente de nouvelles propositions. La révélation publique du « blocage » suggère que le gouvernement algérien ne veut pas céder et négociera âprement pour éviter que cette zone de libre-échange ne se transforme en désarmement tarifaire sans contrepartie en faveur de producteurs lointains.

C'est une sorte de message rassurant adressé aux opérateurs économiques algériens, qui considèrent qu'une suppression supplémentaire des barrières tarifaires fait peser un risque sur le potentiel productif national. Le ministre du Commerce, Hachemi Djaâboub, avait rappelé aux opérateurs algériens qu'en vertu de l'article 15 de l'accord sur la zone de libre-échange, l'Algérie avait le droit de dresser une liste de produits exclus d'importations. « Il n'y a aucun danger », avait-il déclaré.