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l’image en trompe-l’oeil de l’économie israélienne

par Akram Belkaïd

Pour de nombreux économistes occidentaux, Israël est bien plus qu’un pays émergent puisqu’ils le considèrent comme faisant partie du groupe des nations aux économies les plus avancées. L’un des principaux arguments avancés pour défendre cette opinion concerne le dynamisme du secteur technologique israélien, puisque l’Etat hébreu compte plus de 4.000 start-up inscrites au Nasdaq, la Bourse électronique américaine dédiée aux valeurs high-tech.

L’existence d’un véritable axe de recherche entre les Etats-Unis et Israël est d’ailleurs l’un des éléments stratégiques qui renforce l’influence du second auprès des milieux d’affaires et des décideurs étasuniens.

 

 Le high-tech : un atout de poids

 

En effet, les sociétés technologiques israéliennes sont d’abord des interlocutrices incontournables en matière de recherche fondamentale pour un nombre important de leurs homologues américaines, notamment celles basées en Californie, dans la Silicone Valley. Quand il s’agit de trouver des partenaires ou encore de délocaliser des unités de recherche et de développement, « America.Tech » a le choix entre l’Inde, l’île Maurice et Israël. A ce sujet, il faut noter que Dubaï est le seul pays arabe à tenter de se placer dans ce créneau, avec notamment ses cités dédiées aux hautes technologies.

Ensuite, ces entreprises israélo-américaines ne se privent pas de participer au financement de la vie politique américaine, avec ce que cela implique comme capacité d’influence et de lobbying pour la défense des intérêts israéliens. Cette pratique, qui est régulièrement dénoncée dans les colonnes des médias arabes, est pourtant légale et rien ne pourrait empêcher les grands groupes arabes qui ont des filiales aux Etats-Unis — c’est le cas des sociétés pétrolières ou de celles spécialisées dans la finance et les loisirs — d’en faire autant.

Cette image high-tech d’Israël contribue beaucoup à renforcer son image auprès des opinions publiques occidentales, à commencer par celle des Etats-Unis.

Electronique, informatique, recherche sur le vivant, tous ces secteurs sont mis en avant et opposés de manière plus ou moins explicite au « retard arabe », voire à la structure « archaïque » de la majorité des économies des pays qui entourent Israël. C’est là le pendant du discours politique habituel qui consiste à mettre l’accent sur la « démocratie israélienne » par opposition, hélas, au caractère dictatorial et liberticide qui caractérise le monde arabe.

 

Une économie inégalitaire

 

Si l’on ne peut nier le caractère dynamique de l’économie israélienne ( 4,1% de croissance du PIB en 2008, contre 6% en 2007, alors qu’une croissance atone est prévue en 2009 en raison de la crise financière mondiale), il faut tout de même fortement nuancer ces jugements laudateurs.

Il faut d’abord rappeler que l’Etat hébreu est celui qui (avec l’Egypte) bénéficie le plus de l’aide financière américaine. Chaque année, de manière directe ou indirecte, ce sont plus de 2 milliards de dollars qui sont ainsi alloués à Tel-Aviv par le Congrès. Au cours de ces dernières années, cette aide a eu tendance à diminuer mais la victoire électorale des démocrates à l’occasion des élections de mi-mandat en 2006 et le renforcement de leur position en novembre 2008 devrait contribuer à augmenter de nouveau cette aide. Prenant prétexte de ce qui se passe à Gaza, plusieurs parlementaires des deux chambres américaines ont d’ailleurs d’ores et déjà appelé à renforcer ces flux financiers, qui furent en leur temps utilisés comme moyen de pression par Bush père afin de forcer le gouvernement israélien à participer aux discussions de paix de Madrid en 1991.

Enfin, l’économie est loin de résoudre les problèmes sociaux qui minent la société israélienne alors qu’ils sont largement ignorés par les médias internationaux. Plus de 20% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, et, parmi les plus touchés, figurent en bonne place les juifs ultra-orthodoxes et les Arabes israéliens. Les réformes à la hussarde menées par le gouvernement Netanyahu au début des années 2000 ont aggravé la précarité et provoqué le mécontentement récurrent des syndicats, ces derniers devant néanmoins se restreindre dès lors qu’Israël part en guerre contre les Palestiniens ou les Libanais.