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L'échec

par Ahmed Farrah

Partout les peuples sont menés en bateau et la traversée a trop duré pour eux. Le navire tangue et prend l'eau de toutes parts. La peur de couler cache le mal de mer qui s'intensifie. Ils souffrent. Ils sont fatigués et laminés d'écoper les eaux envahissantes. Ils n'en peuvent plus. Ils n'attendent que le prochain port pour descendre, mais faut-il qu'il soit en vue. Des passagers croient l'avoir repéré. Un mirage des mers ou un rêve d'éveillés ? Peu importe ! Ils devront garder les forces pour espérer arriver et ne pas sombrer dans le naufrage dans le cas où le bateau chavire. Ils en ont assez d'être ballottés une fois à droite, une fois à gauche sans aucun succès. Ils ont pris alors la décision de tracer le cap tout droit vers ce bout de terre sorti de nulle part et ne figurant dans aucune carte de navigation maritime. En s'approchant de plus en plus de cet îlot, l'eau devient peu profonde et le bateau s'arrête pour jeter l'ancre et faire descendre les échelles et les barques. Les passagers accourent et se bousculent pour prendre part au voyage vers ce paysage qui leur paraît paradisiaque et qu'ils baptiseront par la suite Macronland en souvenir d'un président français qui s'appelait Emmanuel Macron venu à 39 ans, en homme providentiel, dans un pays touché par un méga séisme qui avait bouleversé son système politique archaïque et vieillissant. Un prophète qui s'appelait Jacques Attali avait déjà prévu en 2015 l'arrivée d'un président inconnu à la tête de la France, comme il a aussi prévu des bouleversements socio-économiques et comportementaux à travers la planète, à savoir : l'austérité, la flexibilité du travail, l'ubérisation de l'économie, la fin de la fonction publique, des caisses publiques de retraite et de sécurité sociale, des congés payés, l'ouverture des frontières aux marchandises et à la finance et leur fermeture aux populations du Sud? Certains disent qu'il n'avait rien d'un prophète et qu'il était simplement l'un de ceux qui avaient accès aux laboratoires et aux officines qui contrôlent tout ce qui s'expérimente dans le monde.

L'échec des Etats-providences face à l'oligarchie mondiale est consommé. La finance contrôle tous les rouages des Etats et déprogramme puis programme à sa guise le mental des populations qui restent coincées devant les écrans de télévision subissant ainsi un battage ininterrompu d'images subliminales et de propagande les réduisant à des zombies prêts à exécuter les ordres dictés.

Ici, l'échec aux législatives du « chef » du parti FLN est cuisant. Lui qui se prenait pour l'Etat qui allait tenir le pays pour 100 ans encore, était impuissant à convaincre les électeurs d'aller voter. La classe politique algérienne est désavouée par les trois quarts de la population qui ont voté blanc ou nul et boycotté le scrutin. Elle doit revoir entièrement sa copie. Le message envoyé aux pouvoirs publics, à travers les résultats des élections législatives, par la majorité des Algériens, doit être urgemment décrypté pour déceler les problèmes imminents et prendre des mesures en conséquence. On ne peut plus continuer à tenir des discours paternalistes et intimidants puis attendre en retour l'adhésion de la population à un projet d'exclusion. Le peuple 2.0 est connecté et sait ce qui se passe dans le moindre recoin de la planète, il n'est plus ce que croient certains pique-assiettes qui n'excellent que dans les diagonales d'un jeu d'échec? il est sage et très patient mais n'aime pas les abus.