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«De loin, je vous ai pris pour un homme» !

par Amine Bouali

Un jour, au milieu des années 1950, le bachagha Khelladi Benmiloud, dont l'influence s'étendait à toute la région du Tiout (une oasis située à une dizaine de km à l'est de Aïn Sefra) a eu maille à partir avec un haut fonctionnaire de l'administration coloniale. Ce dernier, le voyant se présenter dans son bureau recouvert d'un magnifique burnous blanc, l'apostropha de manière fort désobligeante : «Vous savez, monsieur le bachagha, de loin, je vous ai pris pour une femme» ! Sans se démonter le moins du monde, le fier lion du Tiout (qui en avait vu d'autres) ! lui répliqua du tac au tac : «Vous savez, monsieur le fonctionnaire, de loin, je vous ai pris pour un homme» ! Le bachagha Khelladi Benmiloud démissionna avec fracas de son poste de sénateur d'Oran (2e collège) en 1958, pour protester contre «l'ignoble répression collective exercée à l'égard de populations sans défense». Plusieurs morales peuvent être tirées de l'authentique anecdote rapportée plus haut : «L'habit ne fait pas le moine» ? «À malin, malin et demi» ? «C'est l'arroseur arrosé» ? Ou «Le bâton que tu sous-estimes risque de t'aveugler» ? Ou alors, de manière plus directe : «Le colonialisme n'est pas une machine à penser, n'est pas un corps doué de raison. Il est la violence à l'état de nature et ne peut s'incliner que devant une plus grande violence» (Dixit le regretté Frantz Fanon).