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La «rahma» et le durcissement des cœurs

par El-Houari Dilmi

«Il vous est prescrit de jeûner un nombre déterminé de jours. Celui qui d'entre vous est malade ou en voyage peut s'en dispenser, quitte à jeûner plus tard un nombre de jours égal. Ceux qui peuvent observer le jeûne et le rompent doivent se racheter, moyennant la nourriture d'un pauvre pour un jour. Quiconque se montrera très large, en retirera un plus grand avantage. Mais en tout état de cause, il est préférable pour vous de jeûner», dit le Saint Coran. Scénario désormais classique, chaque année, à l'approche du mois de Ramadhan, des «mesures exceptionnelles» sont prises pour assurer le repas du f'tour des Algériens en priorité première. Comme si se sustenter durant le mois de tous les soucis devenait une «urgence nationale» pour les pouvoirs publics, une mobilisation générale est décrétée pour espérer passer sans trop d'écueils une période supposée être celle de l'abstinence et de la piété. Ainsi, pour la pomme de terre, ce tubercule indispensable dans la cuisine de la ménagère, de grandes quantités ont été déstockées pour réguler les prix, de même que les viandes rouges qui seront importées pour tenter d'agir à la baisse sur les prix prohibitifs des produits carnés. Et même s'il est vrai que la demande durant le mois de carême explose comparée au reste de l'année, une bonne organisation du circuit des approvisionnements en produits alimentaires n'est pas nécessaire pendant un seul mois mais bel et bien tout au long de l'année. Outre les tracas posés par la fourniture de nourriture, en quantités suffisantes, à tous les Algériens, vient s'ajouter un autre casse-tête des plus inquiétants : le nombre effarant de morts sur nos routes ensanglantées. Selon le ministre de l'Intérieur, 31.000 accidents de la route ont été enregistrés en 2022 ayant fait plus de 3.400 morts, un bilan de guerre.

Coïncidant avec le printemps, le Ramadhan de cette année sera ensoleillé et donc propice aux flâneries et autres shoppings diurnes comme nocturnes, au moment où les Algériens, ceux qui ont la chance de travailler du moins, profitent de leur argent, généré par les dernières augmentations des salaires et de pensions de retraite.

Mais le petit pactole risque de fondre comme neige au soleil, tant les yeux sont les premiers qui mangent? bien avant la panse dans ce mois de toutes les envies. Reste à espérer que la «rahma» ne quitte pas nos marchés dans un mois qui devrait ressembler à tous les autres, puisque penser à la table du f'tour n'est pas la valeur spirituelle voulue par le mois de jeûne.

En effet, des études scientifiques pointues ont démontré que ne pas trop manger était une bonne chose pour le corps humain. Mais tout le monde ne l'entend pas de la même oreille ou plutôt du même ventre !