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Après moi le déluge !

par Abdelkrim Zerzouri

A croire que tous les Algériens ont décidé ensemble et en même temps de se faire établir la carte et le passeport biométriques, exactement de la même façon quand ils s'accordaient si bien à vider les marchés en un seul mouvement, à la veille du ramadhan et des fêtes religieuses. Les services biométriques au niveau des communes et des délégations communales sont submergés par une très forte affluence de demandeurs de ces documents électroniques. Bien évidemment, c'est un rush avec dans l'idée de retirer sa carte ou passeport biométrique avant l'approbation et l'application de la loi de finances complémentaire 2018 (LFC 2018). Les Algériens, tant qu'ils le peuvent encore, tiennent à éviter coûte que coûte les retombées de la LFC 2018, chose qui les pousse en masse, instinctivement, vers les services biométriques pour avoir la carte biométrique gratis, au lieu de 2.500 dinars qu'il faut honorer après l'entrée en application des articles de la LFC 2018, ainsi que le passeport pour d'autres, en déboursant uniquement 6.000 dinars au lieu des 10.000 prévus par la LFC 2018. A défaut de militer, par tous les moyens légaux, en faveur de l'annulation de l'introduction de nouvelles taxes à travers cette LFC 2018, notamment celles touchant les documents électroniques, les citoyens prennent une voie détournée pour échapper à la hausse vertigineuse des taxes de documents biométriques, recourant à la stratégie la plus usitée en Algérie qui consiste à ne pas laisser le temps au temps et passer instinctivement à l'action dans l'immédiat, en un seul mouvement, pour tout rafler à un prix modéré et même gratuit. D'ailleurs, le report du Conseil des ministres, dont la tenue était annoncée jeudi dernier, et qui devait justement examiner cette proposition de la hausse des taxes contenue dans la LFC 2018, est un signe qui a été apprécié à sa juste mesure par les demandeurs de documents biométriques. Cela prolonge le délai de la trêve, avant la hausse des taxes en question, et donne du temps au plus grand nombre de citoyens pour se faire établir le passeport et la carte biométriques avant le passage à l'application de la nouvelle tarification, soit 2.500 dinars pour la carte biométrique et 10.000 dinars pour le passeport biométrique.

Dans l'ensemble, ce comportement individualiste exprime le manque d'assurance, voire la peur de tomber dans le néant, ou d'être dans l'incapacité d'arriver à quelque chose, y compris la crainte de lendemains durs, d'une façon ou d'une autre. C'est aussi un comportement qui révèle tout un état de dislocation sociale. L'individu ne vit plus pour le collectif. Car, de la sorte, ceux qui arriveront à se faire établir la carte biométrique gratuitement ou le passeport à 6.000 dinars n'ont aucune pensée pour tous les autres, ceux qui viendront demander leurs documents électroniques après la mise en application des articles de la LFC 2018. Après moi le déluge !