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Absence de moralité !

par Kamal Guerroua

Ce qui a attiré mon attention cette semaine, c'est le fait que de mauvaises pratiques ont toujours cours chez certains de nos agriculteurs ! Des pratiques qui remontaient, hélas, à plus d'une vingtaine d'années sans que les autorités de notre pays aient réagi d'une manière ferme et implacable. Irriguer des fermes et des vergers maraîchers entiers par des eaux usées, comme dans les cas révélés récemment par la Gendarmerie nationale à Skikda et à Tiaret, est non seulement un crime contre la santé des consommateurs (propagation de maladies mortelles telles que la typhoïde, le choléra, l'hépatite, et même le cancer, etc.), mais aussi un signe inquiétant d'absence de toute moralité. Au moment où des campagnes de sensibilisation contre l'utilisation des OGM sont menées un peu partout dans le monde par des associations écologiques préoccupées par la détérioration de l'environnement, on remarque que, chez nous, celles-ci, si tant est qu'elles en existent déjà, devraient d'abord être destinées contre ce phénomène bizarre d'irrigation par les eaux usées. Encore un retard dans la prise de conscience des nôtres des véritables enjeux de l'époque. Mais là aussi, l'État semble avoir la main molle et peu agissante. Sinon comment expliquer la prolifération de tels abus ? Il y a, à vrai dire, d'un côté, l'intrusion de quelques cercles, en connivence avec ces agriculteurs véreux, en échange de pots-de-vin et de faveurs. Et de l'autre, la difficulté qu'il y a à tout contrôler et à tout vérifier de la part des pouvoirs publics encourage, par ricochet, ces agriculteurs-là à récidiver même après être déjà pris en flagrant délit et punis. Puis il faut reconnaître que beaucoup d'entre ces derniers sont forcés d'y recourir parce que, d'une part, incapables de répondre aux lourdes charges financières qu'exigent par exemple l'exploitation des barrages, le filtrage de l'eau, l'usage des engrais, etc. D'autre part, l'avidité et la course derrière le profit rapide ont enlevé à l'agriculture traditionnelle toutes ses lettres de noblesse. Par ailleurs, les services techniques d'hygiène ainsi que les différents organismes de protection des consommateurs sont également, paraît-il, dépassés par un fléau qui prend, de plus en plus, de l'ampleur. L'agriculture étant trop négligée en Algérie alors que l'oukase de l'austérité nous menace de l'insécurité alimentaire. Outre ce triste constat, les images retransmises dernièrement par les médias de ces grosses quantités de tomates avariées, jetées en pleine nature à Chlef, choquent plus d'un. N'est-il pas temps de penser à équiper tous les entrepôts de stockage du territoire national de chambres froides modernes et de moyens adéquats pour la conservation, la commercialisation et la promotion des produits alimentaires du terroir ? De «révolutionner» ce secteur névralgique, l'agriculture s'entend, pour parer aux impondérables que feraient peser sur la nation les fluctuations des prix des hydrocarbures ? De réguler et de démanteler, en s'appuyant bien sûr sur une législation rigoureuse et adaptée, les réseaux parallèles informels qui font de «pratiques monopolistiques» un fonds de commerce juteux ?

Enfin, lorsqu'on se rend compte de toutes ces failles, on est en droit de s'interroger en quoi a-t-on dépensé tout le pactole réservé par le président Bouteflika aux «plans de relance économique», mis en œuvre depuis le début des années 2000 ?