Moh Chérif Hannachi a enfin lâché le morceau. Il est
parti. Reviendra-t-il ? Nul ne le sait. Par contre, le désormais ex-président
de la JSK, qui a dirigé sans partage le club depuis 1993, a été réellement
dégagé par la rue, les fans et les inconditionnels de la JSK. A plusieurs
reprises depuis ces six ou sept dernières années, il avait annoncé son départ,
comme un patriarche, pour qu'en début de saison, il revient par la grande
porte, avec dans les bras quelques nouveaux joueurs et un coach, étranger bien
sûr. Moh Cherif Hannachi est parti à la faveur d'une
véritable bourrasque qu'il a lui même provoquée au
sein de l'un des clubs les plus titrés d'Algérie. Il a été depuis quelques
années poussé vers la porte de sortie, mais sa démission a été voulue et
revendiquée autant par les dirigeants, les supporters et même les autorités.
Par contre, avec des pancartes ?'Aidez-moi à partir, je suis le problème'',
c'est tout l'écosystème social de la JSK, en ce qu'il cristallise toute la
colère et la rancœur de la Kabylie et tous les fans du club à travers le pays,
qui respire, après des années, de gestion personnelle, chaotique, approximative
et tout à fait incompétente, selon ses détracteurs, de ce club cher aux
puristes du football. Mais, face à l'ingratitude et la cécité de certains,
l'ex-président de la JSK a été un véritable totem, un monument, qui, à une
époque pas tellement lointaine, faisait l'unanimité autour de lui, lorsque les
titres pleuvaient, lorsque l'argent coulait à flot. Aujourd'hui, la JSK, le
club de toute une région où la moindre étincelle fait chanceler à Alger, semble
libérée. Le ?'H'na imout Kaci'' est parti. C'est déjà un bon signe pour tous
les sociologues et autres politologues algériens adeptes de la théorie du
changement. Car ce départ, même au forceps, de Hannachi, est symptomatique du
grand désir de changement, de passer à autre chose, de faire du nouveau avec du
neuf, qui irrigue une bonne partie du corps social dans cette Algérie qui a
soif de vivre son temps. L'immobilisme, le désoeuvrement
et le manque d'argent, le chômage et les horizons bouchés sont également des
facteurs de colère et de pression, de stress qui peuvent provoquer chez nos
jeunes des tendances suicidaires style ?'h'rig''. Le
despotisme de Hannachi s'explique également par cette manie des Algériens qui
ne veulent, en aucune manière, laisser la place à ceux qui peuvent apporter un
plus, de nouvelles expériences, une autre manière de voir les choses, de
concevoir l'avenir. Le départ de Moh Cherif Hannachi
serait annonciateur de changements que toute une région attend, depuis le
dernier titre du club. S'il n'a pas eu l'intensité d'un séisme, le départ du
président de la JSK l'est certainement pour des présidents de club, et montre
la voie à un renouvellement de toutes les structures non seulement sportives du
pays, mais dans les mentalités, dans la bonne gouvernance, et l'alternance
entre les générations. Qu'elles soient du monde du sport, de la politique ou
autres. Car ce dont souffrent le plus les Algériens, c'est surtout cet
immobilisme, ce stress du ?'surplace», cette désagréable sensation de se figer
dans le temps. Or, les Algériens veulent des victoires, tout comme les fans de
la JSK. Mais il n'y aura jamais de victoires sans changement.